Le microbiote en temps de pandémie de Covid-19

Synthèse

Par la Pr Conceição Calhau
NOVA Medical School, Université nouvelle de Lisbonne, Portugal

Par le Pr Pedro Povoa
NOVA Medical School, Université nouvelle de Lisbonne, Portugal ; Unité de réanimation polyvalente, Hôpital São Francisco Xavier, CHLO, Lisbonne,Portugal ; Centre d’épidémiologie clinique, OUH Odense, Hôpital universitaire, Danemark

Pour la première fois, la diversité du microbiote intestinal est évoquée comme biomarqueur pronostique de la sévérité de la Covid-19. L’identification des modifications du microbiote en tant que biomarqueurs fiables dans le contexte de la Covid-19 constitue un élément essentiel dans la compréhension de la maladie, soulignant la place prioritaire de la prévention et peut-être de nouvelles stratégies thérapeutiques. En 2020, le nouveau coronavirus a touché sévèrement certains groupes de la population, et plus spécifiquement les sujets âgés ainsi que les personnes obèses, hypertendues et diabétiques [1]. Or, des publications ont montré que la dysbiose était un facteur commun chez tous ces patients [2, 3].

Des signatures bactériennes chez les patients atteints de la Covid-19 

Alors que le microbiote intestinal a suscité un grand intérêt au sein de la communauté scientifique avec un rôle pivot dans les fonctions immunitaires et inflammatoires de l’hôte, nous avons cherché à déterminer si des modifications de la composition du microbiote intestinal étaient associées à une plus grande sévérité clinique de la Covid-19 [4]. Une étude transversale multicentrique nationale a été conduite chez 115 patients atteints de Covid-19 catégorisés en fonction des facteurs suivants : 1) lieu du rétablissement de la Covid-19 : ambulatoire (isolement au domicile), service hospitalier (chambre isolée) ou réanimation ; et 2) échelle de sévérité de la Covid-19 asymptomatique/forme légère à modérée ou sévère. Les patients atteints d’une forme sévère présentaient des modifications importantes de la composition du microbiote intestinal par rapport aux patients ayant une forme légère à modérée en ambulatoire ou admis en service hospitalier (Figure 1). Ces modifications comprenaient : 1) une plus faible diversité microbienne intestinale globale ; 2) une plus faible abondance de bactéries productrices de butyrate telles que celles appartenant aux genres Roseburia et Lachnospira ; 3) un ratio Firmicutes/Bacteroidetes plus faible ; 4) une plus forte abondance de protéobactéries. De plus, nous avons détecté le virus dans des échantillons fécaux, ce qui doit être pris en compte dans les recommandations de santé publique [5, 6]. Les publications d’autres équipes ont montré qu’une faible diversité pouvait constituer un biomarqueur clinique prédictif d’un risque accru de sévérité [7-9].

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Mag 15_Covid19 Fig1 FR

Le microbiote respiratoire chez les patients dans un état critique

À l’origine, les poumons sains étaient considérés comme stériles. Toutefois, au cours de la dernière décennie, l’application des techniques de recherche sur le microbiote a clairement prouvé le contraire. Les poumons sont colonisés par une charge bactérienne très faible par rapport à l’intestin [10]. Les différentes parties de l’appareil respiratoire (oropharynx, voies aériennes, poumons) présentent une diversité et des compositions différentes liées aux sources de colonisation, aux taux de colonisation, aux taux d’extinction et aux distances les séparant les unes des autres, d’après le modèle insulaire adapté où le « continent » est la cavité buccale [11]. De récentes études conduites chez des patients atteints d’une forme sévère de Covid-19 ont montré une dysbiose du microbiote des voies aériennes (analysé dans des échantillons de liquide de LBA) similaire à la dysbiose observée lors d’infections des voies respiratoires inférieures comme la pneumonie [12, 13]. En outre, Acinetobacter – un bacille pathogène à Gram négatif non fermentaire commun dans la pneumonie acquise sous ventilation mécanique, l’infection acquise en réanimation la plus sévère chez les patients sous ventilation mécanique invasive – était un genre bactérien fréquemment rencontré dans les tissus pulmonaires de patients décédés [14]. La présence de certains pathogènes dans les poumons des patients décédés et dans la cavité buccale est liée à la migration dans le modèle insulaire adapté. [15] Dans le contexte du dérèglement immunitaire associé à la Covid-19, plusieurs études épidémiologiques ont révélé un risque accru d’infections nosocomiales, et notamment de pneumonie acquise sous ventilation mécanique comme notre groupe l’a montré. Dans notre étude, nous avons observé que les patients atteints de Covid-19 avaient deux fois plus de risques de présenter une pneumonie acquise sous ventilation mécanique que les patients non-Covid-19 [16].

Conclusion

Les études sur le microbiote et la Covid-19 pourraient ouvrir de nouvelles perspectives pour le développement d’interventions thérapeutiques (probiotiques, prébiotiques…) visant à corriger la dysbiose observée dans les formes sévères de Covid-19. Ces interventions devraient permettre d’augmenter la diversité bactérienne globale et l’abondance des bactéries commensales, contribuant ainsi à inhiber la prolifération de pathogènes opportunistes. Ces études pourraient également avoir des implications dans la conception de vaccins efficaces contre la Covid-19, dans la mesure où le microbiote intestinal pourrait constituer un facteur influant sur l’efficacité vaccinale.

Sources

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10 Roux D, van Oort PM, Ricard JD, et al. Airway microbiome research: a modern perspective on surveillance cultures? Ann Transl Med 2017; 5: 445.

11 Whiteson KL, Bailey B, Bergkessel M, et al. The upper respiratory tract as a microbial source for pulmonary infections in cystic fibrosis. Parallels from island biogeography. Am J Respir Crit Care Med 2014; 189: 1309-15.

12 Shen Z, Xiao Y, Kang L, et al. Genomic diversity of severe acute respiratory syndrome-coronavirus 2 in patients with coronavirus disease 2019. Clin Infect Dis 2020; 71: 713-20.

13 Yamamoto S, Saito M, Tamura A, et al. The human microbiome and COVID-19: A systematic review. PLoS One 2021; 16: e0253293.

14 Fan J, Xiang L, Gao Y, et al. The lung tissue microbiota features of 20 deceased patients with COVID-19. J Infect 2020; 81: e64-7.

15 Battaglini D, Robba C, Fedele A, et al. The role of dysbiosis in critically ill patients with Covid-19 and acute respiratory distress syndrome. Front Med 2021; 8: 671714.

