La consommation de jus de fruits et légumes en cure de détox ou pour compléter une alimentation trop pauvre en végétaux aurait des effets plutôt néfastes sur la santé de notre microbiote buccal et intestinal, selon une nouvelle étude.
En matière de nutrition, les jus de fruits et légumes, apportent leur boost de vitamines, de minéraux et d’antioxydants. Mais pour les « cures de jus détox » ou pour atteindre les « 5 fruits et légumes par jour », ce ne serait pas la meilleure option, si on en croit les résultats d’un essai clinique publié dans la revue Nutrients. 1
Les auteurs ont soumis 14 étudiants à trois types de régimes durant trois jours :
cinq ont suivi une alimentation exclusivement basée sur des jus de fruits et légumes pressés à froid (8 à 900 kcal/jour, soit environ 10 verres par jour) ;
quatre ont suivi une alimentation « normale » accompagnée de jus de fruits et légumes ;
cinq ont suivi une alimentation hypocalorique riche en végétaux « entiers » contenant les fibres (8 à 900 kcal).
Avant d’entamer leurs régimes respectifs, les participants ont tous suivi 3 journées de « régime d’élimination » composé de fruits bio, légumes, céréales complètes, œufs, sans ou avec très peu de viande rouge, produits laitiers, produits transformés, gluten, alcool, café et sucre, afin d’évaluer l’influence des différents aliments sur la composition microbienne.
Pour analyser l’impact des différents régimes sur les microorganismes des microbiotes intestinal, buccal et salivaire des volontaires, les chercheurs ont recueilli leurs selles, leur salive et des prélèvements de l’intérieur des joues, avant l’expérimentation, entre les deux régimes et après.
Les résultats montrent que les jus de fruits et légumes, qu’ils soient consommés de manière exclusive ou avec des aliments, modifient significativement le microbiote buccal en augmentant les bactéries pro-inflammatoires, même si les changements sont transitoires.
Les chercheurs notent une réduction des Veillonellaceae, une bactérie capable de transformer les nitrates salivaires en nitrites. Le problème c’est que moins de nitrites, c’est une moins bonne inhibition des bactéries responsables de la parodontite et une augmentation du risque de carie.
Côté microbiote intestinal, l’impact des jus était moins marqué, mais les chercheurs notent une augmentation de bactéries associées à l’inflammation, à la perméabilité intestinale et au déclin cognitif.
Pour les auteurs, par rapport aux fruits et légumes entiers, les jus sont plus riches en sucre et en glucides et plus pauvres en fibres, ce qui impacte négativement la flore microbienne autant buccale qu’intestinale.
Fruits et légumes : des bénéfices à gogo ¹ ²
• En abaissant les pics de glycémies et en favorisant la satiété et le maintien du poids, les fruits et légumes contribuent à lutter contre le diabète et le surpoids.
• Leurs composés phénoliques favorisent la sensibilité à l’insuline et la dégradation des graisses corporelles.
• Leurs polyphénols améliorent la diversité des microorganismes intestinaux.
• Leurs fibres est une source d’énergie pour les bactéries du microbiote et un substrat pour la production d’acides gras favorables au métabolisme, l'immunité et la santé.
C’est en effet le régime d’élimination qui a eu le plus d’impact positif sur le microbiote intestinal : en apportant davantage de fibres, il a favorisé la prolifération des bactéries productrices des précieux (sidenote:
Acides Gras à Chaîne Courte (AGCC)
Les acides gras à chaîne courte sont une source d’énergie (carburant) des cellules de l’individu, ils interagissent avec le système immunitaire et sont impliqués dans la communication entre l’intestin et le cerveau.
Silva YP, Bernardi A, Frozza RL. The Role of Short-Chain Fatty Acids From Gut Microbiota in Gut-Brain Communication. Front Endocrinol (Lausanne). 2020;11:25.) (AGCC), comme le butyrate.
Même si la portée de cette étude est limitée en raison de sa petite taille et de sa courte durée, elle confirme que, pour la santé du microbiote, la priorité serait de manger des fruits et légumes entiers afin de bénéficer pleinement de leurs fibres.
Une étude d’avant-garde sur l’adénocarcinome du côlon révèle l’influence du métabolisme des acides gras, du microbiote intratumoral et du micro-environnement tumoral sur les résultats des patients, ouvrant la voie à des innovations pilotées par l’IA pour le diagnostic du cancer.
