Microbiote et maladies métaboliques

Synthèse

Par le Pr. Yolanda Sanz
Unité de recherche en Écologie microbienne, Nutrition et Santé ; Institut d’agrochimie et de technologie alimentaire ; Conseil supérieur de recherches scientifiques (IATA-CSIC), Valence, Espagne

Human digestive system microbiota, 3D illustration.

En raison de sa forte prévalence et de son rôle dans le développement de multiples maladies non transmissibles (syndrome métabolique [SMet] et diabète de type 2 [DT2]), l’obésité est l’un des plus grands défis de santé publique du XXIe siècle. Les données prouvant le rôle des altérations du microbiote intestinal, en partie dues à une alimentation déséquilibrée, dans les mécanismes faisant le lien entre l’obésité, l’inflammation et les troubles métaboliques, offrent de nouvelles perspectives : elles permettent de mieux comprendre l’étiologie de la maladie et mettre au point des stratégies de prise en charge. Les pistes explorées portent notamment sur la transplantation de microbiote fécal (TMF), les aliments destinés à nourrir nos micro-organismes bénéfiques (prébiotiques) et nos bactéries indigènes (probiotiques) pour restaurer nos intestins avec les micro-organismes bénéfiques manquants. Les éléments dont on dispose sont prometteurs mais il faut encore identifier les bactéries intestinales qui aideront à prévenir l’obésité, et personnaliser les régimes alimentaires afin d’optimiser les fonctions métaboliques de nos micro-organismes intestinaux.

Obésité, syndrôme métabolique et diabète

L’obésité est une épidémie mondiale qu’aucun pays n’a su endiguer à ce jour. Depuis les années 1980, la prévalence globale de l’obésité a triplé aux États-Unis et dans de nombreux pays européens, faisant de cette maladie l’un des plus grands défis de santé publique du XXIe siècle. En effet, l’obésité est associée à des taux élevés de comorbidités, qui constituent un facteur de risque majeur de multiples maladies non transmissibles. L’insulino-résistance induite par l’obésité est considérée comme un facteur clé du SMet, entraînant souvent une défaillance des cellules β pancréatiques et conduisant au DT2 [1].

Inflammation métabolique : de l'obésité aux comorbidités chroniques

On sait aujourd’hui que l’état inflammatoire chronique associé à l’obésité affecte les tissus adipeux mais également d’autres organes notamment le cerveau, les muscles, le foie, le pancréas et l’intestin [1, 2]. L’implication du système immunitaire intestinal et les micro-organismes qui se développent en cas d’alimentation déséquilibrée sont notamment apparus récemment comme des facteurs supplémentaires de l’inflammation métabolique associée à l’obésité, et pourraient également représenter des cibles thérapeutiques [2, 3].

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En quoi le microbiote intestinal est-il impliqué?

L’implication du microbiote intestinal dans l’obésité a été en partie déduite d’études observationnelles faisant état de dysbiose chez des sujets obèses comparativement à des sujets minces dans des évaluations transversales. Les preuves de modulations du microbiote intestinal lors d’interventions diététiques, médicamenteuses ou chirurgicales dans le but de perdre du poids et d’améliorer les complications métaboliques ont permis d’établir des relations similaires où l’obésité était associée à une réduction de la diversité des espèces et une augmentation des taxa bactériens comme Proteobacteria et Bilophila wadsworthia. En revanche, les phénotypes métaboliques sains étaient souvent associés à des augmentations du phylum Bacteroidetes ou du ratio Firmicutes/Bacteroidetes ou des genres Bacteroides, Prevotella, Akkermansia, Faecalibacterium ou Christensenella [4, 5]. Les résultats obtenus étaient cependant parfois contradictoires, en partie à cause de l’hétérogénéité des études et de leurs limites méthodologiques. D’autres méta-analyses ont montré que le seul biomarqueur qui pouvait être généralisé concernant l’obésité était la réduction de la diversité des espèces bactériennes [6]. Par ailleurs, les sujets obèses n’ont probablement pas tous le même profil dysbiotique, notamment en raison de la grande variabilité du microbiote et de la complexité des phénotypes métaboliques (obésité avec et sans autres complications). Plus récemment, les altérations du microbiote intestinal qui précèdent le développement de l’obésité ont été identifiées comme un des facteurs étiologiques. Une récente étude longitudinale a notamment montré qu’une réduction de la diversité des espèces bactériennes, liée à de mauvaises habitudes alimentaires, produit les conditions favorables à une prolifération de Proteobacteria (entérobactéries), qui précède l’apparition du surpoids chez des enfants suivis pendant 4 ans [7].

Une preuve encore plus concluante du rôle causal du microbiote dans la définition du phénotype métabolique du sujet a été obtenue grâce à la TMF, via laquelle le microbiote dysbiotique de sujets malades a été transféré à de nouveaux animaux receveurs. La plupart de ces expériences ont montré que la TMF était suffisante pour reproduire le phénotype métabolique du donneur (mince ou obèse) [8].

Le biomarqueur microbiotique le plus fréquemment associé à l'obésité est la réduction de la diversité d'espèces bactériennes, qui pourrait également prédisposer au développement de l'obésité, de l'inflammation chronique et des complications métaboliques.

Mécanismes d'action médiés par le microbiote

Les micro-organismes intestinaux influencent le métabolisme énergétique en stimulant notre capacité à métaboliser les nutriments et à extraire les calories de l’alimentation mais également en régulant l’absorption des sucres et des lipides ainsi que leur dépôt dans les tissus périphériques [8]. Les micro-organismes intestinaux et leurs produits métaboliques sont également impliqués dans la régulation du système entéro-endocrinien via, par exemple, la production d’acides gras à chaîne courte induisant la synthèse d’hormones intestinales (entre autres GLP-1, PYY) qui agissent par des voies endocriniennes et neuronales et qui régulent l’appétit, la prise alimentaire et le métabolisme du glucose [9]. Le microbiote intestinal est aussi un régulateur majeur de la barrière intestinale et du système immunitaire, dont les altérations sont impliquées dans l’inflammation de bas grade et l’insulino-résistance associées à l’obésité (Figure 1) [2, 3].

Il est probable qu'un modèle unique de dysbiose intestinale pour l'obésité ne puisse pas être identifié, celui-ci pouvant dépendre des complications métaboliques sous-jacentes et d'autres caractéristiques biologiques et environnementales du sujet.