16 Rouzé A, Martin-Loeches I, Povoa P, et al. Relationship between SARS-CoV-2 infection and the incidence of ventilator-associated lower respiratory tract infections: a European multicenter cohort study. Intensive Care Med 2021; 47: 188-98.

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Nouvelles perspectives dans l'autisme : le rôle du microbiote dans la communication sociale

Synthèse

Par le Dr. Vincent Trebossen
Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, Hôpital Robert-Debré, APHP, Paris, France
Par le Dr. Pierre Ellul
Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, Hôpital Robert-Debré, APHP, Immunologie-Immunopathologie- Immunothérapie, Pitié-Salpêtrière, U959 INSERM, Paris, France
Par le Dr. Alexis Mosca
Service de gastro-entérologie pédiatrique, Hôpital Robert-Debré, APHP, Paris, France
Par le Pr. Richard Delorme
Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, Hôpital Robert-Debré, APHP, Génétique humaine et fonctions cognitives, Institut Pasteur, UMR3571 CNRS, Université Paris Cité, Paris, France

Troubles du spectre autistique

Les troubles du spectre de l’autisme (TSA) sont des troubles complexes du neurodéveloppement qui touchent 1 % de la population mondiale et sont caractérisés par un déficit de la communication sociale et des comportements répétitifs/stéréotypés. Les mécanismes physiopathologiques à l’origine des TSA sont toujours mal compris [1]. Trente à 50 % des personnes atteintes de TSA présentent des symptômes gastro-intestinaux (GI) tels que douleur abdominale, diarrhée et constipation, qui affectent leur qualité de vie et leur fonctionnement général. Il est intéressant de noter que la prévalence et la sévérité des symptômes GI sont fortement corrélées aux symptômes autistiques [2]. Même si l’étiologie des symptômes GI demeure inconnue, plusieurs études ont suggéré que les TSA pourraient résulter d’un déséquilibre au niveau de la composition du microbiote intestinal (MI) [3]. Des éléments concordants suggèrent l’existence d’interactions importantes entre le MI et le système nerveux central (SNC). Le MI affecte directement le neurodéveloppement en ayant un impact sur la neurogenèse, la survie des neurones, la croissance cérébrale et la myélinisation. Chez les personnes atteintes de TSA, la modulation du MI à l’aide de pro- ou prébiotiques ou de la transplantation de microbiote fécal (TMF) montre des effets bénéfiques à long terme sur les symptômes GI et les symptômes typiques de l’autisme. Des essais randomisés en double aveugle à plus grande échelle sont cependant nécessaires pour confirmer l’efficacité des traitements à base de micro-organismes dans les TSA, en particulier aux stades précoces et critiques du neurodéveloppement.

Microbiote intestinal, système nerveux central et neurodéveloppement 

Le microbiote intestinal (MI) humain est composé d’environ 1013 micro-organismes, pour la plupart des bactéries, des champignons et des virus. Le MI joue un rôle central dans la santé humaine en assurant de nombreuses fonctions : barrière intestinale, modulation de la réponse immunitaire et de la synthèse métabolique, ou encore protection directe contre les infections. La dysbiose, caractérisée par un déséquilibre du MI, a été associée à différentes maladies telles que les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), les cancers, le diabète ou l’obésité [4]. Des éléments concordants suggèrent également l’existence d’interactions importantes entre le MI et le système nerveux central (SNC) [5] (Figure 1).

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Mag 15_Synthèse Fig 1 FR

Des interactions réciproques entre le cerveau et le MI sont assurées par des métabolites microbiens (principalement des acides gras à chaîne courte) et des modulateurs immunitaires, directement par le franchissement des barrières hémato-intestinale et hémato-encéphalique et indirectement par la stimulation du nerf vague [6]. Des preuves appuient l’implication du MI dans la régulation des comportements et des fonctions cognitives chez l’être humain – en particulier les capacités socio-communicationnelles – même si les mécanismes exacts demeurent inconnus [5].

Les TSA sont des troubles du neurodéveloppement caractérisés par des difficultés de communication et d’interactions sociales et des comportements répétitifs/ stéréotypés, apparaissant dans l’enfance et touchant environ 1 % de la population générale. Les TSA sont en grande partie d’origine génétique, avec une héritabilité estimée atteignant 0,8-0,9, mais des événements environnementaux pré- et postnataux pourraient constituer des facteurs déclenchants ou des modulateurs de la sévérité des symptômes. La trajectoire du développement du cerveau aux premiers stades de la vie se chevauche avec celle du MI. En effet, ce dernier commence à se développer peu après la naissance et sa composition se stabilise pour adopter un profil proche de celui de l’adulte vers l’âge de 3 ans. Dans les premiers temps, la composition du MI est fortement influencée par des facteurs environnementaux tels que le lieu de naissance, le mode d’accouchement, l’allaitement et les xénobiotiques (utilisation d’antibiotiques p. ex.).

Les souris « axéniques » constituent un modèle totalement dépourvu de micro-organismes, microbiologiquement stérile (aucun organisme vivant ne peut être mis en culture). Les modèles murins axéniques sont très utiles pour déchiffrer les mécanismes expliquant les rôles joués par le MI dans le neurodéveloppement, mais également les relations existant entre le microbiote et la maladie. Des études ont montré que les souris axéniques présentaient (i) un défaut de la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique ; (ii) un volume cérébral plus important ; (iii) une expression génique indiquant une microglie plus immature et une moindre réponse immunitaire microgliale ; (iv) une augmentation de la myélinisation ; et (v) une diminution de l’expression du facteur neurotrophique dérivé du cerveau et d’une sous-unité des récepteurs N-méthyl-D-aspartate [5, 7]. Toutes ces données soulignent le rôle du MI dans la formation et l’intégrité de la barrière hémato- encéphalique, la neurogenèse, l’homéostasie microgliale, la myélinisation et la croissance/fonction cérébrale.

Microbiote intestinal, symptômes gastro-intestinaux et Troubles du Spectre de l'Autisme

Les souris axéniques ont présenté des comportements de type autistique tels que l’évitement social, des comportements répétitifs/ stéréotypés et un manque d’intérêt pour la nouveauté sociale. Certains de ces comportements ont disparu après colonisation par un MI provenant de souris de type sauvage, alors que la colonisation par un MI provenant de modèles murins de TSA a accentué ces comportements. Le MI semble en effet crucial pour la programmation et la présentation des capacités sociales et des comportements adaptatifs [8].

