Le microbiote intestinal, une nouvelle piste pour la prise en charge du diabète de type 2 ?

Moins diversifié et appauvri en certaines bactéries : telles sont les caractéristiques du microbiote intestinal des personnes atteintes de diabète de type 2. Des données précieuses qui font naître de nouvelles pistes pour prévenir et guérir ce fléau de santé mondial.

Le microbiote intestinal Diabète de type 2

Cause majeure de cécité, d’insuffisance rénale, d’accidents cardiovasculaires, et d’amputation1, le diabète est une maladie grave qui apparaît lorsque le pancréas ne produit pas suffisamment d’insuline (diabète de type 12), ou, dans la majorité des cas, quand l’organisme développe une résistance à cette hormone (diabète de type 2, DT23). Alors que le nombre de cas de diabète a quadruplé ces 40 dernières années, touchant désormais plus de 420 millions de personnes dans le monde1, pouvoirs publics et organisations internationales se mobilisent pour améliorer l’accès aux soins. Une journée mondiale se tient tous les 14 novembre depuis 1991 pour sensibiliser les populations à la maladie.

Un microbiote spécifique en cas de DT2…

Dans ce contexte, les chercheurs se démènent pour identifier aussi bien les facteurs en cause que ceux à même de prévenir la maladie. Parmi ces facteurs, le microbiote intestinal reçoit de plus en plus d’attention. Et pour cause : sa composition a été associée au risque de DT2 dans plusieurs études. Dans la dernière en date, des chercheurs ont sorti l’artillerie lourde et sont parvenus à réunir plus de 2 000 participants (contre quelques centaines au plus dans les précédentes études) afin de comparer le microbiote des sujets atteints à celui des sujets non atteints.

… déjà modifié aux stades précoces

Les résultats sont édifiants : on observe moins de cas de DT2 chez les personnes dont le microbiote est diversifié et riche en certaines bactéries, capables de produire un acide gras à chaîne courte particulier, le (sidenote: AGCC Les acides gras à chaîne courte sont une source d’énergie (carburant) des cellules de l’individu. Ils interagissent avec le système immunitaire et sont impliqués dans la communication entre l’intestin et le cerveau. Sources:
Silva YP, Bernardi A, Frozza RL. The Role of Short-Chain Fatty Acids From Gut Microbiota in Gut-Brain Communication. Front Endocrinol (Lausanne). 2020;11:25.
)
, un composé aux effets bénéfiques sur le métabolisme, l’activité des cellules et aux propriétés anti-inflammatoires. Les chercheurs ont fait encore plus fort, puisqu’ils ont montré, pour la première fois, que ces personnes sont aussi moins concernées par l’ (sidenote: Résistance à l’insuline Réponse altérée des cellules à l’action de l’insuline (hormone qui aide le corps à utiliser le sucre comme énergie), l’insulino-résistance se traduit par une mauvaise régulation du taux de sucre dans le sang. Sources :
Inserm. La résistance à l’insuline, une histoire de communication. 2018. 
Centers for disease control and prevention. Diabetes - Resources and Publications -Glossary 
)
, un phénomène qui apparaît de façon très précoce au cours du développement du DT2. Plus concrètement ? Le microbiote a déjà des caractéristiques spécifiques aux stades précoces du développement de la maladie.

Ces résultats particulièrement encourageants apportent une nouvelle pierre à l’édifice dans la compréhension des facteurs impliqués dans le développement de la maladie. Mieux, ils pourraient ouvrir la voie à de nouveaux traitements ciblés, pour des patients toujours plus nombreux.

Sources
  1. OMS. Diabète. 13 avril 2021.
  2. Centers for disease control and prevention. What is Diabetes - Type 1 Diabetes _ November 16, 2021. https://www.cdc.gov/diabetes/basics/type1.html
  3. Centers for disease control and prevention. Wh at is Diabetes - Type 2 Diabetes. November 16, 2021. https://www.cdc.gov/diabetes/basics/type2.html 
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Un risque moindre de diabète en cas de microbiote diversifié ?