Altérations de la fonction barrière de la muqueuse dans l'obésité

Une alimentation déséquilibrée provoque des altérations de la muqueuse intestinale qui affectent sa pénétrabilité et favorisent la translocation de composants bactériens comme le lipopolysaccharide (LPS) et le peptidoglycane, voire de micro-organismes entiers, qui peuvent activer l’immunité innée dans des organes métaboliquement actifs. Ces défauts dans la fonction barrière ont été attribués à une inflammation locale causée par une alimentation riche en graisses saturées et la dysbiose résultante, ainsi qu’à des perturbations au niveau de la couche de mucus [10] et de la production de peptides antimicrobiens par les cellules de Paneth (Reg3γ, lysozyme 1) [11]. On a par exemple démontré que des taux plasmatiques accrus de LPS (« endotoxémie métabolique ») provoquaient une obésité et des troubles métaboliques dans des modèles animaux et qu’ils étaient associés à une élévation de l’indice de masse corporelle, à une alimentation riche en graisses, à une inflammation postprandiale et à un risque de DT2 chez l’homme. Ce phénomène pourrait être favorisé par la prolifération de bactéries à Gram négatif comme les entérobactéries, qui sont une source de LPS en cas d’alimentation riche en graisses. Les LPS pourraient activer l’immunité innée dans l’intestin et au-delà induire le recrutement de cellules immunitaires inflammatoires dans les tissus métaboliques, comme les macrophages. Une alimentation riche en graisses saturées pourrait également favoriser la croissance d’autres bactéries à Gram négatif comme Bilophila wadsworthia, qui génèrent le sulfure d’hydrogène, un métabolite toxique pour les entérocytes qui conduit à une hyperperméabilité intestinale, à une inflammation et à des troubles métaboliques [12]. Enfin, une alimentation riche en graisses pourrait également augmenter les taux circulants de peptidoglycanes, probablement par le biais des modifications induites par l’alimentation au niveau de l’expression du peptide antimicrobien lysozyme 1, qui hydrolyse les composants des parois cellulaires bactériennes. En fonction du type de peptidoglycanes, ceux-ci pourraient agir comme des ligands de Nod1 au niveau des macrophages pro-inflammatoires du tissu adipeux ou du foie et provoquer une résistance à l’insuline, alors que des effets opposés semblent se produire dans les cellules bêta-pancréatiques, possiblement selon un mécanisme de compensation [13].

 

Dérèglement des cellules immunocompétentes intestinales dans l'obésité

Comme dans d’autres organes métaboliques, notamment le tissu adipeux et le foie, une dégradation de l’homéostasie immunitaire a été observée au niveau intestinal dans l’obésité. Lorsque l’obésité est induite par l’alimentation, divers sousgroupes de cellules de l’immunité innée et adaptative au sein de l’intestin adoptent un phénotype pro-inflammatoire, principalement démontré par une augmentation des macrophages et cytokines pro-inflammatoires (IFNγ).

En parallèle, on observe une réduction des proportions de lymphocytes Treg et d’ILC de type 3 productrices d’IL-22, qui aident à maintenir l’intégrité de la muqueuse et l’homéostasie intestinale chez les sujets minces [2, 3]. Certaines de ces altérations sont inversées par une déplétion du microbiote (par exemple par une antibiothérapie) ou par l’administration de bifidobactéries spécifiques qui restaurent également la dysbiose intestinale induite par l’alimentation dans l’obésité, ce qui confirme le rôle causal du microbiote intestinal dans l’inflammation métabolique [3]. De plus, les cellules immunitaires intestinales IgA+ agissent comme des médiateurs de la muqueuse pour la régulation glycémique systémique dans l’obésité induite par l’alimentation riche en graisses.

Ce type de régime réduit le nombre de cellules immunitaires IgA+ et d’IgA sécrétoires. La réduction des IgA pourrait venir renforcer les effets de l’alimentation riche en graisses et ajouter un niveau supplémentaire de déstabilisation de la communauté bactérienne par l’augmentation de la perméabilité intestinale et l’inflammation du tissu adipeux [14].

 

Comment la modulation du microbiote pourrait-elle impacter l'évolution de la maladie ?

FMT

Un essai clinique a montré que la sensibilité à l’insuline pouvait être améliorée chez des patients atteints de SMet 6 semaines après une transplantation de microbiote fécal provenant d’un donneur sain mince [5]. Une augmentation de la diversité microbienne et de l’abondance des bactéries productrices de butyrate a également été observée. Un autre essai conduit chez des sujets présentant des signes de SMet et recevant le microbiote de patients répondant à la chirurgie bariatrique a rapporté des modifications au niveau de l’expression des récepteurs dopaminergiques qui pourraient expliquer un meilleur contrôle de la prise alimentaire, mais cette étude n’a pas confirmé les effets sur la résistance à l’insuline*. De nombreux autres essais visant à évaluer les effets de la TMF sur l’obésité sont en cours, mais les résultats n’ont pas encore été publiés [5]. Les preuves scientifiques justifiant le recours à cette stratégie de lutte contre les complications de l’obésité sont donc toujours très limitées.

Une dysbiose intestinale entretenue par une alimentation déséquilibrée contribue au dérèglement du système immunitaire intestinal, qui constitue un facteur supplémentaire de l'inflammation métabolique associée à l'obésité et représente également une cible thérapeutique.

Fibres alimentaires

De nombreuses données chez l’homme montrent que la consommation d’aliments avec une teneur en fibres supérieure aux recommandations en vigueur (25 g/jour pour les adultes) améliore le maintien du poids et réduit le risque de coronaropathie et de DT2. Certains des effets de ces fibres sont dus à leurs propriétés physico-chimiques (par exemple non digestibilité, viscosité, etc.) qui contribuent à réduire les réponses glycémiques et l’apport énergétique et à améliorer le profil lipidique sanguin. D’autres effets pourraient être médiés par leur impact sur le microbiote intestinal, qui fermente les fibres et génère des métabolites tels que les AGCC (butyrate, propionate, etc.), actifs dans le métabolisme de l’hôte. Les AGCC induisent la production de peptides entéro-endocrines (GLP-1, GLP-2, PYY) qui renforcent la barrière intestinale, induisent la satiété, améliorent le métabolisme du glucose et exercent des effets anti-inflammatoires dans l’obésité. La consommation de fibres augmente également la diversité du microbiote intestinal, qui est associée à un phénotype métabolique sain. En outre, les effets bénéfiques des fibres ne dépendent pas seulement du type et de la quantité de fibres, mais également de la structure du microbiote de la personne, de sa diversité et de la présence ou de l’absence d’espèces bactériennes spécifiques impliquées dans leur utilisation [15]. Tout cela montre la nécessité de tendre vers des recommandations diététiques plus personnalisées [15].

Bactéries bénéfiques

Les première et deuxième générations de probiotiques. La plupart des essais cliniques d’efficacité ont été conduits avec des souches bactériennes traditionnellement utilisées comme probiotiques chez l’homme, « la première génération de probiotiques », qui comprend essentiellement des Lactobacillus et des Bifidobacterium. Le Tableau 1 en donne quelques exemples, mais on peut en trouver bien d’autres dans la littérature, associés à des résultats positifs et négatifs. On a également tenté d’isoler, dans le microbiote indigène humain, de nouvelles espèces bactériennes systématiquement associées à un phénotype métabolique sain dans le but de créer une deuxième génération de probiotiques. Ceux-ci pourraient nous aider à apporter à notre microbiote intestinal les micro-organismes manquants. Le Tableau 2 reprend quelques-unes des études conduites chez des modèles animaux et la seule conduite chez l’homme à ce jour.

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Conclusion

Des données scientifiques confirment le rôle des altérations du microbiote intestinal, en partie dues à une alimentation déséquilibrée, dans l’obésité et les troubles métaboliques. L’inflammation intestinale apparaît comme un facteur de l’inflammation systémique dans l’obésité. Ce processus est modulé par le microbiote intestinal et l’alimentation, qui constituent ensemble à la fois une cause et une cible thérapeutique. Des essais expérimentaux ont fourni la preuve du concept selon lequel un « microbiote sain », des bactéries intestinales spécifiques ou des fibres alimentaires qui potentialisent leurs fonctions pourraient jouer un rôle dans la prise en charge de l’obésité. Pour pouvoir espérer développer des solutions concrètes dans la lutte contre l’obésité, il reste encore à identifier les bactéries intestinales impliquées et personnaliser les régimes alimentaires afin d’optimiser les fonctions du microbiote intestinal au bénéfice de notre santé métabolique.