Un nombre croissant de preuves montrent que les symptômes GI sont sur-représentés chez les enfants atteints de TSA. Des symptômes GI tels que douleur abdominale, constipation et diarrhée sont rapportés chez près de 30 à 50 % des patients atteints de TSA et ils impactent fortement la qualité de vie des enfants [1]. La sévérité des symptômes GI a été corrélée à celle des symptômes autistiques et la dysbiose intestinale est bien documentée, même s’il n’existe pas encore de signature spécifique liée aux symptômes autistiques. Des études analysant le MI ont rapporté des différences au niveau de la diversité microbienne ainsi que des anomalies dans les profils des métabolites par rapport aux témoins sains. Deux récentes méta-analyses étudiant la composition du MI chez des patients atteints de TSA ont rapporté une diminution du genre Bifidobacterium et une augmentation des genres Faecalibacterium et Clostridium chez les patients atteints de TSA [9, 10] par rapport aux témoins. L’analyse du métabolome fécal a également montré une augmentation du p-crésol, un métabolite bactérien dérivé de la tyrosine, chez les personnes atteintes de TSA. Toutes ces données pourraient indiquer une association potentielle entre les anomalies du MI et les symptômes GI chez les patients atteints de TSA.

Cependant, la plupart des études présentent des résultats hétérogènes et des limites méthodologiques. Il existe en effet des facteurs de confusion qui constituent un inconvénient majeur, notamment le fait que ces études soient conduites dans des pays différents, avec des habitudes alimentaires et des modes de vie différents. D’ailleurs, une étude récente portant sur une vaste cohorte de 247 patients atteints de TSA n’a pas mis en évidence de lien direct entre le diagnostic de TSA ou les symptômes autistiques et la dysbiose du MI. La dysbiose a été associée à une alimentation moins diversifiée, qui est fréquente chez les patients atteints de TSA [8].

Troubles du spectre de l’autisme (TSA), symptômes gastro-intestinaux (GI) et microbiote intestinal (MI)

Près de 30 à 50 % des patients atteints de TSA ont rapporté des symptômes GI tels que douleur abdominale, diarrhée et constipation. La présence d’une dysbiose du MI chez les patients atteints de TSA a été bien explorée et confirmée dans le cadre de méta-analyses, même s’il n’existe pas de signature microbienne spécifique [9, 10]. Le lien entre la dysbiose du MI et les TSA est toujours mal compris. Certaines études suggèrent l’existence de liens directs par l’intermédiaire de l’axe MI-cerveau influant sur les symptômes autistiques et GI. Plus récemment, une étude suggère que la dysbiose du MI chez les patients atteints de TSA serait essentiellement liée à l’alimentation restrictive, qui est fréquente chez ces patients [8].

La modulation du microbiote intestinal dans les Troubles du Spectre de l'Autisme 

Un nombre croissant d’études ont analysé l’impact potentiel des stratégies thérapeutiques basées sur le microbiote sur l’amélioration des symptômes GI et des symptômes typiques de l’autisme chez les personnes atteintes de TSA.

Les probiotiques, des micro-organismes vivants, ont été utilisés dans les TSA et pourraient avoir un effet bénéfique chez les patients concernés. Des études précliniques ont montré une augmentation des interactions sociales avec une supplémentation en probiotiques (Bacteroides fragilis NCTC9343, Lactobacillus reuteri MM4-1A) dans des modèles murins de TSA. L’amélioration de la communication sociale était liée à une augmentation de l’expression d’ocytocine dans le SNC. Chez l’être humain, plusieurs études ont fait état d’effets positifs des traitements probiotiques sur la composition du MI et les symptômes GI dans les TSA [11]. Cependant, peu ont rapporté une amélioration des symptômes typiques de l’autisme. Dans la plupart des essais cliniques utilisant des probiotiques chez des autistes, on a observé des disparités en termes de probiotiques utilisés, de dose administrée par jour ou au total, et de durée du traitement. Même si certaines études suggèrent que les probiotiques pourraient être intéressants pour prévenir les symptômes GI chez les patients atteints de TSA, les résultats doivent être répliqués afin de garantir l’effet positif de cette stratégie.

De la même manière, l’efficacité des prébiotiques, comme le galacto-oligosaccharide (GOS) ou le fructo-oligosaccharide, a été étudiée dans les TSA [12]. Des souris soumises à un stress chronique ont montré une altération du MI et une diminution de l’intérêt social. Avec ce modèle murin, l’administration des prébiotiques a été associée à une augmentation des interactions sociales chez ces souris. Chez l’être humain, l’utilisation de GOS associé à une alimentation sans caséine et sans gluten a montré une amélioration des symptômes GI et des interactions sociales ainsi qu’une augmentation de l’abondance de Bifidobacterium dans le MI. Des études cliniques randomisées en double aveugle appropriées sont nécessaires pour confirmer les données préliminaires.

La transplantation de microbiote fécal (TMF) a également été étudiée dans les TSA. La TMF consiste à transplanter le MI d’un donneur afin de modifier le MI du receveur. Son efficacité dans l’infection à Clostridioides difficile est désormais bien démontrée, même chez l’enfant. Récemment, un essai clinique exploratoire en ouvert et non randomisé portant sur 18 enfants atteints de TSA et présentant des symptômes GI a évalué l’effet de la thérapie de transfert de microbiote (TTM) - un protocole de TMF modifié [13]. La TTM comprenait un traitement antibiotique de 2 semaines, une préparation colique puis le transfert de microbiote consistant en l’administration d’une forte dose par voie orale ou rectale suivie d’une dose d’entretien par voie orale pendant 7 à 8 semaines. Des événements indésirables (comportements perturbateurs, hyperkinésie) ont été observés au début du traitement par vancomycine, mais ont disparu spontanément après 3 jours de traitement. Le protocole TTM a entraîné une amélioration significative des symptômes GI après le suivi de 8 semaines. Plus surprenant, une amélioration des symptômes typiques de l’autisme (comportements stéréotypés et répétitifs, altération des capacités de communication sociale) a également été observée 8 semaines après la TTM. Il est intéressant de noter que l’amélioration des symptômes GI et autistiques a persisté 2 ans après le traitement et qu’elle était corrélée à une augmentation de la diversité du MI [14]. Deux ans après la TTM, la réduction moyenne du score total à l’échelle GSRS (Gastrointestinal Symptom Rating Scale) était toujours de plus de 50 %. Les variations des symptômes autistiques mesurées à l’aide des échelles CARS (Childhood Autism Rating Scale), SRS (Social Responsiveness Scale) ou ABC (Autistic Behavior Checklist) étaient toutes positivement corrélées aux pourcentages de variation des scores GSRS. Ces résultats ne sont pas encore confirmés par des études randomisées en double aveugle et contrôlées versus placebo.

