Cancer du poumon : l'influence majeure du microbiote pulmonaire

Selon une équipe américaine, la progression des cellules tumorales dans l’adénocarcinome pulmonaire serait alimentée par une dysbiose du microbiote pulmonaire via un dysfonctionnement de la réponse immunitaire locale. De nouveaux traitements anticancéreux pourraient directement s’inspirer de ces résultats. 

Publié le 16 avril 2019
Mis à jour le 01 août 2022
Actu PRO : Cancer du poumon : l'influence majeure du microbiote pulmonaire

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Publié le 16 avril 2019
Mis à jour le 01 août 2022

Le cancer pulmonaire est le cancer le plus mortel au monde, et l’adénocarcinome pulmonaire (un cancer pulmonaire non à petites cellules) sa forme la plus commune. Dans la mesure où 70 % des patients souffrent de complications infectieuses pulmonaires d’origine bactérienne, facteur d’aggravation de leur pronostic, le rôle du microbiote pulmonaire dans l’avancée de la maladie est une voie de recherche en plein essor.

Croissance tumorale et microbiote intestinal

Afin d’évaluer l’importance fonctionnelle des bactéries intestinales commensales sur la survenue et la progression de la tumeur, deux lignées de souris génétiquement modifiées chez lesquelles un adénocarcinome pulmonaire a été induit ont été utilisées : un groupe était composé de souris dépourvues de tout micro-organisme (« germ-free », ou GF) ; le second de souris exemptes d'organisme pathogène spécifique (« Specific Pathogen Free », ou SPF). 8 à 15 semaines après l’induction tumorale, les souris GF semblaient protégées : croissance tumorale ralentie, lésions de haut grade moins nombreuses. De plus, une quadri-antibiothérapie (ampicilline, néomycine, métronidazole, vancomycine) administrée aux souris SPF entre 2 et 6,5 semaines post-induction a stoppé la croissance tumorale, aux stades précoces comme aux stades avancés, et diminué le nombre de lésions de haut grade.

Dysbiose et infections locales boostent le cancer

Les chercheurs ont ensuite caractérisé le microbiote pulmonaire. Chez les souris qui développaient des tumeurs, la flore pulmonaire était plus abondante et moins diversifiée que celle des souris saines (surabondance d’Herbaspirillum et de Sphingomonadacae). Chez les souris programmées pour développer l’adénocarcinome, la greffe de bactéries sur-représentées dans le microbiote pulmonaire des souris porteuses de tumeurs a eu pour effet d’accélérer la croissance tumorale. Des expérimentations plus poussées chez l’animal et chez l’homme ont permis d’aboutir à l'hypothèse suivante : associée à l’adénocarcinome, l’inflammation pulmonaire provoquée par le microbiote local contribuerait à l’activation de la réponse immunitaire locale opérée par une catégorie spécifique de lymphocytes T : les LT γδ. Fortement représentées au niveau des tissus tumoraux, ces cellules se différencieraient en LT γδ producteurs de médiateurs pro-inflammatoires*, ce qui induirait l’infiltration de neutrophiles favorables à la prolifération tumorale. Les infections pulmonaires viendraient alimenter ce processus néfaste en entretenant la dysbiose locale. L’inactivation de ces LT ou de ses médiateurs apparaît donc comme une cible thérapeutique potentielle dans le futur.

*IL-22 et amphiréguline