References

1 Johnson AM, Olefsky JM. The origins and drivers of insulin resistance. Cell 2013 ; 152 : 673-84.

2 Winer DA, Luck H, Tsai S, et al. The intestinal immune system in obesity and insulin resistance. Cell Metab 2016 ; 23 : 413-26.

3 Sanz Y, Moya-Pérez A. Microbiota, inflammation and obesity. Adv Exp Med Biol 2014 ; 817 : 291-317.

4 Goodrich JK, Waters JL, Poole AC, et al. Human genetics shape the gut microbiome. Cell 2014 ; 159 : 789-99.

5 Romaní-Pérez M, Agusti A, Sanz Y. Innovation in microbiome-based strategies for promoting metabolic health. Curr Opin Clin Nutr Metab Care 2017 ; 20 : 484-491.

6 Sze MA, Schloss PD. Looking for a Signal in the Noise: Revisiting Obesity and the Microbiome. MBio 2016 ; 7: e01018-16.

7 Rampelli S, Guenther K, Turroni S, et al. Pre-obese children’s dysbiotic gut microbiome and unhealthy diets may predict the development of obesity. Commun Biol 2018 ; 1 : 222.

8 Sonnenburg JL, Bäckhed F. Diet-microbiota interactions as moderators of human metabolism. Nature 2016 ; 535 : 56-64.1.

9 Mulders RJ, de Git KCG, Schéle E, et al.. Microbiota in obesity: interactions with enteroendocrine, immune and central nervous systems. Obes Rev 2018 ; 19 : 435-51.

10 Schroeder BO, Birchenough GMH, Ståhlman M, et al. Bifidobacteria or fiber protects against diet-induced microbiota-mediated colonic mucus deterioration. Cell Host Microbe 2018 ; 23 : 27-40.e7.

11 Everard A, Geurts L, Caesar R, et al. Intestinal epithelial MyD88 is a sensor switching host metabolism towards obesity according to nutritional status. Nat Commun 2014 ; 5 : 5648.

12 David LA, Maurice CF, Carmody RN, et al. Diet rapidly and reproducibly alters the human gut microbiome. Nature 2014 ; 505 : 559-63.

13 Stojanović O, Trajkovski M. Microbiota guides insulin trafficking in beta cells. Cell Res 2019 ; 29 : 603-4.

14 Luck H, Khan S, Kim JH, et al. Gut-associated IgA(+) immune cells regulate obesity-related insulin resistance. Nat Commun 2019 ; 10 : 3650.

15 Sanz Y, Romaní-Perez M, Benítez-Páez A, et al. Towards microbiome-informed dietary recommendations for promoting metabolic and mental health: Opinion papers of the MyNewGut project. Clin Nutr 2018 ; 37(6 Pt A) : 2191-7.

16 Kadooka Y, Sato M, Imaizumi K, et al. Regulation of abdominal adiposity by probiotics (Lactobacillus gasseri SBT2055) in adults with obese tendencies in a randomized controlled trial. Eur J Clin Nutr 2010 ; 64 : 636-43.

17 Stenman LK, Lehtinen MJ, Meland N, et al. Probiotic with or without fiber controls body fat mass, associated with serum zonulin, in overweight and obese adults-randomized controlled Trial. EBioMedicine 2016 ; 13 : 190-200.

18 Sanchis- Chordà J, Del Pulgar EMG, Carrasco-Luna J, et alBifidobacterium pseudocatenulatum CECT 7765 supplementation improves inflammatory status in insulin-resistant obese children. Eur J Nutr. 2019 Oct;58(7):2789-2800. 

19 Liu R, Hong J, Xu X, et al. Gut microbiome and serum metabolome alterations in obesity and after weight-loss intervention. Nat Med 2017 ; 23 : 859-68.

20 Depommier C, Everard A, Druart C, et al. Supplementation with Akkermansia muciniphila in overweight and obese human volunteers: a proof-of-concept exploratory study. Nat Med 2019 ; 25 : 1096-103.

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Article

Modulation du microbiote intestinal dans les troubles du métabolisme et l’hépatite alcoolique

Revue de presse

Par le Pr. Markku Voutilainen
Faculté de médecine de l’Université de Turku ; gastro-entérologie, Hôpital universitaire de Turku, Finlande

Alcoholic hepatitis. Light micrograph of a section through a liver affected by hepatitis (inflammation of the liver) caused by excessive alcohol intake.

Liu Y, Wang Y, Ni Y, et al. Gut microbiome fermentation determines the efficacy of exercise for diabetes prevention. Cell Metabolism. 2020 Jan 7;31(1):77-91.e5. 

L’impact de l’exercice physique sur le microbiote intestinal a été évalué chez des hommes prédiabétiques. Les répondeurs à l’exercice physique ont vu leur taux d’insuline à jeun et leur résistance à l’insuline (HOMA-IR) diminuer, alors que chez les non-répondants, ce taux est resté inchangé ou s’est même détérioré. L’exercice physique a entraîné une augmentation de l’abondance de Firmicutes, Bacteroides et Proteobacteria. Les altérations du microbiote intestinal étaient corrélées à la réduction de l’indice HOMA-IR. La synthèse de l’ADN, le métabolisme des acides aminés (AA) et la synthèse des acides gras à chaîne courte (AGCC) ont été améliorés chez les répondeurs. Chez les non-répondeurs, la fermentation des AA a abouti à la production de gaz coliques et de composés nocifs, associés à une augmentation de la résistance à l’insuline. Une augmentation des taux sériques d’acides gras à chaîne courte, mais une diminution des acides aminés à chaîne ramifiée (AACR) et des acides aminés aromatiques n’étaient présentes que chez les répondeurs. Les AGCC jouent un rôle bénéfique dans le métabolisme énergétique et celui du glucose, alors qu’une quantité accrue d’AACR est associée à une résistance à l’insuline.

En conclusion, le microbiote intestinal des répondeurs à l’exercice physique est associé à une plus grande capacité de production d’acides gras à chaîne courte, mais également à une dégradation accrue des AACR, alors que le microbiote des non-répondeurs produit des composés nocifs du point de vue métabolique.

Duan Y, Llorente C, Lang S, et al. Bacteriophage targeting of gut bacterium attenuates alcoholic liver disease. Nature. 2019 Nov;575(7783):505-511.

Les patients atteints d’hépatite alcoolique (HA) présentent une concentration fécale plus importante d’Enterococcus faecalis (EF), 80 % des patients étant positifs. Des souris axéniques soumises à un régime à base d’éthanol ont été colonisées avec des selles de patients atteints d’HA contenant des bactéries EF produisant de la cytolysine (CL +). Les souris infectées avec des selles CL + ont développé des lésions hépatiques induites par l’éthanol plus sévères. Celles présentant une prolifération d’entérocoques intestinaux et soumises à un régime à base d’éthanol ont reçu des bactériophages détruisant les EF CL +. Leur atteinte hépatique était moins sévère. La phagothérapie pourrait donc atténuer l’atteinte hépatique liée à l’éthanol provoquée par les EF CL + et améliorer le pronostic de l’HA sévère.

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Revue de presse

Microbiote cutané : quel rôle dans l’eczéma atopique et l’acné ?