Récemment, un essai clinique pilote en ouvert conduit dans les TSA a évalué l’effet d’un adsorbant GI administré par voie orale (AB-2004) qui module différents métabolites du MI. Les auteurs ont fait état d’une diminution des comportements de type anxieux chez la souris, induite par une diminution de métabolites microbiens intestinaux [15]. Ils ont également présenté les résultats préliminaires d’un essai clinique au cours duquel une dose d’AB- 2004 ajustée en fonction du poids a été administrée pendant 8 semaines à 30 adolescents atteints de TSA. À la semaine 8, des taux réduits de métabolites du MI ont été observés dans le plasma et l’urine. Plus intéressant encore, après le traitement, un nombre moins important de patients présentaient des symptômes GI mais également des comportements associés aux TSA, à savoir l’anxiété et l’irritabilité. Un effet rémanent a également été observé, avec une persistance de l’efficacité 4 semaines après l’arrêt du traitement [15]. Les facteurs reliant les améliorations cliniques et l’administration d’AB-2004 doivent encore être déterminés, et des facteurs indirects n’ont pas été étudiés, notamment l’effet de l’AB-2004 sur les modifications nutritionnelles, le statut immunitaire ou la fonction GI. Des études en double aveugle contrôlées versus placebo à plus grande échelle sont nécessaires pour mieux comprendre le rôle de l’AB-2004 dans la communication sociale chez l’être humain.

Face à l’absence de traitement spécifique pour les symptômes GI et autistiques chez les patients atteints de TSA, de nouvelles stratégies thérapeutiques bien tolérées ciblant le MI ou les métabolites microbiens, telles que la TMF/TTM, doivent être davantage évaluées, en particulier aux stades précoces et critiques du développement cérébral pendant l’enfance.

La transplantation de microbiote fécal (TMF) chez les patients atteints de TSA

La transplantation de microbiote fécal (TMF) est une nouvelle méthode efficace pour moduler le MI dans les maladies gastro-intestinales et endocriniennes. La TMF pourrait constituer une nouvelle option efficace pour moduler/restaurer le MI dans les TSA. Des modèles murins de TSA ont montré que la TMF permettait d’améliorer les symptômes typiques de l’autisme tels que les déficits de la communication sociale et les comportements stéréotypés. Chez l’être humain, un essai pilote en ouvert conduit chez des adultes atteints de TSA a suggéré que la TMF pourrait améliorer non seulement les symptômes GI mais également la réciprocité sociale et les comportements stéréotypés. Un effet rémanent a été observé, avec une persistance de l’efficacité 2 ans après l’arrêt du traitement. Il est intéressant de noter que l’efficacité était associée à une augmentation de la diversité du MI. La TMF pourrait constituer une nouvelle stratégie thérapeutique de pointe pour traiter les symptômes GI et comportementaux chez les enfants atteints de TSA et ouvrir de nouvelles pistes pour la compréhension de la physiologie de la communication sociale chez l’être humain.

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Conclusion

L’impact du microbiote intestinal sur la trajectoire neurodéveloppementale des enfants demeure largement inexploré. À ce jour, aucune étude n’a évalué l’impact de la modulation du microbiote intestinal sur la phase précoce du développement de l’enfant, en particulier sur les capacités de communication sociale. Des études préliminaires conduites chez des adultes et des enfants ont montré que la modulation du MI entraînait une amélioration des symptômes GI et des comportements autistiques. Sur la base de ces données, nous allons conduire un essai clinique en double aveugle chez des enfants atteints de TSA plus jeunes, aux tout premiers stades de leur développement cognitif (avant l’âge de 6 ans). L’objectif est de déterminer si une TMF réalisée à une période critique du développement entraînera une amélioration significative à long terme de la trajectoire développementale de l’enfant.

Sources

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6 Braniste V, Al-Asmakh M, Kowal C, et al. The gut microbiota influences blood-brain barrier permeability in mice. Sci Transl Med 2014; 6: 263ra158.

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8 Yap CX, Henders AK, Alvares GA, et al. Autism-related dietary preferences mediate autism-gut microbiome associations. Cell 2021; 184: 5916-5931.e17.

9 Iglesias-Vázquez L, Van Ginkel Riba G, Arija V, et al. Composition of Gut Microbiota in Children with Autism Spectrum Disorder: A Systematic Review and Meta-Analysis. Nutrients 2020; 12: E792.

10 Xu M, Xu X, Li J, et al. Association Between Gut Microbiota and Autism Spectrum Disorder: A Systematic Review and Meta-Analysis. Front Psychiatry 2019; 10: 473.

11 Shaaban SY, El Gendy YG, Mehanna NS, et al. The role of probiotics in children with autism spectrum disorder: A prospective, open-label study. Nutr Neurosci 2018; 21: 676-81.

12 Burokas A, Arboleya S, Moloney RD, et al. Targeting the Microbiota-Gut-Brain Axis: Prebiotics Have Anxiolytic and Antidepressant-like Effects and Reverse the Impact of Chronic Stress in Mice. Biol Psychiatry 2017; 82: 472-87.

13 Kang D-W, Adams JB, Gregory AC, et al. Microbiota Transfer Therapy alters gut ecosystem and improves gastrointestinal and autism symptoms: an open-label study. Microbiome 2017; 5: 10.

14 Kang D-W, Adams JB, Coleman DM, et al. Long-term benefit of Microbiota Transfer Therapy on autism symptoms and gut microbiota. Sci Rep 2019; 9: 5821.

15 Stewart Campbell A, Needham BD, Meyer CR, et al. Safety and target engagement of an oral small-molecule sequestrant in adolescents with autism spectrum disorder: an open-label phase 1b/2a trial. Nat Med 2022 [Epub ahead of print].

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Article Gastroentérologie Pédiatrie

Les AGCC : nouveaux marqueurs intestinaux de la maladie de Parkinson ?

Les acides gras à chaine courte (AGCC) sont des métabolites du microbiote intestinal dont l’implication dans la maladie de Parkinson a déjà été évoquée, notamment chez les rongeurs. Qu’en est-il chez l’humain ?

La (sidenote: https://parkinsonscare.org.uk/worldparkinsonsday/ ) (11 avril) est l’occasion chaque année pour les associations de patients et professionnels de santé de passer en revue les avancées de la recherche sur cette maladie neurodégénérative complexe et toujours sans traitement. Il sera sans doute question cette année d’une nouvelle étude menée par une équipe de chercheurs taïwanais. Ces derniers ont souhaité déterminer si les AGCC permettent de discriminer les patients Parkinson d’individus sains, et s’il y avait une corrélation avec la sévérité de la maladie. Pour ce faire, les niveaux plasmatiques et fécaux de plusieurs sous-types d’AGCC ainsi que le microbiote intestinal de 181 participants (96 patients et 85 témoins) ont été analysés. En parallèle, l’impact moteur et cognitif de la maladie ont été étudiés. Les résultats de l’étude ont fait l’objet d’une publication dans Neurology début 2022.