Une nouvelle étude rassemblant plus de 2 000 sujets montre que la diversité du microbiote intestinal et l’abondance de 12 taxons producteurs de butyrate sont associés à de moindres risques de diabète de type 2 et d’insulinorésistance.

Diabète de type 2

Si des études ont déjà rapporté des associations entre le microbiote intestinal et le diabète de type 2 (DT2), elles n’ont porté que sur des échantillons limités et les taxons impliqués restent encore sujets à débat (résultats pas toujours reproduits, manque de puissance, etc.). C’est pourquoi des chercheurs ont entrepris une étude d’ampleur, réunissant 2 166 sujets issus de 2 cohortes néerlandaises, sur les associations entre la composition du microbiote intestinal – analysée par amplification et séquençage de l’ARN 16s bactérien présent dans les selles – et le DT2 – cas objectivés par 2 médecins à partir des critères de l’OMS (glycémie, prise de médicament anti-diabète…).

Bien que transversales (i.e. données sur le microbiote et le DT2 recueillies en même temps), les analyses ont été ajustées sur de nombreux facteurs de confusion : apport énergétique, indice de masse corporelle, niveau d’éducation... Autre force et aspect novateur de l’étude : mesurer les associations entre le microbiote et l’insulino-résistance (IR), établie à partir de la glycémie et de l’insulinémie à jeun, un marqueur subclinique signant une étape précoce de la pathogénèse du DT2.

La diversité du microbiote, facteur protecteur ?

Plusieurs index mesurant la (sidenote: Diversité α Une mesure indiquant la diversité d'un échantillon unique, soit le nombre d’espèces différentes présentes chez un individu. Hamady M, Lozupone C, Knight R. Fast UniFrac: facilitating high-throughput phylogenetic analyses of microbial communities including analysis of pyrosequencing and PhyloChip data. ISME J. 2010;4:17-27. https://www.nature.com/articles/ismej200997 )  du microbiote étaient associés à une moindre IR ainsi qu’à une prévalence réduite de DT2. La (sidenote: Diversité β Une mesure indiquant la diversité des espèces entre les échantillons, elle permet d’évaluer la variabilité de la diversité du microbiote entre les sujets. Hamady M, Lozupone C, Knight R. Fast UniFrac: facilitating high-throughput phylogenetic analyses of microbial communities including analysis of pyrosequencing and PhyloChip data. ISME J. 2010;4:17-27. https://www.nature.com/articles/ismej20099 )  était quant à elle associée à l’IR. Enfin, l’abondance de 7 taxons – appartenant aux familles des Christensenellaceae et des Ruminococcaceae ou au genre Marvinbryantia – était associée à un risque réduit d’IR et l’abondance de 5 autres taxons – familles des Clostridiaceae, Peptostreptococcaceae, ou genres Clostridium sensu stricto, Intestinibacter et Romboutsia – à un moindre risque de DT2.

Des taxons producteurs de butyrate qui réduisent les risques de DT2

Ces 12 taxons, dont 10 sont associés pour la première fois à un risque réduit de DT2 ou d’IR, sont connus pour produire du butyrate, un acide gras à chaîne courte issu de la dégradation des fibres alimentaires par les bactéries. Augmentation de l’activité mitochondriale, amélioration du métabolisme énergétique, réduction de l’endotoxémie et de l’inflammation sont autant de mécanismes avancés pour expliquer ses effets. Toutefois, son rôle dans le métabolisme du glucose et la prévention du diabète reste à valider par des études ad hoc.

Ainsi, les associations mises en évidence entre, d’une part, la diversité du microbiote et l’abondance de bactéries produisant du butyrate, et d’autre part, des risques plus faibles d’IR et de DT2, apportent un nouvel éclairage dans l’étude de l’étiologie, de la pathogénèse, et du traitement du DT2.

