Maladie cœliaque : le « sans gluten », pas si simple pour les intestins
Chez les patients atteints d’une maladie cœliaque, un an de régime sans gluten améliore certes le bien-être mais appauvri le microbiote et 1 patient sur 3 souffre encore de symptômes gastro-intestinaux. Et si on y associait prébiotiques et symbiotiques ?
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A propos de cet article
Quand on est atteint de (sidenote: Maladie cœliaque trouble auto-immun qui affecte principalement l’intestin grêle et qui est déclenché par l’ingestion de gluten chez des personnes génétiquement prédisposées. ) , le traitement est sans appel : (sidenote: Gluten (du latin glue qui signifie colle) : substance azotée visqueuse qui se forme après hydratation de la farine, à partir de certaines protéines (gluténines et gliadines) des céréales, principalement du blé. ) Mais que se passe-t-il vraiment dans les intestins des patients, après un an d’un tel régime? Quels impacts sur le microbiote intestinal? Les symptômes sont-ils toujours présents ? Une récente étude britannique s’est penchée sur cette question. 1
1% La prévalence de la maladie cœliaque dans la population générale varie de 0,5 % à 2 %, avec une moyenne d’environ 1 %. ²
2 ou 3 Comme pour les autres maladies auto-immunes, la maladie coeliaque est plus fréquente chez les femmes, qui sont 2 à 3 fois plus touchées que les hommes. ³
Avant le sans-gluten, les patients et les intestins souffrent
Avant de commencer leur régime sans gluten, les personnes souffrant de la maladie cœliaque présentent déjà des différences notables : moral en berne, symptômes digestifs, selles moins hydratées alors que la teneur en eau dans l’intestin grêle est au contraire excessive, et surtout, un transit intestinal beaucoup plus lent. En cause ? Les lésions dans la paroi de l’intestin, qui modifient l’absorption et la sécrétion d’eau, mais sans doute aussi une inflammation chronique et un déséquilibre de certaines hormones digestives.
Troubles digestifs
Un an sans gluten : mieux, mais pas parfait
Bonne nouvelle ! Après un an de régime sans gluten, les patients se sentent globalement mieux, sont moins anxieux et leur transit s’est un peu accéléré. Mais ce n’est pas non plus la panacée : leur bien-être reste inférieur à celui de personnes ne souffrant pas de maladie cœliaque et certains des patients présentent toujours des symptômes liés à cette maladie.
Reste que ce régime pèse sur le microbiote, c’est-à-dire l’ensemble des bactéries qui peuplent nos intestins. L’éviction du blé – et de tous ses produits dérivés, du pain aux biscuits en passant par les pâtes – supprime certes le gluten mais aussi les fibres issues de cette céréale, et avec elles, les bénéfiques bifidobactéries qui étaient friandes de ces fibres. A l’inverse, le régime semble booster des bactéries liées à la dégradation des protéines dont on se serait bien passé, comme E. coli ou Peptostreptococcus.
Gluten
En Europe, la consommation moyenne de gluten est comprise entre 10 g et 20 g par jour, certaines personnes de la population générale en consommant jusqu’à 50 g /j, voire plus. 4
Les « céréales contenant du gluten » (blé, seigle, orge, avoine, épeautre, kamut ou leurs souches hybridées) et produits à base de ces céréales font partie de la liste des 14 allergènes considérés comme majeurs au sens de la réglementation européenne pour l’étiquetage des aliments. 5
30 % des patients atteints de maladie coeliaque ont présenté des symptômes persistants ou aggravés après un an d’un régime sans gluten. 1
Maladie cœliaque, allergie au blé, hypersensibilité au gluten : ne pas confondre ! 6,7
Le gluten n’est pas « toxique » pour l’Homme : il est bien toléré par la majorité des consommateurs. Il est cependant impliqué dans deux maladies très différentes :
- La maladie cœliaque, une maladie auto-immune (l’organisme s’auto-attaque) qui se produit plusieurs semaines ou années après l’exposition au gluten et se manifeste par des lésions de la paroi de l’intestin grêle. Son diagnostic est confirmé par la présence d’auto-anticorps dans le sang ;
- L’allergie au blé, qui se produit dans les minutes ou heures suivant le contact avec le gluten ou d’autres protéines du blé. Elle déclenche une réponse immunologique de l’organisme et la libération d’histamine. Sa prévalence varie selon les études de 0,5 à 9 % chez l’enfant et de 0,4 à 1 % chez l’adulte.
hypersensibilité au gluten
Outre l’allergie au blé et la maladie cœliaque, il existe des cas de réaction au gluten qui ne sont ni des allergies ni des maladies cœliaques au regard des mécanismes en jeu, et se produisent dans les heures ou jours suivant l’exposition.
Ces réactions sont actuellement dénommées « sensibilité au gluten non cœliaque » ou « sensibilité au gluten » ou encore en France « hypersensibilité au gluten » ou « intolérance au gluten ». Son existence reste sujet de débats et controverses, en raison notamment de l’absence de biomarqueurs diagnostiques pour l’objectiver.
En l’absence de diagnostic de ces maladies et de recommandation médicale, l’éviction du gluten n’est pas recommandée.
Et si le régime ne suffisait pas ?
Autre découverte importante : 1 patient sur 3 rapporte des symptômes gastro-intestinaux persistants voire aggravés, malgré l’éviction du gluten. Certains acides gras spécifiques et la présence de certaines bactéries dans le microbiote intestinal pourraient expliquer cette persistance des symptômes.
Si l’éviction stricte du gluten est impérative en cas de maladie cœliaque, cette étude montre qu’elle ne suffit pas toujours. L’idée serait donc, à l’avenir, d’y associer des (sidenote: Prébiotiques Les prébiotiques sont des fibres alimentaires spécifiques non digestibles qui ont des effets favorables sur la santé. Ils sont utilisés de manière sélective par les micro-organismes bénéfiques du microbiote de l’individus. Les produits spécifiques associant des probiotiques et des prébiotiques sont appelés symbiotiques. Gibson GR, Hutkins R, Sanders ME, et al. Expert consensus document: The International Scientific Association for Probiotics and Prebiotics (ISAPP) consensus statement on the definition and scope of prebiotics. Nat Rev Gastroenterol Hepatol. 2017;14(8):491-502. Markowiak P, Śliżewska K. Effects of Probiotics, Prebiotics, and Synbiotics on Human Health. Nutrients. 2017;9(9):1021. ) (des fibres qui nourrissent les bonnes bactéries) ou des symbiotiques (un mélange de pré- et probiotiques) spécifiques pour soutenir un microbiote plus sain… et un meilleur confort digestif, même chez les patients dont les taux d’anticorps sont redevenus normaux, signe d’une bonne réponse immunologique au régime.
Quelle est la différence entre les prébiotiques, les probiotiques et les postbiotiques ?
2. Catassi C, Verdu EF, Bai JC, Lionetti E. Coeliac disease. Lancet. 2022 Jun 25;399(10344):2413-2426.
3. Malamut G, Cellier C. Place et bilan de la maladie coeliaque. Hepatogastroenterology, 2012;19:597-606.
5. EU Regulation No. 1169/2011 on the provision of food information to consumers (“INCO” Regulation).