Le cancer du côlon se caractérise par une dynamique intratumorale complexe à laquelle participent le microbiote, (sidenote:
Métabolisme des acides gras
Processus cellulaire impliqué dans la décomposition et la synthèse des graisses, qui exerce une influence sur la croissance et la progression des tumeurs.
), et le (sidenote:
Micro-environnement tumoral
Milieu environnant d’une tumeur, y compris les cellules immunitaires, les vaisseaux sanguins et les molécules de signalisation ayant un impact sur le développement du cancer.
). Une étude récente1 s'est penchée sur le rôle encore méconnu de ce trio dans (sidenote:
Adénocarcinome du côlon (ADCO)
Type de cancer du côlon dont l’origine se situe au niveau des cellules glandulaires du côlon.
). En s'appuyant sur les données d’une vaste cohorte de patients provenant de The Cancer Genome Atlas (TCGA) et en appliquant des techniques sophistiquées de bioinformatique et d’analyse d’images pathologiques, les scientifiques se sont mis en quête de nouvelles pistes diagnostiques et thérapeutiques pour ce cancer agressif.
L’équipe de scientifiques a commencé par analyser les données complètes de 420 patients atteints d’un ADCO. L’une des étapes essentielles de la méthode utilisée a consisté à classer ces patients en deux sous-groupes distincts :
Ayant une forte capacité (groupe FAM_high).
Une faible capacité (groupe FAM-low) à métaboliser les acides gras.
Cette stratification a été effectuée sur la base du score (sidenote:
Gene Set Variation Analysis (GSVA, Analyse des variations d’un ensemble de gènes)
Méthode informatique permettant de déterminer l’activité de voies génétiques spécifiques dans des échantillons provenant de malades, et utilisée comme aide au sous-typage métabolique et au diagnostic.
) calculé pour les gènes du métabolisme des acides gras.
À la grande surprise des chercheurs, bien que la diversité alpha globale du microbiote (une mesure de la diversité intra-échantillon) semble similaire entre les deux groupes, une analyse approfondie de la diversité bêta microbienne (une mesure de la diversité inter-échantillon) a révélé des compositions bactériennes clairement distinctes et étroitement corrélées aux profils métaboliques sous-jacents.
Les chercheurs ont observé que certains types spécifiques de bactéries intestinales sont impliqués dans la modulation de l'environnement tumoral. L’étude a notamment permis d’identifier un ensemble de genres bactériens spécifiques, parmi lesquels Desulfovibrio, Desulfococcus, Streptococcus et Mycobacterium, qui étaient significativement plus abondants dans le groupe de patients FAM_high, ce qui démontre clairement l’existence d’un lien entre le (sidenote:
Microbiote intratumoral
Communauté de micro-organismes présents dans la tumeur, qui peut affecter le comportement de celle-ci et le pronostic du patient.
) et le métabolisme de l’hôte. Cette stratification métabolique a également prouvé son intérêt pour le pronostic des patients.
En effet, les chercheurs ont observé que les patients du groupe FAM_low avaient une survie globale (SG) significativement meilleure que leurs homologues du groupe FAM_high. L’identification de quatre gènes spécifiques (ADIPOR2, HAO2, ALAD, HPGD) dont les niveaux d’expression montraient une corrélation significative avec la survie des patients a permis de confirmer le rôle critique du métabolisme des acides gras dans le pronostic de l’ADCO.
Des signatures métaboliques utilisées comme outils de prédiction
Au-delà du diagnostic et du pronostic, l’analyse complète de la sensibilité aux médicaments réalisée dans le cadre de l’étude a mis en évidence des différences considérables et potentiellement exploitables au niveau clinique dans la manière dont les deux sous-types définis par le métabolisme des acides gras réagissent à un large éventail d’agents thérapeutiques.
En calculant les valeurs de CI50 (concentration de médicament nécessaire pour inhiber 50 % des cellules) d’un ensemble très large de 195 candidats-médicaments, les chercheurs ont découvert que les groupes FAM_high et FAM_low présentaient des sensibilités significativement différentes à 120 de ces molécules, soit un nombre tout à fait remarquable. Par exemple, le groupe FAM_high présente une sensibilité réduite à des médicaments comme le JQ1, ce qui suggère que ces agents pourraient être moins efficaces dans ce contexte métabolique. De telles informations pourraient contribuer à la mise au point de stratégies plus personnalisées dans le traitement du cancer.