Revue de presse

Par le Pr. Markku Voutilainen
Faculté de médecine de l’Université de Turku ; gastro-entérologie, Hôpital universitaire de Turku, Finlande

Atopic dermatitis on the upper body of an 83 year old male patient. Atopic dermatitis, also called atopic eczema, is an inflammatory skin reaction that occurs without any obvious external cause.

Fyhrqvist N, Muihead G, Prat-Nielsen S, et al. Microbe-host interplay in atopic dermatitis and psoriasis. Nat Commun. 2019 Oct 16;10(1):4703. 

Les auteurs ont comparé le microbiote de patients souffrant d’eczéma atopique (EA) ou de psoriasis à celui de volontaires sains. Ils ont détecté respectivement 26 et 24 micro-organismes typiques de l’EA et du psoriasis. Les taxa les plus discriminants pour l’EA appartenaient au genre Staphylococcus, et les micro-organismes les plus discriminants pour le psoriasis étaient Corynebacterium simulansNeisseriaceae spp., C. kroppenstedtiiLactobacillus spp. et L. iners.

L’EA se caractérise par une abondance de S. aureus. Dans le psoriasis, de nombreuses bactéries différentes peuvent être impliquées, notamment Corynebacterium. La disparition de Lactobacillus est typique des deux maladies. Dans l’EA, on retrouve typiquement une perte de bactéries anaérobies strictes avec une diminution de la production d’acide lactique et d’acides gras à chaîne courte, ce qui entraîne une augmentation du pH de la peau. Les interactions microbiote-hôte sont importantes tant pour l’homéostasie de la peau que pour la pathogenèse de la maladie.

Claudel JP, Affret N, Leccia MT, et alStaphylococcus epidermidis: a potential new player in the physiopathology of acne? Dermatology; 2019;235(4):287-294. 

Les interactions entre la peau et le microbiote cutané sont essentielles pour différencier les bactéries commensales des micro-organismes pathogènes. Pendant la puberté, une surcolonisation des unités pilo-sébacées (UPS) de la peau par Cutibacterium acnes (CUA) peut causer de l’acné. Certaines souches de S. epidermidis modulent les réactions immunitaires innées de l’hôte, et certains isolats exercent une activité antimicrobienne contre CUA. Réciproquement, certaines souches de CUA exercent une activité antimicrobienne contre S. epidermidis, qui peut également contrôler la prolifération de CUA par l’intermédiaire de l’acide succinique. L’utilisation d’antibiotiques topiques peut être à l’origine du développement de souches antibiorésistantes de CUA et de S. epidermidis. N’éliminer que CUA peut conduire à la prolifération de S. aureus et S. epidermidis, ce qui peut augmenter le risque d’infections. Lactobacillus pourrait être efficace dans l’acné et d’autres maladies dermatologiques inflammatoires. Les auteurs suggèrent qu’une supplémentation orale ou topique régulière du microbiote cutané pourrait constituer une option thérapeutique dans l’acné.

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Implication du microbiote vaginal dans la vaginose bactérienne et la candidose vaginale

Revue de presse

Par le Pr. Markku Voutilainen
Faculté de médecine de l’Université de Turku ; gastro-entérologie, Hôpital universitaire de Turku, Finlande

Gardnerella vaginalis bacteria. Coloured transmission electron micrograph (TEM) of Gardnerella vaginalis bacteria.

Rosca AS, Castro J, Sousa LGV, et alGardnerella and vaginal health: the truth is out there. FEMS Microbiol Rev. 2020 Jan 1;44(1):73-105. 

Le microbiote vaginal se divise en cinq grands sous-types (community state types 5 [CST], types d’états communautaires), dont quatre sont composés d’espèces de Lactobacillus. Le système immunitaire inné, les cellules épithéliales, les récepteurs de type Toll et les peptides antimicrobiens naturels sont d’autres composants du système de défense contre les agents pathogènes. Le genre Lactobacillus joue un rôle central dans les mécanismes de défense vaginaux par la production d’acide lactique et de bactériocines ainsi que dans la prévention de l’adhésion des bactéries pathogènes. La vaginose bactérienne (VB) se caractérise par une prolifération de micro-organismes pathogènes et la constitution d’un biofilm polymicrobien qui adhère à l’épithélium vaginal. Les bactéries Gardnerella constituent l’espèce prédominante de ce biofilm et sont les plus virulentes. Le traitement de la VB inclut métronidazole, clindamycine ou tinidazole. De nombreux isolats de Gardnerella et d’autres agents pathogènes sont résistants au métronidazole.

Un traitement adjuvant, notamment par probiotiques du genre Lactobacillus, pourrait renforcer l’effet thérapeutique du métronidazole. Des études visant à comprendre les interactions polymicrobiennes entre les agents pathogènes vaginaux pourraient permettre de développer des traitements basés sur l’écologie vaginale.

Tortelli BA, Lewis WG, Allsworth JE, et al. Associations between the vaginal microbiome and Candida colonization in women of reproductive age. Am J Obstet Gynecol; 2020 May;222(5):471.e1-471.e9. 

Candida albicans (CA) est présent dans le microbiote vaginal d’environ 30 % des femmes. Sur 255 femmes en âge de procréer non enceintes, 42 (16 %) étaient colonisées par CA. Les microbiotes vaginaux les plus courants ont été classés ainsi : prédominance de Lactobacillus crispatus (20 %), prédominance de L. iners (39 %) et divers (38 %). CA a été plus fréquemment retrouvé chez les femmes noires et dans les communautés dominées par L. iners que chez les femmes blanches et dans les communautés avec une prédominance de L. crispatus. In vitro, L. crispatus a produit davantage d’acide lactique et a inhibé plus significativement la croissance pH-dépendante de CA. La principale conclusion de ce travail est que les espèces du genre Lactobacillus ont des interactions différentes avec CA, et que L. crispatus pourrait prévenir la colonisation de CA plus efficacement que L. iners grâce à une production d’acide lactique plus importante.

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Revue de presse

L’importance croissante du microbiote intestinal dans la santé digestive

Retour de congrès

Par le Pr. Gourdas Choudhuri
Hôpital Fortis, Haryana, Inde

Le Congrès Asie-Pacifique de Gastroentérologie APDW (Asian Pacific Digestive Week) qui s’est tenu en Inde (Kolkata) du 12 au 15 décembre et a attiré plus de 5 000 personnes, portait en particulier sur le lien entre microbiote intestinal et santé digestive. Deux grands symposia consacrés à ce sujet ont mobilisé les participants.

Le microbiote intestinal dans la santé et la maladie

Le Dr Gerald Holtmann (Australie) a ouvert le premier symposium en soulignant que le grand nombre de bactéries commensales normalement présentes dans l’intestin humain dépasse largement celui des cellules de l’ensemble du corps humain ; il a attiré l’attention sur le rôle majeur joué par les micro-organismes dans le maintien de la santé.

Les micro-organismes intestinaux appartiennent à trois groupes taxonomiques : les bactéries, les archées et les eucaryotes. Bien que la plupart de ces micro- organismes soient difficiles à mettre en culture, ils remplissent des fonctions essentielles : digestion des aliments (en particulier des fibres), production et absorption des vitamines, absorption des nutriments, protection de la muqueuse contre la colonisation par des agents pathogènes, régulation du système immunitaire de l’hôte et contrôle du péristaltisme intestinal.

