Le microbiote de la langue, biomarqueur du cancer pancréatique ?

La présence d’un cancer du pancréas modifierait la composition bactérienne du microbiote de la langue. Une dysbiose caractéristique, qui pourrait conduire au développement d’outils diagnostiques.

Publié le 30 avril 2019
Mis à jour le 31 mars 2022

A propos de cet article

Publié le 30 avril 2019
Mis à jour le 31 mars 2022

 

De progression silencieuse, le cancer du pancréas est diagnostiqué tardivement, si bien qu’il représente aujourd’hui la septième cause de décès par cancer dans le monde. L’identification de biomarqueurs spécifiques s’avère donc une priorité de santé publique, pour assurer une prise en charge plus précoce. Les microbiotes et leurs dysbioses, fréquentes dans les cancers, représentent à cet égard une voie de recherche novatrice. Une équipe chinoise s’est intéressée aux caractéristiques microbiennes de la langue de patients atteint de cancer pancréatique. Une approche originale qui trouve ses racines dans la médecine traditionnelle chinoise, selon laquelle la langue est un révélateur de l’état physiopathologique de nombreux organes et de progression de la maladie.

Une diversité accrue chez les malades

Les chercheurs ont caractérisé les populations bactériennes des biofilms linguaux de 30 sujets présentant un cancer de la tête du pancréas, et de 25 sujets contrôles sains. Le séquençage de l’ARNr 16S a permis d’identifier 158 (sidenote: OTU Pour operational taxonomic unit, ou unités taxonomiques opérationnelles, qui désignent des regroupements de bactéries (qui ne sont pas nécessairement identifiées ou répertoriées dans les bases) présentant au moins. )  sur l’ensemble de la cohorte, dont la répartition s’avère liée à l’état de santé des sujets. L’atteinte pancréatique s’accompagne en effet d’une diversité microbienne significativement supérieure (enrichissement de 43 OTUs, dont Leptotrichia, Fusobacterium, Rothia, Actinomyces, Corynebacterium, Atopobium, Peptostreptococcus, Catonella, Oribacterium, Filifactor, Campylobacter, Moraxella et Tannerella). Inversement, un appauvrissement est observé en Haemophilus, Porphyromonas et Paraprevotella par comparaison aux sujets sains. Cette dysbiose linguale est susceptible d’impacter la composition des microbiotes intestinal et pancréatique via la circulation sanguine, favorisant les mécanismes immunitaires et inflammatoires liés au développement du cancer.

Vers un diagnostic précoce

L’équipe relève que des concentrations élevées en Leptotrichia et Fusobacterium, associées à de faibles taux d’Haemophilus et Porphyromonas, permettent de discriminer malades et personnes en bonne santé. À ce titre, le microbiote de la langue pourrait être un biomarqueur du cancer pancréatique, estiment les chercheurs. De quoi envisager le développement d’outils facilitant un diagnostic précoce, voire la prévention de la maladie. Cette hypothèse méritera néanmoins une confirmation à plus grande échelle et l’élargissement des analyses aux micro-organismes intestinaux, et salivaires des malades.