L’imagerie au service du diagnostic
Mais le résultat le plus important de cette étude est sans doute d’avoir montré que l’imagerie anatomopathologique courante est capable de refléter les différents types sous-jacents de métabolisme des acides gras. Certaines caractéristiques distinctives en matière de texture sont en corrélation avec les scores de métabolisme des acides gras et les signatures microbiennes, et des différences significatives ont été observées entre les groupes FAM_high et FAM_low. On peut s’attendre à ce que des modèles d’IA soient bientôt capables d’effectuer des analyses histologiques afin de détecter les signatures bactériennes et de déterminer le type de métabolisme des tumeurs en temps réel.
Cette étude apporte un éclairage intéressant sur l’étroite relation qui existe entre l’intestin et l'environnement tumoral dans la progression de l’ADCO. La possibilité d’un sous-typage métabolique non invasif offerte par l’analyse d'images pilotée par l’IA constitue une avancée particulièrement prometteuse pour de futures applications cliniques à grande échelle. Une meilleure compréhension des interactions entre les bactéries intestinales et les cellules tumorales sera essentielle pour permettre de nouvelles avancées thérapeutiques à l’avenir.
Combien de patients souffrant d'une gêne persistante des voies digestives supérieures voyez-vous chaque semaine ? Combien d'entre eux ne sont pas diagnostiqués comme souffrant de dyspepsie fonctionnelle (DF) ?
La dyspepsie fonctionnelle (DF) touche environ 7 % des adultes3, mais elle est souvent mal diagnostiquée en raison d'un doublon de symptômes avec ceux du reflux, de la gastroparésie et du syndrome de l'intestin irritable. En tant que trouble de l'interaction entre l'intestin et le cerveau, elle implique une altération de la motilité, des déséquilibres du microbiote et des facteurs psychologiques, ce qui rend le diagnostic difficile.
Prof. Maura Corsetti, Prof. Nicholas Talley et Prof. Lucas Wauters, en collaboration avec le Biocodex Microbiota Institut, ont mis au point une "checklist" pour le diagnostic de la dyspepsie fonctionnelle. Cet outil permet un diagnostic plus précis et une communication plus claire avec le patient, améliorant ainsi la prise en charge et les soins.
Souvent appelée indigestion, c'est un trouble courant de l'interaction entre l'intestin et le cerveau (DGBI) caractérisé par des symptômes persistants dans la partie supérieure de l'abdomen, sans qu'il y ait de preuve d'une maladie structurelle.
La dyspepsie fonctionnelle est un trouble chronique et rémittent provenant de la région gastroduodénale supérieure, caractérisé par un ou plusieurs des symptômes suivants2 :
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DOULEUR EPIGASTRIQUE
« J’ai l’impression qu’on me poignarde de l’intérieur. »
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BRULURE EPIGASTRIQUE
« Mon estomac me brûle comme s’il était en feu »
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SATIETE PRECOCE
(incapacité à finir un repas)
« Je me sens rassasié même quand je mange peu. »
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PLENITUDE POSTPRANDIALE
(après un repas normal)
« J’ai l’impression d’avoir un poids dans l’estomac. »
La dyspepsie fonctionnelle est trouble de l'interaction entre l'intestin et le cerveau (DGBI) très répandu selon les critères stricts de Rome IV :
7% de la population mondiale
est touchée par la dyspepsie fonctionnelle
Toutefois, la prévalence varie selon la zone géographique et les critères d’évaluation utilisés.
La dyspepsie fonctionnelle est légèrement plus fréquente chez les femmesque chez les hommes et peut toucher des personnes de tous âges. Elle est souvent sous-diagnostiquée, car les symptômes peuvent se chevaucher avec d'autres troubles gastro-intestinaux tels que le reflux gastro-œsophagien (RGO) et le syndrome de l'intestin irritable (SII). Malgré sa forte prévalence, la dyspepsie fonctionnelle reste une affection difficile à prendre en charge en raison de sa physiopathologie complexe et multifactorielle.