Le Dr Holtmann a indiqué que, bien que le microbiote provenant des selles (microorganismes luminaux) ait jusqu’à présent fait l’objet de la plupart des recherches, les scientifiques reconnaissent désormais la présence d’un « microbiote associé à la muqueuse », plus difficile à extraire, à caractériser et à mettre en culture, mais qui semble pourtant jouer un rôle bien plus important dans la régulation de notre santé intestinale et de notre système immunitaire.

De plus en plus d’éléments montrent que la pullulation bactérienne de l’intestin grêle (PBIG) et la dysbiose sont associées à plusieurs pathologies. Il a par exemple été démontré qu’un traitement antimicrobien luminal améliorait la fonction hépatique chez des patients souffrant d’une hépatopathie chronique et d’une cholangite sclérosante primitive ainsi que la réponse clinique observée chez les patients atteints d’un syndrome de l’intestin irritable (SII) ou d’une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI).

Il a rappelé les liens forts qui ont été établis entre le microbiote intestinal et différentes pathologies (gastro-intestinales ou non), et a montré des éléments de plus en plus probants sur la façon dont les interventions ciblant le microbiote intestinal pourraient guérir ou contrôler des pathologies actuellement incurables.

Comment étudier le microbiote intestinal ?

La compréhension du microbiote intestinal progresse, et les outils permettant de l’étudier sont de plus en plus nombreux. Le Dr Ayesha Shah, de l’Université du Queensland, a expliqué que les outils traditionnels tels que l’aspiration jéjunale et les tests respiratoires devenaient obsolètes en raison de leur mise en oeuvre contraignante ou de leur manque de spécificité ; cela laisse place à de nouvelles méthodes moléculaires indépendantes de la culture, telles que la densité bactérienne (qPCR) et le profilage des communautés microbiennes par séquençage.

Le Pr Peter Gibson de Melbourne, en discutant du rôle de la modulation du microbiote intestinal par le biais du traitement, a décrit ce que pourrait être une stratégie idéale : il faut en premier lieu définir la dysbiose microbienne ou fonctionnelle chez un individu en analysant le microbiote des selles ou d’une biopsie de la muqueuse, ou encore par des tests fonctionnels des métabolites. Cela pourrait aider à déterminer ce qui doit être modifié dans le microbiote, que ce soient les communautés spécifiques ou l’abondance générale. On peut ensuite avoir recours à l’une des méthodes de l’arsenal thérapeutique pour induire la modification souhaitée : antibiotiques, probiotiques, régime alimentaire spécifique ou transplantation de microbiote fécal.

Il a notamment proposé une méthode fondée sur l’alimentation pour augmenter la diversité des bactéries intestinales. Chaque aliment, en particulier les fruits et légumes, semble stimuler la croissance d’une variété particulière de bactéries en raison du type de prébiotiques qu’il contient. Par conséquent, augmenter la variété des fruits et légumes à chaque repas pourrait constituer un moyen simple d’augmenter la diversité de notre flore intestinale. 

Les probiotiques pourraient aider à accroître l’abondance relative de bactéries spécifiques dans certains cas. Parmi les bactéries testées et qui ont prouvé leur efficacité figurent notamment les bifidobactéries, Faecalibacterium prausnitzii et certaines espèces de Lactobacillus. Par ailleurs, des antibiotiques tels que la rifaximine peuvent être utilisés pour réduire l’abondance de certaines bactéries indésirables qui dégradent les sulfates ou les protéines et qui peuvent être associées à des maladies.

Le syndrome de l’intestin irritable (SII), maladie gastro-intestinale la plus fréquemment associée à l’alimentation et à laquelle pourrait contribuer le microbiote intestinal, a fait l’objet de plusieurs essais randomisés et contrôlés avec différents probiotiques, notamment des souches de LactobacillusBifidobacteriumSaccharomyces et des préparations combinées. Malgré l’hétérogénéité du SII et les faibles chances d’obtenir des bénéfices conséquents, certains probiotiques se sont révélés efficaces dans le cadre des essais cliniques : le favori est une souche spécifique de Bifidobacterium infantis qui, administrée pendant 4 à 8 semaines, a montré un bénéfice global de plus de 20 % au niveau des douleurs, des ballonnements et de la sensation d’évacuation incomplète des selles. Un bénéfice a également été observé avec une souche spécifique de B. animalis et L. plantarum.

Antibiotiques et perturbation du microbiote

Le symposium organisé par Biocodex portant sur « Antibiotiques et perturbation du microbiote », présidé par les Drs Henry Cohen (Uruguay) et Kentaro Sugano (Japon), a rencontré un franc succès et s’est révélé très intéressant. Le Dr K.L. Goh (Malaisie) a souligné l’importance, la diversité et le rôle du microbiote intestinal et a illustré son propos par une comparaison : le génome microbien compte environ 3 300 000 gènes alors que le génome humain n’en contient que 22 000, et la différence interindividuelle au niveau du microbiote est de 80 % contre 0,01 % entre les cellules humaines !

Il a été démontré que la perturbation du microbiote intestinal par les antibiotiques était associée à différents problèmes de santé. Outre la conséquence bien connue de favoriser et de stimuler l’infection par Clostridium difficile, elle conduit souvent à un état de dysbiose, qui prédispose à son tour au développement d’une hyperperméabilité intestinale et d’une activation immunitaire.

Un autre sujet d’inquiétude majeure concerne l’acquisition et la transmission d’une résistance aux antibiotiques par transfert horizontal de gènes. La perturbation de la flore intestinale innée et l’installation d’une flore « anormale » pourraient prédisposer à l’apparition de plusieurs maladies comme l’obésité et le diabète.

Saccharomyces boulardii (Sb) s’est imposé comme le principal remède dans le traitement de la diarrhée associée aux antibiotiques (DAA). Découverte en 1920 par le microbiologiste français Henri Boulard, cette espèce a continué à montrer son utilité dans la protection de l’intestin contre les perturbations causées par les antibiotiques, en rétablissant l’équilibre du microbiote.

Conclusion

Le congrès de l’APDW a été marqué par un fort intérêt pour la compréhension du rôle du microbiote intestinal dans la santé et la maladie. Les présentations d’experts internationaux ont montré comment l’énigme du microbiote intestinal est devenue une spécialité faisant l’objet de recherches approfondies et d’interventions planifiées qui ouvrent la voie à de nouvelles opportunités thérapeutiques.

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Microbiote intestinal : facteurs d’influences et rôle dans certaines pathologies

Retour de congrès 

Par le Dr Paul Cardenas
Institut de microbiologie, Université San Francisco de Quito, Équateur

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L’édition 2019 du congrès UEGW a été riche d’enseignements sur les liens entre le microbiote intestinal et la prévention, la survenue et le traitement de maladies de premier plan.

Développement et variations d’un microbiote intestinal en bonne santé

Microbienne complexe établie dans des écosystèmes (comme l’intestin humain) variant d’un individu à l’autre. C’est pourquoi sa forme dépend d’un large éventail d’influences et d’agressions, comme l’a présenté le Dr Georgina Hold (Université de South Wales, Australie). Des milliards de micro-organismes ont évolué parallèlement avec les êtres humains et sont en perpétuelle adaptation à notre physiologie. Dès la naissance, ces variations dépendent de facteurs tels que le mode d’accouchement, l’alimentation, la géographie, les expositions précoces (à la pollution et aux antibiotiques), l’âge et la génétique de l’hôte. Les facteurs environnementaux semblent toutefois jouer un rôle plus important que la génétique de l’hôte dans le façonnage du microbiote [1]. L’étude du microbiote aux premiers stades de la vie est déterminante pour comprendre le développement des maladies chroniques comme l’asthme, les allergies, l’eczéma, les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), la maladie coeliaque ou encore l’obésité, en particulier dans les sociétés urbaines.

