Le microbiote intestinal : un nouvel espoir pour prévenir l'obésité infantile ?

Fléau de notre siècle, près de 40 millions d’enfants de moins de 5 ans étaient en surpoids ou obèses en 2019, selon l'OMS1. Pour prévenir l’obésité infantile et rééquilibrer la balance énergétique, l’accent est mis sur l’alimentation et l’activité physique. Nécessaire mais pas suffisant. Les espoirs se tournent désormais vers le microbiote intestinal acteur clé du métabolisme et de la communication avec le cerveau. Décryptage.

Publié le 06 janvier 2022
Mis à jour le 18 janvier 2022

A propos de cet article

Publié le 06 janvier 2022
Mis à jour le 18 janvier 2022

40 millions d’enfants de moins de 5 ans étaient en surpoids ou obèses en 2019

Microbiote et obésité : la dysbiose sur le grill

Véritable écosystème microbien niché dans nos entrailles le microbiote intestinal est essentiel à notre santé. Concernant l’obésité, on sait actuellement qu’une faible diversité au sein du microbiote intestinal et la surreprésentation de certaines espèces bactériennes augmentent le risque d’adiposité, de résistance à l’insuline et d’inflammation. Les patients obèses auraient ainsi une flore moins riche que les individus minces bien que les résultats ne soient pas encore tous unanimes.

Microbiote et obésité : les facteurs de risques

Outre les facteurs génétiques, d’autres facteurs contribueraient au développement de l'obésité chez l’enfant : L’alimentation de la maman pendant la grossesse, le mode d’accouchement, l’alimentation du nourrisson (allaitement vs biberon), traitement antibiotique durant l’enfance... Les mécanismes biologiques par lesquels ces possibles facteurs de risques vont influencer le développement d’une obésité ne sont pas encore clairement déterminés. En revanche on suspecte et on s’intéresse particulièrement au microbiote.

Microbiote et obésité : preuve par la science

On le voit, l'obésité est une maladie multifactorielle. Il est donc encore trop tôt pour évoquer un lien de cause à effet exclusif entre microbiote et obésité chez l’Homme. Ce lien est en revanche avéré chez l'animal où des études ont montré que le caractère « obèse » peut être transmis d’une souris donneuse « obèse » vers souris receveuse « mince » par transplantation de microbiote fécal et vice versa.

Une seule étude a tenté la transplantation du microbiote de personnes minces chez l'homme en surpoids. Aucune diminution de l' (sidenote: Indice de Masse Corporelle (IMC) L'Indice de Masse Corporelle évalue la corpulence d’un individu en estimant la masse grasse du corps calculée par un rapport entre le poids (kg) et le carré de la taille (m2). https://www.nhlbi.nih.gov/health/educational/lose_wt/BMI/bmicalc.htm https://www.euro.who.int/en/health-topics/disease-prevention/nutrition/a-healthy-lifestyle/body-mass-index-bmi ) n'a pour l'instant été constatée.

Microbiote et obésité : quand les bactéries contrôlent notre assiette et notre poids

Appétit/obésité, comment ça marche ? La relation entre alimentation microbiote et obésité est complexe. Le modus operandi est le suivant : la nourriture est digérée, puis les nutriments métabolisés par les bactéries, les molécules produites comme les (sidenote: Acides biliaires Les acides biliaires facilitent la digestion et l'absorption des lipides dans l'intestin. Ils exercent également des fonctions de type hormonal et sont impliqué divers processus métaboliques. Le microbiote intestinal va modifier les acides bilaires en retour les différents acides biliaires vont avoir un impact sur sa composition. Staels B, Fonseca VA. Bile acids and metabolic regulation: mechanisms and clinical responses to bile acid sequestration. Diabetes Care. 2009;32 Suppl 2(Suppl 2):S237-S245.  Li R, Andreu-Sánchez S, Kuipers F, Fu J. Gut microbiome and bile acids in obesity-related diseases. Best Pract Res Clin Endocrinol Metab. 2021;35(3):101493.  ) , les (sidenote: Acides Gras à Chaîne Courte (AGCC) Les acides gras à chaîne courte sont une source d’énergie (carburant) des cellules de l’individu, ils interagissent avec le système immunitaire et sont impliqués dans la communication entre l’intestin et le cerveau. Silva YP, Bernardi A, Frozza RL. The Role of Short-Chain Fatty Acids From Gut Microbiota in Gut-Brain Communication. Front Endocrinol (Lausanne). 2020;11:25. ) ou autres molécules vont à leur tour initier certains mécanismes qui vont avoir un impact sur l’obésité. Par exemple un microbiote altéré va impacter le contrôle du stockage des graisses et augmenter en excès la récupération d’énergie. L’intestin et le cerveau ne vont plus pouvoir correctement échanger, avec un dérèglement de l'appétit et du sentiment de satiété.

Microbiote et obésité : personnaliser notre alimentation pour mieux prévenir

On le voit, notre alimentation a une influence sur la composition de notre microbiote. Le microbiote de l’enfant va évoluer durant les premières années de vie. Il reflète son environnement de vie et son alimentation. Pour les chercheurs, cette période de vie serait importante pour réaliser des interventions alimentaires. Comment ? Via les prébiotiques naturellement présents dans les aliments et dont raffolent les bactéries mais aussi grâce aux probiotiques, qui sont des micro-organismes que nous pouvons directement ingérer.

Adapter son alimentation en fonction des spécificités de son microbiote. Cette nouvelle voie permettrait de mieux prévenir dès l’enfance les risques d’obésité. Et si cette alimentation personnalisée devenait un allié de poids dans la lutte contre l’obésité, un fléau planétaire qui a presque triplé en l’espace d’un demi-siècle1 ? Le champ des possibles – et des espoirs – reste ouvert...

 

1 https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/obesity-and-overweight

Sources

Baranowski T, Motil KJ. Simple Energy Balance or Microbiome for Childhood Obesity Prevention? Nutrients. 2021;13(8):2730. Published 2021 Aug 9.  

 

    A lire aussi