Un consortium de 7 souches restaure l'intestin pour vaincre les bactéries résistantes aux antibiotiques
Comment éliminer les ERV après l'administration d'antibiotiques ? Surtout pas par une attaque directe, mais plutôt en restaurant l'écosystème. Un consortium de 7 souches, issu d'une conception rationnelle, restaure la barrière intestinale grâce à un synergiste clé de voûte qui libère le potentiel de tout le groupe.
en_sources_title
en_sources_text_start en_sources_text_end

A propos de cet article
Tout clinicien connaît ce compromis. Un traitement par antibiotiques à large spectre peut sauver des vies, mais il laisse souvent le microbiome intestinal à découvert. Cet état de (sidenote: Dysbiose Déséquilibre de la communauté microbienne, caractérisé par une diminution des bactéries bénéfiques et une augmentation des espèces néfastes, pouvant entraîner des problèmes de santé. ) ouvre la voie à la colonisation par des bactéries résistantes aux antibiotiques, au premier rang desquelles les entérocoques résistants à la vancomycine (ERV). Une nouvelle étude de l'INRAE détaille une stratégie précise pour restaurer les défenses de l'intestin, non pas par la méthode forte, mais par la méthode douce.
Une mécanique de précision pour la restauration du microbiote
Plutôt que de s'appuyer sur le mélange indéterminé d'une transplantation fécale, les chercheurs ont utilisé la modélisation mathématique pour concevoir rationnellement un consortium de sept (sidenote: Bactéries commensales Types de bactéries qui cohabite pacifiquement avec leur hôte, notamment dans l’intestin. Elles peuvent lui être bénéfiques en renforçant le système immunitaire, en aidant à la digestion ou en luttant contre les pathogènes. ) spécifiques. Ce (sidenote: Produit ou agent biotherapeutique Produit biologique contenant des organismes vivants, comme des bactéries, et destiné à prévenir ou traiter des troubles ou maladies (les vaccins n'entrent pas dans cette catégorie). Rouanet A, Bolca S, Bru A, et al. Live Biotherapeutic Products, A Road Map for Safety Assessment. Front Med (Lausanne). 2020;7:237. ) , appelé Mix7, comprend des souches des familles Lachnospiraceae, Ruminococcaceae, Lactobacillaceae et Muribaculaceae. Lorsqu'il a été administré à des souris infectées par Enterococcus, Mix7 ne s'est pas contenté de lutter pour reconquérir l'espace ; il a activement accéléré la restauration du microbiote. Cette étude montre un rétablissement rapide du phylum Bacteroidota, un groupe clé souvent appauvri par les antibiotiques, ce qui a un lien direct avec la réduction des niveaux d'ERV.
Il est intéressant de noter que les chercheurs ont constaté que l'effet de Mix7 ne se résumait pas à la somme de ses parties. Lorsqu'ils ont retiré un membre spécifique, (sidenote: Muribaculum intestinale Espèce de bactéries anaérobies appartenant à la famille des Muribaculaceae, un membre communément et abondamment présent dans le microbiote intestinal d'une souris en bonne santé. Cette souche spécifique a été identifiée dans l'étude comme un synergiste clé de voûte, constitutif de l'effet protecteur du consortium Mix7. ) , du consortium, tout l'effet thérapeutique a disparu. Pourtant, administrée seule, cette bactérie était inerte contre l'ERV. Des tests in vitro ont confirmé qu'aucune des souches Mix7, seule ou combinée, n'inhibait directement la croissance des ERV. Cela indique l'existence d'un mécanisme de coopération : M. intestinale n'est pas un « tueur direct », mais un synergiste clé de voûte nécessaire pour permettre aux six autres souches de restaurer efficacement la (sidenote: Barrière écologique Effet protecteur exercé par un microbiote intestinal sain et diversifié, qui empêche la colonisation par des agents pathogènes envahissants. Cette défense est assurée par des mécanismes tels que la compétition pour les nutriments et la production de composés antimicrobiens. ) . Il ne s'agit pas d'une action directe, mais d'une technique écologique.
Rétablissement fonctionnel
Cette restauration écologique a eu de profondes conséquences fonctionnelles. L'étude a montré que Mix7 était efficace même dans un état de dysbiose plus persistant, mais pas chez tous les sujets, avec un taux de réponse de 30 % à 70 % selon les essais. Chez les souris « répondeuses », l'élimination des ERV a été associée à un rétablissement fonctionnel complet de l'intestin, marqué par des concentrations cæcales plus élevées d'acides gras à chaîne courte, comme l'acétate, le propionate et le butyrate, ainsi que par une normalisation des profils des acides biliaires et des acides aminés.
Cette variabilité suggère une puissante application clinique : la composition initiale du microbiote d'un patient pourrait servir de biomarqueur prédictif, permettant de stratifier les patients les plus susceptibles de bénéficier de cette intervention.
Vers une application clinique
Le chemin entre le banc d'essai et le patient semble prometteur. Pour mieux comprendre, cinq des sept espèces bactériennes de Mix7 sont communes à la souris et aux êtres humains ; les deux autres possèdent des équivalents fonctionnels directs avec les êtres humains. Ces travaux fournissent un schéma clair pour le développement de produits biothérapeutiques ciblés, qui non seulement éliminent un agent pathogène spécifique, mais restaurent également les défenses endogènes de l'hôte. Ces stratégies représentent un nouveau plan crucial dans la lutte contre les bactéries résistantes aux antibiotiques, un objectif clé souligné chaque année pendant la Semaine mondiale de sensibilisation à la résistance aux antimicrobiens (WAAW).
Tout ce que vous devez savoir sur les antibiotiques et la résistance aux antimicrobiens
Depuis 2015, l'OMS organise chaque année la Semaine mondiale de sensibilisation à la résistance aux antimicrobiens (WAAW) dont l'objectif est de sensibiliser sur le phénomène mondial de la résistance aux antimicrobiens. Cette campagne, qui se tiendra du 18 au 24 novembre, encourage le grand public, les professionnels de santé et les décideurs à faire un bon usage des antimicrobiens afin d'éviter l'apparition de résistance.