Des niveaux différents d’AGCC fécaux et plasmatique chez les patients Parkinsoniens 

Chez les patients atteints de Parkinson, les résultats ont montré des niveaux fécaux d’AGCC (acide butyrique, acide valérique et acide propionique) réduits tandis que les niveaux plasmatiques étaient augmentés par rapport aux individus sains. 
Autre enseignement : les quantités fécales des mêmes AGCC étaient réduites chez les patients avec un Parkinson au stade avancé en comparaison des patients atteints d’un stade précoce de la maladie. 

Des concentration d’AGCC corrélées au degré de sévérité des symptômes 

Les mesures de concentration fécales et plasmatiques varient selon la sévérité des symptômes moteurs et cognitifs. 

Une atteinte motrice plus sévère est corrélée à une faible concentration fécale de la plupart des AGCC couplée à une concentration plasmatique d’acide propionique augmentée.

Des symptômes cognitifs plus importants sont quant à eux couplés à une faible concentration d’acide butyrique au niveau fécal, ainsi qu’à des concentrations plasmatiques d’acides butyrique et valérique plus élevées.

La composition du microbiote des patients est également liée aux AGCC

L’étude montre que la diversité du microbiote des patients parkinsoniens était différente de celle des patients sains. Cette étude met en lumière le fait que les concentrations en AGCC sont corrélées avec l’abondance de bactéries pro-inflammatoires (Clostridiales et Ruminococcus), en particulier pour l’acide propionique. Ceci vient conforter l’hypothèse que l’inflammation intestinale est positivement associée à l’aggravation de la maladie.

Concrètement, ces résultats suggèrent que les AGCC peuvent servir de biomarqueurs intestinaux de la maladie de Parkinson reflétant également son degré de gravité. Une avancée scientifique intéressante qui permettrait un diagnostic plus précis et une meilleure prise en charge des patients. 

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Actualités Gastroentérologie Neurologie

Obésité, gare à la carence en vitamines B !

Contrairement aux idées reçues, obésité ne rime pas seulement avec excès. Des carences en vitamine B8 (biotine) peuvent déclencher un cercle vicieux entre les bactéries intestinales et le patient obèse. Explication. 

Le microbiote intestinal Obésité L'alimentation Prébiotiques : l'essentiel pour comprendre
Obesity isn't just excess

Bien que nécessaires en très petite quantité, les vitamines n’en sont pas moins fondamentales pour notre santé : une carence en vitamine C et c’est le scorbut, dont sont morts tant de marins alors qu’un citron aurait suffi à les sauver. Dans une moindre mesure, des troubles cognitifs, des engourdissements ou encore un état de fatigue persistent pourraient indiquer une carence en vitamine B. D’ailleurs, cette « fonction vitale » de la vitamine se retrouve dans son étymologie : « vitamine » venant du latin « vita » qui signifie vie.

Un moteur nommé B8

Au rang des très nombreuses vitamines indispensables au bon fonctionnement de notre corps : celles du groupe B, dont la célèbre vitamine B8, également appelée (sidenote: Biotine Appelée vitamine B7, ou B8 selon les pays, cette vitamine joue un rôle clef dans le métabolisme des glucides, des lipides et des acides aminés. Elle intervient également dans la biosynthèse d’autres vitamines (B9 et B12). De nombreux aliments sont de bonnes sources de biotine (céréales complètes, œufs, lait, noisettes...). Cette vitamine est également synthétisée par les bactéries de la flore intestinale. Biotin_NIH National Cancer Institut ) . Une des principales pourvoyeuses de biotine est l’alimentation, mais pas que ! Les bactéries du microbiote intestinal en fabriquent également… ou pas. Avec des conséquences sur notre santé, notamment en cas d’obésité.

x11 L’obésité sévère a été multipliée par 11 chez les hommes

x3 et par 3 chez les femmes entre 1975 et 2014, dans le monde.

Le cercle vicieux de l’obésité

Une équipe de chercheurs vient en effet de montrer que chez les patients obèses sévères ( (sidenote: Indice de Masse Corporelle (IMC) L'Indice de Masse Corporelle évalue la corpulence d’un individu en estimant la masse grasse du corps calculée par un rapport entre le poids (kg) et le carré de la taille (m2). https://www.nhlbi.nih.gov/health/educational/lose_wt/BMI/bmicalc.htm https://www.euro.who.int/en/health-topics/disease-prevention/nutrition/a-healthy-lifestyle/body-mass-index-bmi ) > 35), les bactéries intestinales productrices et transporteuses de biotine sont aux abonnées absentes. Leur hôte obèse, dont les besoins sont pourtant accrus (la vitamine B étant nécessaire à l’équilibre du tissu adipeux), se retrouve donc privé de cette source complémentaire à l’alimentation. Des expériences chez l’animal mettent en évidence que le (sidenote: Régime occidental Alimentation riche en aliments transformés, en sucre raffiné, en sel, en graisses saturées (viandes rouges) et graisses trans (viennoiseries) Zinöcker MK, Lindseth IA. The Western Diet-Microbiome-Host Interaction and Its Role in Metabolic Disease. Nutrients. 2018 Mar 17;10(3):365.  ) , facteur bien connu pour favoriser l’obésité, entraine une diminution des bactéries intestinales productrices de biotine, ainsi qu’une réduction des niveaux circulants de cette vitamine dans le sérum. D’autre part, l’inflammation intestinale, observée chez les patients obèses, limite paradoxalement son absorption lorsque celle-ci provient de l’alimentation.

Ainsi, un cercle vicieux se met en place en cas d’obésité sévère puisque la dysbiose intestinale aggraverait l'inflammation (et l’obésité) et la carence tissulaire en biotine.

Doper la production de biotine

Comment sortir de ce cercle vicieux ? La chirurgie de l’obésité (ou bariatrique), qui améliore le métabolisme et l'inflammation, favorise les bactéries productrices de biotine avec, à la clé, une augmentation -au moins pendant la première année- des taux de biotine circulante dans le corps. Autre piste : la supplémentation en prébiotiques (fibres de type fructo-oligosaccharides) et en biotine. Testée chez des souris nourries avec un régime riche en graisses, elle améliore la diversité du microbiote intestinal, booste la production bactérienne de biotine et d’autres vitamines B, tout en limitant la prise de poids et la détérioration de la glycémie.