L’estomac et l’intestin parlent au cerveau, et le cerveau parle à l’intestin.
Un trouble de l’interaction intestin-cerveau ou trouble fonctionnel intestinal (TFI)1 signifie que la communication entre les deux organes est perturbée, ce qui entraîne des symptômes. L’un des exemples de TFI le plus fréquent est la dyspepsie fonctionnelle (DF).
Dans le cas de la DF, le cerveau reçoit trop de signaux de l'estomac, qui sont normalement filtrés.
Que dire à propos de la dyspepsie fonctionnelle ?
Une sensation de plénitude récurrente (souvent appelée ballonnements), des douleurs ou brûlures épigastriques et des difficultés à terminer un repas normal (satiété précoce) caractérisent ce trouble symptomatique appelé DF.
La DF correspond à un trouble de l’interaction intestin-cerveau. Ces deux organes ne communiquent pas correctement l’un avec l’autre.
La DF est une maladie basée sur les symptômes, sans atteinte tissulaire.
Les symptômes gastro-intestinaux ne surviennent pas seuls ; la DF est souvent accompagnée d’une forte détresse psychologique, comme l’anxiété, le stress ou la dépression.
Le SDP: Syndrome de détresse postprandiale, qui est la forme la plus courante
Ces deux sous-types de dyspepsie se chevauchent parfois
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Explications
En l'absence de biomarqueur, le diagnostic repose sur des critères symptomatiques dont les critères de Rome IV sont les plus récents et les mieux validés. Les critères de Rome VI classent les patients en deux sous-groupes de dyspepsie fonctionnelle :
- Le syndrome de détresse postprandiale (SDP), caractérisé par des symptômes liés à la prise de repas,
- le syndrome douloureux épigastrique (SPE), qui se réfère à une douleur épigastrique ou à une brûlure épigastrique qui ne survient pas exclusivement en période postprandiale et qui peut même être améliorée par l'ingestion d'un repas.
Bien que les mécanismes physiopathologiques précis qui sous-tendent la dyspepsie fonctionnelle ne soient pas encore totalement compris et que l'étiologie précise de ce trouble reste difficile à cerner, des données récentes ont permis d'identifier les mécanismes physiopathologiques suivants1 :
Facteurs psychologiques : altération de l'interaction entre l'intestin et le cerveau : le stress et l'anxiété influencent la fonction intestinale et peuvent exacerber les symptômes.
Hypersensibilité et dysmotilité de l'estomac : sensibilité accrue des neurones sensoriels de l'estomac et du duodénum entraînant une douleur et une gêne exagérées en réponse à des stimuli normaux ; perturbations de la motilité gastrique, telles qu'un retard de la vidange gastrique et une altération de l'accommodation du fundus.
Activation immunitaire intestinale : l'inflammation de bas grade, en particulier l'augmentation des mastocytes et des éosinophiles dans le duodénum, contribue aux symptômes.
Altération de la barrière intestinale : une barrière intestinale perturbée permet aux antigènes alimentaires et aux produits microbiens de pénétrer dans la muqueuse, ce qui peut déclencher une activation immunitaire.
Altération du microbiote duodénal : les modifications du microbiote intestinal peuvent contribuer à l'activation immunitaire, à l'hypersensibilité viscérale et à l'altération de la motilité.
Ces mécanismes interagissent de manière complexe, ce qui fait de la dyspepsie fonctionnelle un trouble à multiples facettes nécessitant une approche personnalisée du traitement.
Que dire à vos patients ?
Qu’est-ce que le microbiote ?
On appelle microbiote les communautés microbiennes qui vivent à l’intérieur de l’intestin.
Un déséquilibre au sein du microbiote duodénal, appelé dysbiose, désigne la modification de la composition et des fonctions des micro-organismes vivant dans l’intestin.
Des aliments, des bactéries ou des substances se trouvant dans l’intestin peuvent parfois engendrer un dysfonctionnement de cet organe et déclencher des symptômes.
What is the management of Functional Dyspepsia ?
Functional Dyspepsia is a chronic disorder where symptoms can be managed through lifestyle changes, dietary therapy, medications and psychological therapies.
We will meet every 2-3 months to follow up the effectiveness of the treatment/strategy.
Comment poser un diagnostic sûr ?