L’étude du microbiote aux premiers stades de la vie est déterminante pour comprendre le développement des maladies chroniques comme l’asthme, les allergies, l’eczéma, les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), la maladie cœliaque ou encore l’obésité, en particulier dans les sociétés urbaines. Il n’existe pas « un » modèle de microbiote normal chez les individus en bonne santé car les profils métaboliques et fonctionnels du microbiote ne sont pas déterminés par l’espèce. De même, les différences entre les pays jouent un rôle plus important que les différences interindividuelles dans le façonnage du microbiote intestinal [2]. Les résultats de la cohorte HELIUS rapportés par le Dr Stijn Meijnikman (Centre médical académique, Pays-Bas) ont montré que la diversité bactérienne était liée à l’origine ethnique (et probablement influencée par l’alimentation et l’ascendance). On considère qu’un rapport Bacteroides élevées/ Prevotella faibles est associé à une alimentation occidentale, mais l’analyse de la fonctionnalité du microbiote donne généralement des résultats contradictoires. Le terme « dysbiose » est donc approximatif si la définition d’un microbiote « sain », « malade » ou simplement « différent » n’est pas précisée pour chaque cas.

Le microbiote et les maladies intestinales

Les interactions entre le microbiote et l’hôte sont bidirectionnelles. Le lipopolysaccharide (LPS) est un médiateur important produit par les bactéries à Gram négatif, responsable de l’inflammation intestinale ainsi que de la prolifération des cellules adipeuses et de la résistance à l’insuline, comme l’a expliqué le Pr Rémy Burcelin (Université Paul-Sabatier, France). La translocation de bactéries vers le tissu adipeux constitue également un élément important dans le syndrome métabolique. De plus, des concentrations élevées d’ADN bactérien dans les adipocytes peuvent être considérées comme des biomarqueurs moléculaires du diabète de type 2.

Le syndrome de l’intestin irritable (SII) est une maladie complexe dans laquelle le microbiote et l’hôte interagissent au niveau physiopathologique, comme l’a montré le Pr Magnus Simrén (Centre hospitalier universitaire Sahlgrenska, Suède). En comparaison avec celle d’individus sains, la signature bactérienne de certains patients atteints d’un SII ne présente pas de spécificité. Pourtant, certains profils spécifiques ont été associés à la sévérité des symptômes [3]. La modulation des profils de microbiote (par des probiotiques ou des antibiotiques non absorbables) permet d’améliorer les symptômes du SII.

Effets de la prise de médicaments sur le microbiote intestinal

Le Dr Rinse K. Weersma (Centre médical universitaire de Groningue, Pays-Bas) a expliqué que la prise de médicaments interagissait directement avec le microbiote intestinal, et ce, de trois manières différentes : le médicament peut affecter le microbiote intestinal en modifiant sa composition ou sa fonction, le microbiote peut métaboliser le médicament et ainsi l’activer / l’inactiver, ou encore le microbiote peut avoir des effets indirects sur la réponse au médicament [4]. Dans le premier cas, on a montré que l’utilisation d’inhibiteurs de la pompe à protons augmentait la quantité de bactéries potentiellement nocives (EnterococcusStreptococcusStaphylococcus et Escherichia). D’autres médicaments auraient également un impact significatif sur le microbiote intestinal, notamment la metformine, les laxatifs, les antidépresseurs et les antibiotiques. Dans le deuxième cas de figure, les médicaments les plus fréquemment étudiés sont la sulfasalazine (activée par le microbiote) et la digoxine (inactivée par des souches bactériennes spécifiques).

Le Pr Harry Sokol (Hôpital Saint-Antoine, France) a indiqué qu’un effet indirect du microbiote intestinal sur la réponse au traitement avait été mis en évidence avec des immunothérapies antitumorales. Par exemple, l’efficacité de l’immunothérapie anti-PD-1 dans le mélanome, le cancer bronchique non à petites cellules et le carcinome rénal, entre autres, est directement affectée par le recours aux antibiotiques. En outre, l’effet positif de l’ipilimumab dans le mélanome est directement lié à la présence de Faecalibacterium prausnitzii [5].

Conclusion

D’autres études ont produit des résultats similaires avec d’autres bactéries comme Akkermansia muciniphila, et il semblerait que ces bactéries exercent un effet anti-inflammatoire important par le biais de la voie CTLA-4.

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Microbiote vaginal #12

Par le Prof. Markku Voutilainen
Faculté de médecine de l’Université de Turku ; gastro-entérologie, Hôpital universitaire de Turku, Finlande

Coloured scanning electron micrograph (SEM) of Prevotella melaninogenica, formerly known as Bacteroides melaninogenicus, is Gram-negative, anaerobic, rod to coccobacillus shaped, prokaryote (bacterium)

Coloured scanning electron micrograph (SEM) of Prevotella melaninogenica, formerly known as Bacteroides melaninogenicus, is Gram-negative, anaerobic, rod to coccobacillus shaped, prokaryote (bacterium).

Prééclampsie sévère et microbiote

Lin CY, Lin CY, Yeh YM, et al. Severe preeclampsia is associated with a higher relative abundance of Prevotella bivia in the vaginal microbiota. Sci Rep 2020; 10: 18249.

La prééclampsie sévère (PES) est un trouble hypertensif de la grossesse qui peut avoir des conséquences graves à la fois pour la mère et l’enfant. Elle est caractérisée par une hypertension et des manifestations de défaillance multiviscérale. Le rôle que le microbiote vaginal pourrait jouer dans la pathogénie de la PES reste inconnu. La présente étude a révélé que les femmes présentant une PES avaient une abondance relative augmentée de Prevotella bivia (Pb) dans le milieu vaginal. Pb est une bactérie anaérobie à Gram négatif qui a précédemment été associée à la maladie inflammatoire pelvienne et la vaginose bactérienne. Des études antérieures ont montré que l’obésité était un facteur de risque de PES et que le microbiote vaginal des femmes obèses était caractérisé par une diversité accrue et la prédominance de Prevotella spp. Dans cette étude, l’indice de masse corporel (IMC) a été le prédicteur de la PES le plus fort et les auteurs suggèrent que l’abondance relative de Pb plus élevée dans le microbiote vaginal, qui est étroitement régulé par l’IMC, pourrait être impliquée dans la pathogénie de la PES.

Mucus cervical essentiel pour la santé reproductive de la femme

Lacroix G, Gouyer V, Gottrand F, Desseyn JL. The cervicovaginal mucus barrier. Int J Mol Sci 2020; 21: 8266.