Le microbiote intestinal

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"Intéressant" - Commentaire traduit de Christine Lange (Repris de My health, my microbiota

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Actualités

Sclérose en plaques et microbiote : la consommation de viande a-t-elle un impact ?

Maladie neurodégénérative auto immune, la sclérose en plaques (SEP) concerne 2,5 millions de personnes dans le monde. Une récente étude publiée dans EBiomedecine, met en évidence un réseau d’associations entre consommation de viande, augmentation de certains métabolites sanguins, de marqueurs pro-inflammatoire, et d’une diminution des bactéries digérant les polysaccharides chez les patients atteints de cette maladie. Explications.

Si les dernières recherches ont récemment révélé une implication du microbiote intestinal (MI) dans la pathogenèse de la SEP, ses mécanismes restent encore mal connus.

Une approche multiomique inédite

Pour la première fois, une équipe de recherche s’est intéressée, aux interconnexions entre le régime alimentaire, le système immunitaire, le métabolisme et le microbiote intestinal dans le développement et la progression de la SEP. Pour ce faire, une méthodologie multi-omique a été réalisée.

Cette approche inédite a fait l’objet d’une étude de 6 mois. Le sang et les selles des 49 participants (24 patients atteints de SEP et non traités et 25 individus non malades) ont été prélevés au début de l’étude et 6 mois plus tard. Les profils métaboliques ainsi que le MI de tous les participants sont restés stables pendant plus de 6 mois. Il était également demandé aux participants de consigner ce qu’ils avaient mangé à chaque repas.

Des relations altérées entre le microbiote intestinal et le système immunitaire chez les patients SEP

Constat similaire a de précédentes études, la structure des communautés bactériennes est globalement similaire entre les deux groupes. Néanmoins les patients atteints de SEP présentaient une plus faible abondance de bactéries aux propriétés immunomodulatrices. De plus, suivant le degré d’invalidité des patients, leurs microbiotes différaient suggérant que certaines espèces pourraient être associées à la sévérité de la maladie.

Les résultats des analyses multi-omiques suggèrent également des dysfonctionnements dans l’homéostasie des relations microbiome – système immunitaire. En effet, une dissociation des interactions entre les cellules immunitaires et le microbiome, de même qu’une modification du profil métabolique sanguin ont été observés dans le groupe de patients atteints de SEP.

La consommation de viande, une piste d’explication ? 

L’étude du journal alimentaire des participants a joué un rôle clé dans la démarche.
En effet, il a été constaté que la consommation de viande était supérieure chez les patients atteints de SEP. Cette consommation était corrélée à une augmentation de la quantité de cellules Th17, impliquées dans le process d’auto-immunité, et de S-adénosyl-L-méthionine (SAM), un métabolite produit à partir de la méthionine (acide aminé enrichi dans la viande) et impliqué dans l’activation des cellules Th17. Inversement, les patients SEP avaient une proportion réduite de B. thetaiotaomicron, bactérie connue pour sa forte capacité à digérer les polysaccharides.

Une nouvelle voie thérapeutique potentielle ? 

Ces données mettent en évidence des voies d’interaction entre l’alimentation, le microbiote intestinal, la réponse immunitaire et le métabolome sanguin au travers de B. thetaiotaomicron, Th17 et SAM. Pour les auteurs, ces résultats laissent suggérer qu’une restriction alimentaire en viande ou en methionine pourrait faire diminuer le nombre de cellules inflammatoires circulantes TH7 chez les patients SEP.

Mieux comprendre les voies de régulation entre alimentation, métabolites, réponse immunitaire et microbiote pour prévenir l’aggravation de la sclérose en plaques, voilà tous les enjeux de cette étude aux résultats prometteurs qui pourrait ouvrir la voie à de nouvelles cibles thérapeutiques.  Particulièrement relayée par la presse médicale, cette étude présente un intérêt clinique particulier qui ne manquera pas d’être abordé à l’occasion de la journée mondiale de la SEP le 30 mai prochain.

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Actualités Gastroentérologie

Xpeer: Le microbiote intestinal dans la gestion des symptômes gastro-intestinaux

Rejoignez le Dr. Eamonn Quigley, dans ce cours de formation médicale continue gratuit, alors qu'il passe en revue les données les plus récentes et les plus intéressantes sur l'"interaction entre le microbiote et les symptômes gastro-intestinaux."

SII
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Eamonn Quigley - Gut microbiota in the management of gastrointestinal symptoms

VERSION ACTUALISÉE 2025

Ce cours a été entièrement mis à jour en 2025 !

44% Seules 2 personnes sur 5 déclarent avoir été informées par leur médecin sur les bons comportements à adopter pour maintenir un microbiote équilibré

Synopsis du cours

Le microbiote affecte-t-il les symptômes gastro-intestinaux ? La réponse est oui, comme le démontre largement la littérature. Mais alors, peut-on utiliser le microbiote pour traiter les symptômes GI ? Rejoignez le Dr Eamonn Quigley dans cette revue des données les plus récentes et les plus intéressantes sur l'interaction entre le microbiote et les symptômes GI. Nous passerons en revue les effets du microbiome sur les symptômes gastro-intestinaux supérieurs et inférieurs (en nous concentrant sur le syndrome du côlon irritable), les habitudes intestinales, les ballonnements, les flatulences et la distension, et nous obtiendrons des conseils pratiques pour offrir les meilleurs soins à nos patients souffrant de symptômes gastro-intestinaux. A ne pas manquer! 

Qui est Eamonn Quigley?

  • Eamonn Quigley, MD, FRCP, FACP, MACG, FRCPI, MWGO, gastro-entérologue, titulaire de la chaire David M. Underwood de médecine des troubles digestifs, chef de la division de gastro-entérologie et d'hépatologie, et professeur de médecine au Weill Cornell Medical College du Houston Methodist Hospital.
  • Il a été président de l'Organisation mondiale de gastroentérologie de 2005 à 2009 et président de l'American College of Gastroenterology de 2008 à 2009. Il a été rédacteur en chef de l'American Journal of Gastroenterology de 1997 à 2003. Il a publié plus de 800 articles, revues, éditoriaux, chapitres de livres et rapports de cas évalués par des pairs, principalement dans les domaines de la motilité intestinale, des troubles gastro-intestinaux fonctionnels et du RGO.
  • Déclaration de conflits d'intérêts : L'auteur déclare avoir reçu des subventions/un soutien à la recherche de 4D Pharma, Biomerica et Vibrant, avoir reçu des honoraires ou des frais de consultation de Novozymes, Biocodex, Preciosionbiotics et Salix, et avoir participé à un bureau de conférenciers parrainé par Biocodex.