Le diagnostic est basé sur les symptômes, conformément aux critères de Rome2:
Quand les symptômes ont-ils commencé ?
Présence d’au moins un symptôme suffisamment grave pour impacter les activités du quotidien au cours des 3 derniers mois et au moins pendant 6 mois avant le diagnostic
et aucune preuve de maladie structurelle (y compris après une endoscopie digestive haute) pouvant expliquer les symptômes.
Utiliser certains antidouleurs comme l’aspirine et l’ibuprofène"
Fumer
Anxiété ou dépression
Antécédents d’abus physiques ou sexuels durant l’enfance3
Liste des signes d'alarme à éliminer pour aider à confirmer le diagnostic
Liste des signes d'alarme à éliminer pour aider à confirmer le diagnostic
Survenue d’une dyspepsie à > 55 ans*
Preuve d’une hémorragie gastro-intestinale, dont méléna ou hématémèse
Dysphagie, en particulier si elle est progressive, ou odynophagie
Vomissements persistants
Perte de poids non intentionnelle
Antécédents familiaux de cancer gastrique ou de l’œsophage
Masse abdominale ou épigastrique palpable ou adénopathie anormale
Preuve d’une anémie par carence en fer après une analyse de sang5
*Dans les régions présentant un taux de prévalence élevé pour le cancer gastrique, comme l’Asie du Sud-Est, il convient d’abaisser la limite d’âge.
En cas de OUI, envisager des examens complémentaires
Adresser le patient à un gastro-entérologue pour évaluation
Quels sont les examents nécessaires ?
Recommandés en tant qu'examens de routine:
Test pour H. pylori recommandé en priorité : recherche d’antigène dans les selles, test respiratoire à l’urée
Évaluation des symptômes affectant la partie basse du tube digestif, car le SII et la DF se chevauchent souvent ; dans ce cas essentiel pour exclure la maladie cœliaque
Analyse des antécédents de consommation de drogue (en particulier les opiacés et le cannabis)
A envisager pour les cas spécifiques:
Endoscopie pour les patients constatant la survenue récente de symptômes et une perte de poids, et ceux de plus de 55 ans ; une biopsie doit être réalisée si le statut de H. pylori est inconnu au moment de l’endoscopie
Vidange gastrique (scintigraphie préférable) en cas de nausées/vomissements
Inutiles en tant qu'examens de routine:
Analyse de sang
Prise en charge
La prise en charge de la dyspepsie fonctionnelle suit une approche multi-facettes visant à soulager les symptômes et à améliorer la qualité de vie.3,6,7
Quels principes généraux de prise en charge ?
1- Mode de vie
Des modifications du mode de vie comme:
Des ajustements alimentaires pour limiter l'ingestion de déclencheurs alimentaires potentiels (caféine, aliments épicés...
Une activité physique régulière
De bonnes habitudes de sommeil
La prise de probiotiques
pourraient contribuer à réduire les symptômes.
2- Traitement médicamenteux
Une approche médicamenteuse est privilégiée avec des suppresseurs d'acidité (inhibiteurs de la pompe à protons, IPP couramment utilisés) et des prokinétiques.
3- Neuromodulateurs
Les neuromodulateurs, tels que les antidépresseurs tricycliques, sont utilisés pour moduler l'hypersensibilité viscérale, modifier la perception de la douleur et améliorer les symptômes dans les cas réfractaires.
4- Thérapie cognitivo-comportementale, hypnothérapie, gestion du stress
La thérapie cognitivo-comportementale, l'hypnothérapie et la gestion du stress pourraient jouer un rôle clé dans le contrôle des symptômes à long terme.
Que dire à vos patients ?
Questions les plus fréquentes sur la Dyspepsie Fonctionnelle
Vais-je guérir ? Est-ce chronique/à vie ?
La DF peut être traitée, mais pas guérie. Un rétablissement est possible.
Suis-je susceptible de développer un cancer ?
La DF n’augmente pas le risque de développer un cancer.
Qu’est-ce qui provoque une DF ?
La DF est un trouble plurifactoriel causé par une altération de la sensibilité de l’intestin, de la motilité, du microbiote et de l’interaction intestin-cerveau.
L’alimentation peut-elle réduire les symptômes ?
L’alimentation joue un rôle et constitue un véritable allié.
