Obésité : la transplantation de virome fécal à l’essai

Avec leurs propriétés antagonistes, les bactériophages ont le potentiel de moduler le microbiote intestinal. Une étude a montré que le transfert de communauté virale modifiait le phénotype des souris receveuses obèses en un phénotype proche des souris donneuses minces.

Publié le 25 septembre 2020
Mis à jour le 30 mars 2022

A propos de cet article

Publié le 25 septembre 2020
Mis à jour le 30 mars 2022

Ces dernières années, le lien entre dysbiose intestinale et certaines maladies comme le syndrome métabolique, l’obésité, le diabète, est devenu évident. Parmi les solutions envisagées la transplantation de microbiote fécal (TMF)1, aurait un potentiel thérapeutique contre ces pathologies. Plus récemment, la transplantation de virome fécale (TVF) - communauté virale du microbiote - s’est montrée efficace pour éliminer les symptômes des patients atteints d’une infection récurrente à Clostridioides difficile. En effet, la communauté virale intestinale, dominée par les bactériophages, aurait un rôle clé sur la structure du microbiote.

La TVF pour normaliser poids et métabolisme

Afin d’évaluer le potentiel de la TVF pour restaurer un phénotype mince initialement obèse, certains paramètres physiologiques (poids, glycémie) et l’expression de gènes clés du métabolisme ont été mesurés chez des souris minces (LF)2 et des souris recevant un régime gras (HF)2 pendant 14 semaines. Résultats : La TVF provenant d'un donneur LF a diminué la prise de poids, a normalisé la glycémie et l'homéostasie énergétique chez les souris HF. En particulier 7 gènes, impliqués, entre autres, dans les voies de signalisation de la leptine, le métabolisme du glucose et la lipolyse, ont été impactés, suggérant aussi un effet bénéfique de la TVF sur le poids et le métabolisme.

Un bénéfice via une modulation intestinal

Un traitement préalable à l’ampicilline (Amp)2 chez les souris HF a rendu inefficace la TVF, laissant penser que le bénéfice de la TVF passerait par une modulation du microbiote intestinal. En effet, les différents traitements (TVF ou TVF + Amp), ont modifié l’indice de diversité Shannon viral et bactérien des souris HF. Sans surprise, l’Amp et/ou le régime HF induisent une baisse de la diversité bactérienne, qui est restaurée avec une TVF vers un niveau similaire aux souris LF. Quant à la diversité virale, elle semble peu impactée par le régime HF mais a été fortement augmentée avec l’Amp, qu’elle ait été suivie ou non par une TVF. La prise d’Amp aurait pour conséquence l’induction de prophages3 modifiant profondément les communautés bactériennes et virales, qui ne seraient que partiellement restaurées par la TVF.

Microbiote et métabolome impactés

La TVF influencerait fortement la composition bactérienne et virale du microbiote intestinal des souris receveuses. En effet, le profil microbien du groupe HF+TVF était significativement différent de celui des deux groupes HF et LF. En cause, la grande diversité virale au sein des groupes LF et des régimes alimentaires distincts, LF vs HF. Même constat pour le profil de certains métabolites circulants associés à l’obésité, où des différences significatives entre les groupes HF+TVF et HF et LF ont été observées. Ainsi, les virus transférés moduleraient la composition du microbiote entrainant ainsi un changement vers un phénotype plus proche des souris minces. Cette preuve de concept souligne l’intérêt de poursuivre chez l’Homme l’évaluation de la TVF pour traiter les maladies associées à une dysbiose du microbiote.

1) La TMF est utilisée pour l’heure uniquement contre les infections récurrentes à Clostridioides difficile (anciennement appelé Clostridium difficile).

2) Cinq groupes traitements : LF « Low Fat » : groupe contrôle, souris minces recevant un régime normal ; HF « High Fat » : souris recevant un régime riche en graisses pendant 14 semaines ; HF + ampicilline (Amp) ; HF + Amp + TVF; HF + TVF ; traitement Amp : 24h avant le traitement TVF ; traitement TVF : au cours des semaines 6 et 7.

3) Le prophage correspond à la forme du bactériophage lorsqu'il est inséré dans le génome de la bactérie infectée