Cette revue aborde les connaissances actuelles sur le mucus cervico-vaginal (MCV), le bouchon muqueux cervical (BMC) et les interactions entre le mucus des voies génitales de la femme et les communautés microbiennes à la fois à l’état physiologique et dans la vaginose bactérienne. Le mucus cervical (CM) est essentiel à la santé de la femme : il protège l’épithélium vaginal et contribue à maintenir la fertilité et la fécondité. Dans cette étude, les auteurs ont évalué son rôle à la fois à l’état physiologique et dans la vaginose bactérienne. Pendant la grossesse, un BMC se forme pour empêcher les microbes vaginaux de remonter jusque dans l’utérus, protégeant ainsi le foetus vis-à-vis des agents pathogènes. Le BMC contient du mucus, des composés antimicrobiens et des cellules immunitaires. Le microbiote vaginal normal est caractérisé par la prédominance de Lactobacillus spp. Une coopération non perturbée entre le microbiote vaginal, le MCV et les cellules hôtes est nécessaire à la santé vaginale. Cela inclut l’acidification par l’acide lactique, la production d’espèces réactives de l’oxygène, une interaction entre les mucines et les cellules et la diffusion des cellules de signalisation. La vaginose bactérienne, qui pourrait provoquer un accouchement prématuré, est caractérisée par une déplétion de Lactobacilli conduisant à une altération de la fonction de barrière vaginale. Un BMC plus court, plus perméable et moins muco-adhésif a été retrouvé chez les femmes à haut risque d’accouchement prématuré versus les femmes à faible risque. En plus de l’administration d’antibiotiques par voie orale ou vaginale, la vaginose bactérienne pourrait être traitée par la restauration de la flore vaginale de Lactobacillus. En conclusion, le MCV est essentiel à la fertilité et protège vis-à-vis de la vaginose bactérienne et des infections sexuellement transmissibles, qui augmentent le risque d’infertilité et d’accouchement prématuré

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Revue de presse

Bénéfices à long-terme d’un traitement par transfert de microbiote sur les symptômes autistiques et le microbiote intestinal

Article commenté - Rubrique enfant

Par le Pr. Emmanuel Mas
Gastro-entérologie et nutrition, Hôpital des Enfants, Toulouse, France

Commentaire de l’article original de Kang et al. (Sci Rep 2019) [1]

De nombreuses études ont fait état d’un microbiote intestinal anormal chez des personnes atteintes de troubles du spectre autistique (TSA), ce qui suggère un lien entre le microbiote intestinal et les comportements semblables à ceux de l’autisme. La modification du microbiote intestinal est une voie potentielle pour améliorer les symptômes gastro-intestinaux (GI) et comportementaux chez les enfants atteints de TSA, et la transplantation de microbiote fécal pourrait transformer le microbiote intestinal dysbiotique en un microbiote sain en délivrant un grand nombre de bactéries commensales d’un donneur sain. Les auteurs avaient déjà effectué un essai ouvert de la thérapie de transfert de microbiote (TTM) qui combinait des antibiotiques, un nettoyage intestinal, un suppresseur d’acide gastrique et une transplantation de microbiote fécal, et avaient observé des améliorations significatives des symptômes gastro-intestinaux, des symptômes liés à l’autisme et du microbiote intestinal. Les auteurs présentent un suivi effectué auprès des mêmes 18 participants deux ans après la fin du traitement. Il est à noter que la plupart des améliorations des symptômes gastro-intestinaux ont été maintenues et que les symptômes liés à l’autisme se sont encore davantage améliorés après la fin du traitement. D’importants changements du microbiote intestinal à la fin du traitement se sont maintenus lors du suivi, notamment une augmentation significative de la diversité bactérienne et une abondance relative des Bifidobacterium et des Prevotella. Leurs observations démontrent l’innocuité et l’efficacité à long terme de la TTM comme traitement potentiel pour les enfants atteints de TSA qui ont des problèmes gastro-intestinaux, et justifient un essai en double aveugle et contrôlé par placebo dans le futur.

Que sait-on déjà à ce sujet ?

Les enfants autistes souffrent de divers symptômes gastro-intestinaux (constipation, diarrhée, ballonnement). En outre, il existe chez les enfants autistes une dysbiose du microbiote intestinal caractérisée par une augmentation du ratio Firmicutes/ Bacteroidetes en raison d’une diminution des Bacteroidetes. Cette dysbiose perturberait l’axe intestin-cerveau, et favoriserait à la fois les symptômes digestifs et comportementaux liés à l’autisme. Le traitement par transfert de microbiote comprend une préparation digestive initiale avec antibiothérapie par vancomycine pendant 14 jours et préparation colique à J15, puis une transplantation fécale avec forte dose initiale de microbiote digestif humain standardisé (par voie orale ou rectale) et faible dose en entretien pendant 7-8 semaines, associées à un traitement par inhibiteurs de la pompe à protons à partir de J12. Kang et al. ont rapporté précédemment que ce traitement a permis une réduction de 80 % des symptômes digestifs et une réduction plus faible des symptômes comportementaux d’enfants autistes, associées à une modification du microbiote intestinal, avec un suivi de 8 semaines [2].

Quels sont les principaux résultats apportés par cette étude ?

Dans cet article, les auteurs ont réévalué les 18 enfants autistes deux ans après le traitement initial par transfert de microbiote. L’amélioration des symptômes digestifs, mesurés par questionnaire (Gastrointestinal Symptom Rating Scale), persistait avec une réduction de 58 % (Figure 1). Tous les symptômes digestifs étaient améliorés (douleurs, difficultés de digestion, diarrhée et constipation). Le transit était toujours amélioré, avec une réduction de 26 % du pourcentage de jours avec des selles anormales.

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Les familles rapportaient une amélioration constante des signes autistiques. La sévérité des TSA était diminuée de 47 % par rapport au début de l’étude, évaluée par le Childhood Autism Rating Scale (Figure 2). Une amélioration de 35 % des comportements était notée par l’Aberrant Behavior Checklist ; cette amélioration se poursuivait car elle était de 24 % à la fin des huit semaines. Le microbiote intestinal a été analysé pour 16 des 18 enfants par analyse ARN 16S. La diversité bactérienne était plus élevée à deux ans qu’après huit semaines de suivi (Figure 3). Une abondance relative augmentée de Bifidobacterium et Prevotella persistait à deux ans, alors que celle de Desulfobivrio ne persistait pas de manière significative.

Points clés

  • Le traitement par transfert de microbiote a un effet persistant deux ans après le traitement initial sur les symptômes digestifs.

  • Il a également un effet, deux ans après, sur les symptômes du spectre autistique.

  • Des études sont nécessaires pour voir si, même en l’absence de manifestations digestives, le transfert de microbiote pourrait avoir des effets sur le comportement.

Quelles sont les conséquences en pratique ?

Ces résultats montrent que le traitement par transfert de microbiote a un effet persistant à long terme sur le microbiote intestinal. Il permet d’améliorer également de manière significative et durable les symptômes digestifs et comportementaux. Il est maintenant indispensable de réaliser une étude randomisée contrôlée en double aveugle chez des enfants autistes ayant ou non des signes digestifs. En effet, une dysbiose pourrait être présente et avoir un impact sur l’axe intestin-cerveau, même en l’absence de signes digestifs. Les résultats de cette étude doivent être confirmés avant une utilisation en pratique clinique.

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Conclusion

Cette étude confirme l’intérêt d’un traitement par transfert de microbiote chez les enfants autistes. En effet, le traitement initial a des effets persistants à deux ans sur le microbiote et les signes digestifs, et même une amélioration qui continuait au niveau du comportement.

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Article commenté

Le microbiote cutané #12

Par le Prof. Markku Voutilainen
Faculté de médecine de l’Université de Turku ; gastro-entérologie, Hôpital universitaire de Turku, Finlande

Scanning Electron Micrograph (SEM) depicting large numbers of Staphylococcus aureus bacteria, which were found on the luminal surface of an indwelling catheter.