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Actualités Médecine générale Gastroentérologie

Flore, microbiote, microbiome : faux amis et vrais synonymes

Il est de la langue française comme de la mode. Ce qui était tendance il y a vingt ans ne l’est plus… avant un possible retour de « hype » ! Autrefois fréquemment usité, le terme de flore, sous-entendue intestinale, a progressivement laissé sa place aux microbiotes au pluriel, car ils existent au niveau intestinal mais aussi nasal, buccal, vaginal, cutané... Un mot à ne pas confondre avec le microbiome… Décryptage d’un débat qui n’est pas que sémantique.

Dès lors que l’on plonge dans l’infiniment petit qui peuple notre corps, il est des mots de vocabulaire qui pointent invariablement le bout de leur nez sans forcément être clairement définis… ou utilisés de manière idoine. Quelques définitions s’imposent donc.

De l’ancêtre flore…

Le terme de flore est sans doute le plus ancien. Il se référait d’ailleurs en général au système digestif (on parlait de flore intestinale) et désignait, selon les termes du Larousse médical, l’« ensemble de germes qui existent normalement dans l'intestin ». A cette époque, on pensait que cette flore contenait surtout des bactéries1. Donc lorsque l’on écrivait « flore », on se référait en général à la population bactérienne nichant dans nos entrailles.

… au microbiote contemporain

La science progressant, cette vision de la « flore » s’est avérée bien trop simpliste. D’une part, notre système digestif est loin de n’héberger que des bactéries : y vivent aussi des virus, des champignons (dont les levures), des parasites2….

(et non, le pipi n’est pas stérile !) -pour ne citer qu’eux- disposent chacun d’une « flore »3

Petit à petit, s’est donc imposé un autre terme : celui de « microbiote » qui désigne sans ambiguïté toutes les communautés de micro-organismes (et pas seulement les bactéries). Sachant qu’on lui adjoint toujours un adjectif précisant sa localisation (microbiote cutané, buccal, etc.). Car, évidemment, chacun de ces microbiotes à ses propres caractéristiques en termes de micro-organismes présents.

Et le microbiome ?

Parfois, la différence ne tient qu’à un fil, ou plutôt une lettre. Ainsi, seule une lettre sépare le « microbiote » du « microbiome ». Et pourtant, ces deux termes sont de faux amis. Si le premier désigne la population installée dans une zone spécifique de notre organisme (telles bactéries, tels virus…), le second recouvre une toute autre réalité : le matériel génétique de cette communauté prise dans son ensemble, autrement dit tout ce que ses microorganismes savent faire (produire telles molécules, fabriquer tels types de membranes). Un peu comme si on mettait tous les organismes d’un microbiote dans un mixeur pour oublier chaque individualité et ne considérer que le matériel génétique de cette soupe de micro-organismes. Si l’on devait faire une comparaison avec un village, le microbiote serait la liste des habitants et le microbiome la liste de ce que tous les individus collectivement savent faire (fabriquer du pain, construire une maison…).

Attention, confusions !

Le hic : la langue anglaise utilise souvent sans distinction « microbiote » et « microbiome ». Tant et si bien que certains articles traduits à partir de travaux publiés en anglais confondent les deux termes… Mais désormais, vous voilà armé pour faire la différence.

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Que faut-il retenir? Immunité cutanée

skin microbiota

Une dysbiose cutanée et intestinale, ainsi qu’un dérèglement du système immunitaire, ont été observés au cours du développement de la dermatite atopique, une maladie complexe et multifactorielle8.

2 La dermatite atopique se caractérise par l’activation de lymphocytes de type 2 qui donne lieu à une réponse immunitaire hyperactive et exagérée (9)

INFLAMMATION

La dermatite atopique est une maladie inflammatoire chronique de la peau évoluant par poussées périodiques9. L’inflammation observée est la manifestation d'un dérèglement du système immunitaire9.

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Que faut-il retenir? Immunité respiratoire

Pulmonary Tract Microbiota

L’axe de communication bidirectionnel entre l’intestin et les poumons, appelé « axe intestin-poumon » exerce une influence sur l'état immunitaire des deux organes.

