Comment le microbiote intestinal télécontrôle le thymus

Le microbiote intestinal contrôlerait à distance, via des métabolites microbiens, la multiplication et la maturation de certains lymphocytes T dans le thymus. Ces derniers, en retour, influenceraient l’homéostasie de la barrière intestinale.

Publié le 12 novembre 2019
Mis à jour le 30 mars 2022
Photo : How does the gut microbiota remotely control the thymus?

A propos de cet article

Publié le 12 novembre 2019
Mis à jour le 30 mars 2022

 

Comment le microbiote intestinal module-t-il les fonctions immunitaires ? Une question à laquelle la science a encore du mal à répondre, mais qui pourrait impliquer une sous-population des cellules T : les lymphocytes MAIT, pour Mucosal-associated invariant T (cellules T invariantes associées aux muqueuses), qui participent à l'homéostasie de la muqueuse intestinale. Ces cellules MAIT sont des lymphocytes T non conventionnels à fonction innée, localisés préférentiellement dans les muqueuses intestinales : elles possèdent un récepteur invariant de reconnaissance des métabolites d’origine bactérienne.

Le mécanisme proposé

Dans un article publié dans Sciences, des équipes françaises résument leurs différents travaux qui tendent à montrer, chez la souris, que les bactéries intestinales régiraient le développement des cellules MAIT au niveau du thymus, siège de la maturation des lymphocytes T. Le mécanisme proposé, au regard des résultats d’expérimentations in vitro et in vivo, est le suivant : les bactéries intestinales sécrèteraient un métabolite de la voie de biosynthèse de la vitamine B2, le 5-OP-RU. Celui-ci traverserait rapidement la muqueuse intestinale et voyagerait jusqu’au thymus, où il serait reconnu par les récepteurs des cellules MAIT immatures. Cette reconnaissance induirait une multiplication des précurseurs de cellules MAIT et leur maturation. Les cellules MAIT matures quitteraient le thymus pour rejoindre les muqueuses, notamment intestinales, où elles renforceraient la barrière épithéliale, endigueraient le développement des populations bactériennes et participeraient à la défense contre les pathogènes. A noter que le 5-OP-RU n’est sans doute pas le seul métabolite bactérien impliqué : les chercheurs suspectent en effet le rôle d’autres médiateurs induits par le microbiote intestinal dans la multiplication et le maintien des cellules MAIT.

Le microbiote, partie intégrante du Soi ?

En proposant un nouveau mécanisme expliquant comment le microbiote intestinal peut influencer à distance des organes de l’hôte, cette publication participe également à décoder le dialogue complexe qui s’établit entre le microbiote et le système immunitaire. Et plus précisément entre le microbiote intestinal et le thymus, considéré comme le lieu de distinction du Soi (par élimination des lymphocytes reconnaissant le Soi, permettant d’éviter les maladies auto-immunes) et du Non Soi (sélection positive des lymphocytes reconnaissant des éléments étrangers). Mais dans le mécanisme proposé, la maturation au sein du thymus des lymphocytes MAIT a la particularité de reposer sur des métabolites du microbiote. De quoi suggérer que le microbiote intestinal pourrait faire partie intégrante du Soi immunitaire.