Profils du microbiote cutané liés à l'âge

Li Z, Bai X, Peng T, et al. New insights into the skin microbial communities and skin aging. Front Microbiol 2020: 11: 565549.

Le vieillissement intrinsèque de la peau est un processus de vieillissement naturel déterminé par des facteurs internes alors que le photo-vieillissement correspond au vieillissement accéléré de la peau dû à une exposition répétée aux rayons ultraviolets (UV). On sait peu de choses sur la façon dont le microbiote cutané influence le processus de vieillissement (qu’il s’agisse du vieillissement naturel ou du photo-vieillissement) et sur les effets des microbes cutanés liés à l’âge sur le vieillissement selon ces deux processus. Pour répondre à cette question, les auteurs ont analysé 160 échantillons cutanés de joue et d’abdomen de 80 personnes de divers âges afin d’élaborer des profils du microbiote liés à l’âge. Ils ont constaté que l’abondance de Cyanobacteria était plus élevée dans le groupe des enfants et qu’elle était associée à une diminution des lésions et de la pigmentation cutanées induites par les UV. Chez les personnes jeunes et d’âge moyen, Staphycococcus, Cutibacterium et Lactobacillus ont renforcé la barrière cutanée et exercé un effet protecteur vis-à-vis du photovieillissement. Cutibacterium pourrait moduler les réponses immunitaires, supprimer l’inflammation et ralentir les processus de vieillissement. Chez les personnes jeunes et d’âge moyen, Staphylococcus pourrait exercer un effet protecteur vis-àvis du vieillissement cutané intrinsèque et maintenir l’homéostasie du microbiote cutané. Les auteurs suggèrent que ces observations pourraient avoir une valeur innovante et clinique importante et que le développement et l’utilisation de régulateurs de l’homéostasie microbienne de la peau pourraient réduire l’incidence des maladies cutanées liées à l’âge.

L’isomérate de saccharide module le microbiote cutané

Sfriso R, Claypool J. Microbial reference frames reveal distinct shifts in the skin microbiota after cleansing. Microorganisms 2020; 8: 1634.

De nombreux facteurs intrinsèques, extrinsèques et liés à l’hôte modulent le microbiote cutané. Les produits de nettoyage de la peau tels que les savons solides ou liquides et les détergents ont un impact sur le microbiote cutané. L’isomérate de saccharide (SI) est un hydratant d’origine végétale qui ressemble au complexe de glucides naturels présents dans la couche la plus superficielle de la peau. Le SI se lie à la peau plus fortement que d’autres ingrédients hydratants et maintient la peau hydratée plus longtemps. Les investigateurs ont réalisé une étude clinique randomisée, contrôlée versus placebo, en simple aveugle, afin d’évaluer les effets du nettoyage de la peau avec un savon liquide contenant du SI sur le microbiote cutané au cours du temps. Parmi les organismes potentiellement bénéfiques, Paracoccus marcusii a été positivement associé à la formulation active. Cette bactérie produit naturellement de l’astaxanthine, un caroténoïde antioxydant puissant ayant des effets positifs potentiels sur la santé. P. mercusii est également un dégradeur d’hydrocarbures polyaromatiques potentiellement cancérogènes et un producteur de biosurfactants et il pourrait jouer un rôle clé dans le maintien d’une peau saine. Le lavage avec le SI a également réduit l’abondance des « corynéformes » (Brevibacterium casei et Rothia mucilaginosa) liées aux infections cutanées et explique le bénéfice non caractérisé de la formulation lavante active. Ces résultats suggèrent que le lavage de la peau par le SI pourrait avoir des effets bénéfiques sur le microbiote cutané.

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Microbiote intestinal #12

Par le Pr. Markku Voutilainen
Faculté de médecine de l’Université de Turku ; gastro-entérologie, Hôpital universitaire de Turku, Finlande

Restauration du microbiote intestinal par TMF chez des nourissons nés par césarienne

Korpela K, Helve O, Kolho K-L, Saisto T, et al. Maternal fecal microbiota transplantation in cesarean-born infants rapidly restores normal gut microbial development: a proof-ofconcept study. Cell 2020; 183: 324-34.

Les nourrissons nés par césarienne (CS) ont un microbiote intestinal différent de celui des nourrissons nés par voie basse car ils n’ont pas été exposés aux bactéries maternelles pendant l’accouchement. Plusieurs études ont rapporté que la CS pourrait avoir des conséquences à court et à long termes, avec un risque accru de maladies immunitaires chroniques. Dans cette étude, l’efficacité et la sécurité de la transplantation de microbiote fécal (TMF) pour la restauration du microbiote fécal ont été évaluées chez des bébés CS. Sept nourrissons CS ont reçu une transplantation de selles de leur propre mère avec leur premier biberon de lait et la composition de leur microbiote fécal a été comparée à celle du microbiote de 82 bébés nés par voie basse ou par CS n’ayant pas reçu de TMF. Au cours du suivi de 3 mois, aucun effet indésirable n’a été rapporté. Une semaine après la TMF, le microbiote intestinal des nourrissons CS était similaire à celui des nourrissons nés par voie basse alors que celui des nourrissons CS n’ayant pas reçu de TMF avait une diversité microbienne plus faible. La TMF a corrigé la signature bactérienne des nourrissons CS par la normalisation rapide des Bacteroidales dont l’abondance était plus faible dans le groupe CS et elle a également réduit la présence d’agents pathogènes potentiels caractéristiques des nourrissons CS. Cette étude de preuve de concept a montré que la TMF normalisait le développement du microbiote intestinal chez les nourrissons CS.

Césarienne et risque d'asthme infantile

Stokholm J, Thorsen J, Blaser MJ, et al. Delivery mode and gut microbial changes correlate with an increased risk of childhood asthma. Sci Transl Med 2020; 12, eaax9929.

Les auteurs ont analysé les effets de l’accouchement par césarienne (CS) sur la composition du microbiote intestinal au cours de la première année de vie et ont examiné si les perturbations étaient associées à un risque de développer un asthme au cours des 6 premières années de vie. Ils ont inclus 700 enfants de la cohorte COPSAC2010 (Copenhagen Prospective Studies on Asthma in Childhood2010), parmi lesquels 22 % (151) étaient nés par CS et 78 % (549) par voie basse. La composition du microbiote intestinal a varié selon le mode d’accouchement : les bébés CS avaient une abondance plus faible de Bacteroidetes et d’Actinobacteria à l’âge d’une semaine, mais l’abondance de Firmicutes et de Proteobacteria était plus élevée que chez les enfants nés par voie basse. Concernant le genre, seuls 3 genres étaient différents à 1 an et l’accouchement par CS a été associé à une abondance relative plus élevée d’un genre appartenant à la famille Enterobacteriaceae et Escherichia/Shigella. Un profil microbien a été identifié à 1 semaine, 1 mois et 1 an en fonction du mode d’accouchement et les enfants CS ayant conservé la signature du microbiote intestinal de la CS à l’âge d’un an ont présenté 3 fois plus de risques de développer un asthme à l’âge de 6 ans. Ce risque accru d’asthme était amélioré chez les enfants CS dont le microbiote intestinal à l’âge d’un an ressemblait à celui des enfants nés par voie basse, indiquant que la maturation saine d’un microbiote intestinal dysbiotique de la CS pourrait améliorer en partie le risque d’asthme lié à l’accouchement par CS.

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