Les microbiotes pulmonaire et intestinal exercent l’un sur l’autre une influence mutuelle et peuvent avoir un impact sur les maladies respiratoires4.

1 Le microbiote intestinal est l’un des facteurs pouvant impacter l’efficacité des vaccins (5)

DYSBIOSE

Les infections respiratoires d’origine virale s’accompagnent d’une dysbiose pulmonaire et intestinale6. Selon la définition la plus courante, une dysbiose est une altération de la composition et du fonctionnement du microbiote provoquée par un ensemble de facteurs environnementaux et individuels qui perturbent l’écosystème microbien7.

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Que faut-il retenir? Immunité intestinale

Le microbiote joue un rôle critique dans le développement et l’éducation des différents éléments des systèmes immunitaires inné et adaptatif de l'hôte. De son côté, le système immunitaire régule le fonctionnement de la symbiose entre hôte et microbiote. Il est essentiel de maintenir l’homéostasie entre le microbiote intestinal et le système immunitaire car certains facteurs déterminants qui interfèrent avec l’établissement du microbiote intestinal du nouveau-né (antibiotiques...) peuvent avoir des conséquences néfastes pour la santé1.

80% Au moins 80 % des cellules productrices d’Ig du corps humain se trouvent dans l’intestin (2)

MUCUS

La couche de mucus intestinal se trouve à l’interface entre l’hôte et le microbiote intestinal. Toute altération de la couche de mucus entraîne une augmentation de la pénétration ou le passage de bactéries potentiellement nocives qui peuvent provoquer une inflammation et une infection3.

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Avis d'expert: Pr. Brigitte Dréno

La dermatite atopique (DA) est une maladie inflammatoire chronique de la peau qui prend la forme de poussées périodiques. Au même titre que l’asthme, le rhum des foins ou la conjonctivite allergique, elle fait partie des maladies allergiques. La DA provoque des lésions rougeâtres et exsudatives à différents endroits de la peau, par exemple dans le pli du coude ou derrière le genou, bien que dans certains cas la maladie puisse également affecter le visage ou le reste du corps. La DA se manifeste généralement au cours de la petite enfance mais peut persister à l’âge adulte. Parmi les causes possibles de cette maladie complexe et multifactorielle, il convient de citer une prédisposition génétique (mutation de la filaggrine, une protéine de la peau), une altération de la barrière cutanée, une dysbiose cutanée et intestinale ou encore un dérèglement du système immunitaire.

La DA affecte entre 15 % et 20 % des enfants et 10 % des adultes dans les pays développés. Le nombre de cas a augmenté considérablement au cours des dernières décennies à cause de la pollution et du contact avec les allergènes1.

Quels sont les facteurs qui déclenchent les poussées inflammatoires ? 

Les poussées inflammatoires peuvent être déclenchées par de multiples facteurs: le stress, la pollution, le froid, l’humidité, certains allergènes (pollen), certains médicaments, les vêtements en laine, ainsi que certains cosmétiques à base de plantes ou d’huiles essentielles.

La dermatite atopique est une maladie complexe et multifactorielle. Parmi ses causes possibles il convient de citer la prédisposition génétique, une altération de la barrière cutanée, une dysbiose cutanée et intestinale ou encore un dérèglement du système immunitaire.

Pr. Brigitte Dréno

Que savons-nous des liens entre la dermatite atopique, le microbiote et l'immunité ?

Sur le plan physiopathologique, la DA se caractérise par une altération de la barrière cutanée, une dysbiose cutanée et intestinale, ainsi qu’un dérèglement du système immunitaire accompagné d’une activation des lymphocytes Th2. Ce dérèglement du système immunitaire entraîne un déferlement de cytokines qui provoque à son tour les réactions inflammatoires2.