A propos d'Xpeer

Xpeer Medical Education est la première application accréditée de formation médicale sur le marché, avec des vidéos de micro-apprentissage divertissantes de seulement 5 minutes.

Avec un algorithme puissant pour personnaliser l’expérience utilisateur et le contenu, inspirée des plateformes de streaming vidéo les plus populaires, Xpeer offre une toute nouvelle expérience pour la formation continue et le développement des professionnels de santé.

Accréditée par l’Union européenne des Médecins Spécialistes, l’application offre de la formation médicale scientifique de haute qualité. Sur Xpeer, vous trouverez ce programme sur le microbiote et 500 heures d’éducation médicale en 2021 dans votre spécialité, les technologies et vos compétences professionnelles et personnelles.

En savoir plus sur les accréditations :

L’application Xpeer est accréditée par le Conseil Européen d’Accréditation pour la Formation Médicale Continue (EACCME) et fournit des crédits ECMEC officiellement reconnus dans 26 pays.

Les participants du module obtiennent 1 crédit FMF Européen (ECMEC) après chaque heure de formation (60 minutes effectives de e-learning, en excluant les introductions…). Ce crédit est acquis une fois le module complété et l’évaluation correspondante validée par les participants.

Recommandé par notre communauté

"Bon travail"  -@SnHQuang2 (De Biocodex Microbiota Institute sur X)

"J'aime bien"  -@CnBalinh (De Biocodex Microbiota Institute sur X)

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Sevrage tabagique et prise de poids : le microbiote intestinal, mon partenaire minceur !

Revers de la médaille de la bonne résolution de l’arrêt du tabac : les kilos en plus. Bonne nouvelle : une récente étude montre que ce n’est pas une fatalité mais une simple conséquence du déséquilibre du microbiote induit par le tabac. Ne reste donc qu’à le rééquilibrer !

Le microbiote intestinal Obésité La transplantation fécale L'alimentation

C’est un fait souvent observé et qui fait malheureusement obstacle à certaines tentatives d’arrêt du tabac : les anciens fumeurs ont tendance à prendre du poids. En moyenne 4,5 kg de plus sur la balance 6 à 12 mois après la dernière cigarette. De quoi décourager les meilleures volontés. A moins que notre microbiote intestinal nous offre une aide bienvenue ? C’est en tout cas ce que suggère une récente étude sur des souris.

1ère cause évitable Le tabac est la cause de maladie et de décès la plus évitable au monde.

7,2 millions Chaque année, le tabac fait plus de 7,2 millions de morts dans le monde, tuant plus de personnes que le sida, le paludisme et la tuberculose réunis.

1 européen sur 4 Selon l’OMS, l’Europe a la prévalence la plus élevée de tabagisme chez les adultes (28 %), soit un européen sur quatre.

Sevrage tabagique : un microbiote qui pèse lourd dans la balance

Comme les humains, les souris exposées régulièrement à de la fumée de cigarette ont tendance à prendre du poids à l’arrêt de la fumée. Au terme d’une longue série d’expériences, les chercheurs semblent avoir identifié le mécanisme potentiellement en jeu. Des composés du tabac (la nicotine ?) pourraient atteindre, après avoir transité dans le sang, le système digestif des souris « fumeuses ». Ils modifieraient alors la composition du microbiote intestinal. Et de fait, il suffit de transplanter le microbiote de souris fumeuses à des souris non-fumeuses pour les faire grossir. De quoi désigner ce microbiote comme en partie responsable des kilos pris.

Le microbiote intestinal

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Les mécanismes en jeu élucidés ?

Mais en pratique, comment est-ce possible ? Il semblerait que le tabagisme rompe un savant équilibre entre des molécules qui favorisent la prise de poids et d’autres qui la freinent. Chez le fumeur, la molécule favorisant la prise de poids serait de plus en plus fabriquée, tandis que celle la bloquant se ferait de plus en plus rare. Mais alors, pourquoi ne grossit-il pas ? Parce que le mécanisme est progressif, laissant au corps le temps de s’adapter en associant toute cigarette grillée à la nécessité de moins manger. Sauf qu’à l’arrêt du tabac, cet effet coupe-faim du tabac disparaît immédiatement, alors que le déséquilibre du microbiote favorable à la prise de poids perdure bien plus longtemps. Conséquence directe : la balance s’affole !

Accompagner les ex-fumeurs

"Les composés que nous avons identifiés pourraient conduire à de nouveaux traitements qui aideront les gens à éviter la prise de poids lorsqu'ils arrêtent de fumer"

estime le Pr Eran Elinav qui a dirigé l'équipe de recherche. Dans l’attente de trouver comment réparer le microbiote des ex-fumeurs (alimentation ? thérapie microbienne, postbiotiques ?) afin de limiter les kilos du sevrage, cette étude fournit un argument ‘de poids’ pour ne jamais fumer sa première cigarette ou exposer son entourage au tabagisme passif : protéger l’équilibre du microbiote.

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Maladies Inflammatoires Chroniques de l’Intestin (MICI) : les microplastiques en cause dans la sévérité ?

Les microplastiques semblent liés aux maladies inflammatoires de l'intestin (MICI). Plus précisément, leur concentration fécale, leur taille mais aussi leur origine chimique varient selon que les patients souffrent de Maladies Inflammatoires Chroniques de l’Intestin (MICI) ou non, et la sévérité de l’affection.

Les microplastiques (MP) sont désormais partout, y compris dans ce que nous mangeons et l’air que nous respirons. Quel est le risque sanitaire associé à cette exposition humaine accrue ? Même s’il est encore largement méconnu, les chercheurs suspectent un lien, au sein du système digestif, avec un risque accru d’inflammation, de stress oxydatif, une hausse de la perméabilité intestinale et une dysbiose du microbiote. Une liste déjà longue à laquelle il faudra peut-être ajouter les MICI, comme la maladie de Crohn ou la colite ulcéreuse, si l’on en croit les résultats d’une étude qui a comparé les caractéristiques des MP fécaux chez 52 patients atteints de MICI et 50 sujets sains, issus de 10 provinces chinoises.

