Cancer colorectal : une bactérie au cœur de la chimiorésistance

La présence de la bactérie Fusobacterium nucleatum dans les cellules tumorales diminuerait significativement l'efficacité de l'une des chimiothérapies adjuvantes de référence dans le traitement du cancer colorectal, selon une étude chinoise.

Publié le 23 avril 2019
Mis à jour le 06 octobre 2021

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Publié le 23 avril 2019
Mis à jour le 06 octobre 2021

 

La dysbiose intestinale a fait son entrée dans la recherche en oncologie depuis l’observation dans un nombre croissant d’études du rôle potentiel du microbiote intestinal dans la résistance ou la potentialisation de certains traitements anticancéreux. Par exemple, Fusobacterium nucleatum (Fn) - une bactérie anaérobie présente dans la cavité buccale, où elle peut occasionner des parodontites - a récemment été associée à la carcinogénèse et à la progression du cancer colorectal (CCR).

Impact sur la cytotoxicité

Des tests réalisés sur des lignées de cellules cancéreuses colorectales ont montré que Fn activait d’une manière beaucoup plus importante l’expression de BIRC3, une protéine inhibant l’ (sidenote: Apoptose Processus physiologique de mort cellulaire programmée ) . Or l’apoptose est l'un des mécanismes d'action supposés du 5-Fluorouracile (5-Fu), une chimiothérapie adjuvante de référence dans le CCR : Fn et le 5-Fu auraient donc des actions opposées dans le processus de destruction tumorale. Des analyses in vitro et in vivo supplémentaires ont confirmé que Fn réduisait directement la cytotoxicité - donc l’efficacité - du 5-Fu.

Un risque accru de rechute

Le mécanisme en cause ? La stimulation des récepteurs présents à la surface des cellules immunitaires (les Toll-like receptors 4, ou TLR4) par les bactéries via les composants de la paroi membranaire. Cette stimulation active une voie de signalisation, qui induit à son tour l'expression de BIRC3 dans les cellules cancéreuses. Ces résultats ont été confirmés par l’analyse des biopsies de 94 patients atteints de CCR en stade avancé et traités par 5-Fu : l’abondance de Fn était augmentée dans 22,3 % des échantillons, tout comme l'expression de BIRC3 et de TLR4. Ces deux indicateurs étaient également plus élevés chez les patients ayant rechuté. Fn et BIRC3 pourraient donc servir de cibles thérapeutiques pour réduire la résistance aux chimiothérapies dans le CCR à un stade avancé, estiment les chercheurs.

D'autres cancers en ligne de mire

Une précédente étude avait mis en évidence le potentiel du traitement par métronidazole pour diminuer la croissance tumorale chez des modèles de souris CCR : des travaux ultérieurs devront toutefois confirmer la pertinence de cette antibiothérapie pour contrer la chimiorésistance au 5-Fu avant de l'envisager en pratique clinique. D'autres cancers pourraient être concernés : BIRC3 a également été associé à une chimiorésistance au 5-FU dans le cancer pancréatique, et à la doxorubicine dans le cancer du sein.