Une altération de la barrière cutanée est le point de départ d’une dysbiose du microbiote cutané caractérisée par une réduction de la diversité bactérienne et la prolifération de Staphylococcus aureus. La pénétration des allergènes donne lieu à l’activation des kératinocytes et à la production d’interleukines (IL-33, IL-25, TSLP) ayant pour conséquence la différenciation des lymphocytes Th2. Ceux-ci vont sécréter à leur tour des cytokines pro-inflammatoires (IL-4, IL-5 et IL-13) caractéristiques d’une inflammation de type 2 (Fig 9). Ces cytokines activent directement les nerfs sensoriels, déclenchant ainsi le prurit.

Dans le cas de lésions chroniques, la barrière cutanée se répare mal et s’épaissit sous l’effet de chronique. On observe également une augmentation progressive des cytokines et des lymphocytes Th (Th1, Th2, Th22) qui sécrètent des cytokines contribuant à la destruction des kératinocytes. Enfin, une dysbiose intestinale interviendrait dans le mécanisme physiopathologique de la maladie3

Que vous ont apporté les récentes découvertes sur le microbiote ?  Votre pratique a-t-elle évolué ?

Les récentes découvertes sur le microbiote m’ont amené à mieux saisir l’importance de maintenir ou réparer la barrière cutanée pour contrôler l’inflammation. En cas de traitement systémique, je propose à mes patients d’utiliser du gel nettoyant qui respecte le pH de la peau (pH ~ ~5, éviter les produits ayant un pH basique), d’utiliser une crème hydratante et des produits cosmétologiques adaptés. La recherche aide également à mieux comprendre le système immunologique cutanée qui respecte la biologie de la peau.

Le dérèglement du système immunitaire qui caractérise la dermatite atopique donne lieu à un déferlement de cytokines qui provoque à son tour les réactions inflammatoires2.

Pr. Brigitte Dréno

Que pensez-vous de l'utilsiation de probiotiques pour le traitement de la DA ou la prévention des rechutes ? 

Il existe de nombreuses façons de rééquilibrer le microbiote cutané en cas de DA (probiotiques, prébiotiques, symbiotiques, etc.)5 mais c’est l’approche post-biotique qui me semble être la plus intéressante. Il s’agit d’une préparation de micro-organismes inanimés et/ou de leurs composants qui confère un avantage pour la santé de l'hôte6. Ils peuvent être utilisés pour restaurer la barrière cutanée, ils exercent une action anti-inflammatoire pour permettre aux bactéries de recoloniser : il s’agit donc d’une action de fond sur le microbiote. L’approche des probiotiques ou prébiotiques par voie orale est également intéressante pour réguler le système intestinal, celui-ci étant un immunomodulateur global du système immunitaire7.

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Cibler le microbiote intestinal afin d’optimiser l’efficacité des vaccins ?

Par le Dr Genelle Healey

Photo : Vaccination after antibiotic therapy: effect on immunity and role of the microbiota

Depuis le début de la pandémie de COVID-19, jamais le besoin d’une immunité solide et durable induite par les vaccins n’avait été si évident20. Pourtant, les réponses immunitaires induites par les vaccins sont extrêmement variables d’un individu à un autre et de nombreuses hypothèses concernant les facteurs pouvant altérer l’immunogénicité et l’efficacité des vaccins ont été avancées (Fig 8)21. C’est pourquoi il est important de mieux comprendre les facteurs pouvant impacter l'efficacité des vaccins.

Les réponses immunitaires induites par les vaccins sont extrêmement variables d’un individu à un autre. De nombreuses hypothèses concernant les facteurs pouvant altérer l’immunogénicité et l’efficacité des vaccins ont été avancées. Le microbiote intestinal serait l’un de ces facteurs20.

Le microbiote intestinal serait un des facteurs pouvant impacter l'efficacité des vaccins 21. Certaines signatures du microbiote intestinal (abondance accrue de Actinobacteria, Clostridium cluster XI et Proteobacteria) sont associées à des réponses plus fortes aux vaccins contre d’autres infections virales telles que le VIH et le rotavirus22-26. Par ailleurs, une étude récente indique que la dysbiose intestinale induite par la prise d’antibiotiques provoque une altération des réponses vaccinales contre la grippe, par exemple, une réduction de la neutralisation du virus par les anticorps et la diminution des titres d’anticorps produits en réponse à la vaccination27. Cette étude et d’autres similaires apportent la preuve du rôle important que joue le microbiote intestinal dans l’efficacité des vaccins23,28.