Microplastiques dans les selles : des différences de taille

Premier enseignement : des MP ont été détectés dans tous les échantillons de selles. Leur taille était en grande majorité très inférieure à 300 µm et leur forme principalement de type feuille (1 MP sur 2) ou fibre (1 MP sur 3).
En revanche, leur concentration différait selon l’état de santé : les selles des patients souffrant de MICI contenaient :

  • 50% de MP de plus (41,8 morceaux / gramme de matière fécale sèche, vs 28,0 chez les sujets sains) ;
  • davantage de très petits MP (< 50 μm), alors que celles des participants en bonne santé contenaient des MP de 50 à 300 μm ;
  • et une abondance relative différente de chaque type de MP en termes de nature chimique, parmi la quinzaine de types retrouvés. Dans les fèces des participants sains, on retrouve surtout du PET, un plastique typique des bouteilles d’eau (22,3%), et dans une moindre mesure du polyamide issu notamment des textiles (8,9%) et du polypropylène typique des emballages alimentaires (8,7%).

Chez les participants atteints de MICI, le PET (34,0%) et le polyamide (12,4%) sont plus abondants, directement suivies par le PVC - canalisations, sols PVC…- (10,3%) qui devance le polypropylène (9,5%).

Enfin, les chercheurs montrent une corrélation positive entre les MP fécaux et la sévérité de la MICI. Ce qui soulève deux hypothèses : soit l'exposition aux MP participe à la maladie ; soit la maladie affecte la rétention des MP.

L’eau en bouteille et les fast-foods pointés du doigt

Restait à connaître l’origine de ces MP. Sur la base d’un questionnaire, l’équipe montre que la concentration en MP des fèces est doublée en cas de consommation d’eau en bouteille (vs eau du robinet bouillie). Ce qui s’explique par le fait que l'eau en bouteille contient 22 fois plus de MP, et notamment du PET, que l'eau du robinet.

22 L'eau en bouteille contient 22 fois plus de microplastiques.

Autres facteurs allant de pair avec un quasi doublement du contenu en MP dans les fèces : la consommation d’aliments issus de la restauration rapide (vs fait maison) et l’exposition à la poussière au travail ou dans la vie.

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Actualités Médecine générale Gastroentérologie

Rhinite allergique : sortez les mouchoirs et suivez la dysbiose

Si elle est loin d’avoir livré tous ses secrets, on sait que la rhinite allergique est associée à un déséquilibre du microbiote respiratoire. Mieux caractériser cette dysbiose pourrait aider à mettre au point des traitements ciblés et individualisés.

Le microbiote ORL Rhinite allergique

Quand printemps rime avec… éternuements ! Démangeaisons, picotements, nez qui coule, yeux qui pleurent .. chaque année, l’arrivée du printemps et ses concentrations de pollens marquent le retour en fanfare du rhume des foins. La rhinite allergique - communément appelé rhume des foins - et son cortège de symptômes empoisonnent la vie de (sidenote: Cheng L, Chen J, Fu Q, et al. Chinese Society of Allergy Guidelines for Diagnosis and Treatment of Allergic Rhinitis. Allergy Asthma Immunol Res (2018) 10(4):300–53.  Eifan AO, Durham SR. Pathogenesis of Rhinitis. Clin Exp Allergy (2016) 46 (9):1139–51. ) . Complexe, cette pathologie résulte d’une combinaison de facteurs génétiques et environnementaux, parmi lesquels une interaction entre un déséquilibre du microbiote respiratoire et la réponse anormale et excessive du système immunitaire. Mais quel rôle joue cette dysbiose ? Et quels sont les microorganismes impliqués ?

40% La rhinite allergique toucherait jusqu’à 40% de la population mondiale avec une forte prévalence.

1 personne sur 4 Soit une personne sur quatre, dans les pays industrialisés.

Un microbiote respiratoire déséquilibré

Pour le savoir, une équipe chinoise a comparé, à partir de prélèvements nasaux, le microbiote respiratoire de 28 personnes souffrant d’épisodes aigus de rhinite allergique saisonnière à celui de 15 individus non allergiques. Résultats : aucune différence entre les deux groupes en termes de diversité et d’abondance des microorganismes, mais d’importantes disparités au niveau de leur composition. Prédominants au sein du microbiote respiratoire des individus en bonne santé, les genres bactériens Moraxella, Haemophilus, Streptococcus et Flavobacterium ont laissé place aux genres Klebsiella, Prevotella et Staphylococcus chez les personnes allergiques. Au total, les chercheurs ont ainsi identifié 10 genres bactériens surreprésentés chez ces dernières.

Le rhume des foins

Le rhume des foins (ou rhinite allergique) est une pathologie chronique très fréquente qui touche aussi bien chez les enfants que chez les adultes. 
C’est une maladie inflammatoire de la muqueuse nasale qui s’accompagne d'un ou plusieurs symptômes nasaux, notamment le prurit nasal (démangeaison, picotement), les éternuements, la rhinorrhée (nez qui coule) et la congestion nasale (nez qui coule).

Un métabolisme perturbé 

Les scientifiques ont ensuite recouru à la métabolomique sérique, une technique qui consiste à analyser la concentration des (sidenote: Métabolites Petites molécules produites au cours du métabolisme cellulaire ou bactérien. Les acides gras à chaine courte sont par exemple des métabolites produits par le microbiote intestinal lors de la fermentation de sucres complexes non digestibles (fibres…).  Silva YP, Bernardi A, Frozza RL. The Role of Short-Chain Fatty Acids From Gut Microbiota in Gut-Brain Communication. Front Endocrinol (Lausanne). 2020;11:25.  Lamichhane S, Sen P, Dickens AM, et al An overview of metabolomics data analysis: current tools and future perspectives. Comprehensive analytical chemistry. 2018 ; 82: 387-413 ) dans le sérum. Elle a révélé la présence de 26 métabolites différenciant les personnes allergiques des personnes en bonne santé. Autre découverte, la présence de16 voies métaboliques altérées, dont celles des acides arachidoniques déjà connue pour produire des médiateurs inflammatoires impliqués dans certaines maladies inflammatoires comme l’asthme allergique.

Le microbiote respiratoire

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Vers des traitements individualisés ?

Combinés, les résultats de ces deux approches confirment l’hypothèse d’une influence de la réaction inflammatoire d’origine allergique sur l’équilibre du microbiote respiratoire. Surtout, ils fournissent d'importants biomarqueurs candidats susceptibles d’être utilisés pour le diagnostic de la rhinite allergique. Les auteurs suggèrent donc de poursuivre ces travaux pour affiner l’identification des différents sous-types de rhinite allergique (saisonnière/perannuelle, intermittente/persistante, légère/modérée/sévère), ce qui pourrait ouvrir la voie au développement de traitements individualisés... et la fin du calvaire pour des milliers de personnes.

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