À ce jour, aucune étude ne s’est intéressée à l’impact éventuel du microbiote intestinal sur l’efficacité des vaccins contre le SARS-CoV-2. Les individus présentant une dysbiose intestinale semblent toutefois être exposés à un risque accru de développer des réponses relativement faibles aux vaccins. Les recherches futures visant à déterminer si des signatures spécifiques du microbiote intestinal affectent l’efficacité des vaccins contre le SARS-CoV-2 revêtiront donc une importance capitale.

Sources

20 Lynn DJ, Benson SC, Lynn MA, Pulendran B. Modulation of immune responses to vaccination by the microbiota: implications and potential mechanisms. Nat Rev Immunol. 2021 May 17:1–14.

21 de Jong SE, Olin A, Pulendran B. The Impact of the Microbiome on Immunity to Vaccination in Humans. Cell Host Microbe. 2020 Aug 12;28(2):169-179. 

22 Harris VC, Armah G, Fuentes S, et al. Significant Correlation Between the Infant Gut Microbiome and Rotavirus Vaccine Response in Rural Ghana. J Infect Dis. 2017 Jan 1;215(1):34-41. 

23 Uchiyama R, Chassaing B, Zhang B, et al. Antibiotic treatment suppresses rotavirus infection and enhances specific humoral immunity. J Infect Dis. 2014 Jul 15;210(2):171-82.

24 Huda MN, Lewis Z, Kalanetra KM, et al. Stool microbiota and vaccine responses of infants. Pediatrics. 2014 Aug;134(2):e362-72. 

25 Cram JA, Fiore-Gartland AJ, Srinivasan S, et al. Human gut microbiota is associated with HIV-reactive immunoglobulin at baseline and following HIV vaccination. PLoS One. 2019 Dec 23;14(12):e0225622. 

26 Harris V, Ali A, Fuentes S, et al. Rotavirus vaccine response correlates with the infant gut microbiota composition in Pakistan. Gut Microbes. 2018 Mar 4;9(2):93-101.

27 Hagan T, Cortese M, Rouphael N, et al. Antibiotics-Driven Gut Microbiome Perturbation Alters Immunity to Vaccines in Humans. Cell. 2019 Sep 5;178(6):1313-1328.e13. 

28 Harris VC, Haak BW, Handley SA, et al. Effect of Antibiotic-Mediated Microbiome Modulation on Rotavirus Vaccine Immunogenicity: A Human, Randomized-Control Proof-of-Concept Trial. Cell Host Microbe. 2018 Aug 8;24(2):197-207.e4. 

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L’hypothèse hygiéniste et la pandémie de COVID-19

Par le Dr Genelle Healey

La COVID-19 est une maladie respiratoire extrêmement contagieuse provoquée par le nouveau virus SARS-CoV-2 (coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère) qui affecte principalement l’appareil respiratoire. Cependant, des symptômes digestifs (diarrhée, constipation, nausées) ont également été rapportés chez certains patients14.

Des études préliminaires ont révélé une altération du microbiote intestinal chez les patients atteints de COVID-19 et une corrélation entre sa composition et la sévérité de l’infection, ce qui semble mettre en évidence un dialogue entre le microbiote intestinal et les poumons en réponse à l’infection au SARS-CoV-215.

Au cours des dernières décennies, la diversité microbienne a diminué considérablement et des microbes ancestraux se sont éteints en raison des progrès de l’hygiène (comme le lavage des mains et l'utilisation de désinfectant), des nouveaux médicaments (comme les antibiotiques) et du mode de vie urbain17.

Les modifications du mode de vie adoptées afin de freiner la pandémie de COVID-19 pourraient également avoir un impact négatif sur le microbiote intestinal des individus non infectés16.

Ces nouvelles tendances hygiénistes et l’augmentation de l’incidence de différentes maladies auto-immunes et allergiques18,19 ont donné naissance à l’hypothèse d’un lien causal entre les deux phénomènes (hypothèse hygiéniste). Notamment, certaines pratiques mises en oeuvre pour limiter la propagation de la COVID-19, comme la distanciation physique, le lavage de mains fréquent, l’utilisation de désinfectant, les restrictions à la mobilité et le port du masque provoqueront probablement la disparition d’autres bactéries intestinales essentielles16.

Les gestes barrières mis en place pour lutter contre la COVID-19 peuvent impacter le microbiote intestinal et entrainer des effets à long terme sur la santé, notamment chez les enfants nés juste avant la pandémie ou au cours de celle-ci16. Le recours à des approches dont on sait qu’elles stimulent la diversité microbienne et contribuent à un équilibre sain du microbiote pourrait empêcher les impacts négatifs sur la santé associés aux mesures d’hygiène renforcées mises en place pour éviter la propagation de la COVID-19.

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L'axe intestin-poumons dans les infections respiratoires virales

Par le Dr Genelle Healey

La composition des microbiotes intestinal et pulmonaire semblent être perturbées au cours des infections respiratoires, ce qui renforce la théorie selon laquelle tous les sites muqueux sont connectés et que l’axe intestin-poumon est bidirectionnel1. Les bactéries intestinales, leurs fragments, ainsi que les AGCC, traverseraient la barrière intestinale et remonteraient le système lymphatique mésentérique pour atteindre la circulation générale et moduler les cellules immunitaires pulmonaires11. Lors d’une infection grippale, le fonctionnement du microbiote pulmonaire et du système immunitaire est altéré, et l’on observe également une dysbiose intestinale qui expliquerait les symptômes associés semblables à ceux de la gastroentérite (Fig 7A)10.

Les probiotiques peuvent être utiles lors du rétablissement après une infection (microbiote à l'équilibre, contrôle de l’infection, modulation des réponses immunitaires) par le biais des métabolites du microbiote intestinal (AGCC…) ou de produits dérivés de l’hôte.

La dysbiose intestinale peut avoir plusieurs causes probables telles que le manque d’appétit (qui provoque une diminution de l’apport d’aliments et de calories) et la libération de cytokines inflammatoires. Cela peut avoir des conséquences locales – inflammation intestinale, altération de la barrière intestinale, diminution de la production de peptides antimicrobiens (AMP), baisse des taux d’AGCC – pouvant donner lieu à une infection intestinale secondaire10.

L’altération de la barrière intestinale favorise la translocation bactérienne et la libération d’endotoxines dans le sang, ce qui a pour conséquences une inflammation systémique, une aggravation des lésions pulmonaires et une augmentation du risque d’infection bactérienne secondaire10. La baisse de la production d’AGCC par le microbiote intestinal contribue également à la diminution de l’immunité antibactérienne au niveau des poumons10. Cela souligne le rôle essentiel que joue le microbiote intestinal dans la défense des poumons contre les infections respiratoires.

L’utilisation de probiotiques - qui sont des stratégies qui modulent le microbiote intestinal-  peut contribuer à réduire la susceptibilité aux infections respiratoires par le biais de l’axe intestin-poumon ou faciliter le rétablissement après une infection (Fig 7B). Plusieurs études menées chez la souris montrent que la prise de probiotiques spécifiques avant une infection grippale réduirait l’accumulation de cellules immunitaires dans les poumons infectés. Ces probiotiques amélioreraient également la clairance virale et l’état de santé général tout en réduisant les altérations du microbiote intestinal12,13.

Recommandé par notre communauté

"Eh bien, je fais partie des personnes ayant un problème pulmonaire (infection). Je comprends à quel point c'est important."  -@Ahishakiyejanv2 (De Biocodex Microbiota Institute sur X)

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