Boire de l'eau aide-t-il à lutter contre la dyspepsie ?
L’eau n’améliore pas la DF.
Puis-je mourir d’une DF ?
La DF n’augmente pas le risque de décès
A quelle fréquence réaliser le suivi ?
Le suivi dépend de la réponse au traitement (beaucoup de non-répondeurs)
Un intervalle de 2 à 3 mois est conseillé pour le suivi ; augmenter l’intervalle en cas de réponse au traitement.
Nous ne sommes pas tous égaux devant les additifs. Et cette sensibilité variable selon les individus semble en grande partie reposer sur notre microbiote intestinal. Avec à la clé, la possibilité de prédire qui est sensible ou non, à partir d’une simple analyse des selles ?
Les (sidenote:
Additifs alimentaires
Substances principalement ajoutées aux aliments transformés ou à d’autres aliments produits à l’échelle industrielle, à des fins techniques, par exemple pour améliorer la sécurité, augmenter la durée de conservation ou modifier les propriétés sensorielles des aliments.
Source: World Health Organization), s’ils améliorent la texture ou la durée de conservation de nombreux aliments, soulèvent des interrogations quant à la santé. Certains sont en effet soupçonnés de favoriser des maladies inflammatoires chroniques en agissant directement sur notre microbiote intestinal.
Néanmoins, les effets seraient très variables d’un individu à l’autre, selon un précédent essai randomisé contrôlé chez l’homme (étude FRESH, acronyme de Functional Research on Emulsifiers in Humans). L’additif alors utilisé : la (sidenote:
Carboxyméthyl-cellulose sodique
Le Carboxyméthyl-cellulose sodique (ou Gomme cellulosique, E 466) est un additif alimentaire dont les propriétés fonctionnelles sont multiples : affermissant, agent d’enrobage, agent de charge, émulsifiant, épaississant, gélifiant, humectant, stabilisant… Son usage est autorisé dans de très nombreux produits, des produits laitiers (crèmes, fromage frais ou fondu, desserts lactés…) aux poissons cuits, des glaces aux légumes séchés ou en conserve, des confiseries aux céréales du petit-déjeuner, de certaines viandes ou poissons aux moutardes et potages, des amuse-gueules à la bière ou certains spiritueux…
Source : Food and Agriculture Organization of the United Nations) (ou E466).
Comment expliquer voire prédire cette sensibilité ? L’équipe 1 a poursuivi ses précédents travaux en faisant le pari du microbiote. Leur démonstration, réalisée in vitro, a reposé sur un mini réacteur de laboratoire capable de mimer le microbiote intestinal humain.
2 500
Plus de 2 500 additifs alimentaires, ainsi qu’une quarantaine de contaminants et toxiques naturels et les résidus de quelque 90 médicaments vétérinaires, ont été évalués par le Comité d'experts FAO/OMS sur les additifs alimentaires (JECFA). ²
Le réacteur prédit la sensibilité ou la résistance
Lorsque les chercheurs exposent, dans le bioréacteur, les microbiotes prélevés chez les volontaires de l’étude FRESH à la carbométhylcellulose, ils retrouvent la même différence de sensibilité que celle observée in vivo dans l’essai FRESH : les microbiotes des 2 mêmes individus, sur les 7 volontaires exposés au E466, sont perturbés lorsqu’on les expose à l’émulsifiant.
Autrement dit, le micro-réacteur reproduit fidèlement les variations inter-individuelles observées lors de l’essai FRESH et permet donc de prédire si un microbiote donné est sensible au E466, sans qu'il soit nécessaire de réaliser des études in vivo.
Une transplantation de flore transmet la sensibilité à des souris
Pour confirmer que cette flore intestinale était responsable de l’inflammation intestinale observée chez certains sujets de l’essai FRESH exposés au E466, les microbiotes de 2 individus « sensibles » au E466 et de 2 individus non sensibles ont été transplantés à des souris dénuées de flore.
Seules les souris ayant reçu la flore « sensible » et exposées à l’additif développaient une inflammation intestinale et une colite sévère :
raccourcissement du côlon
dommages sur la muqueuse
infiltration de macrophages
Certaines bactéries, dont Adlercreutzia equolifaciens et Frisingicoccus caecimuris allaient de pair avec cette inflammation.
Une signature ?
Restait à savoir si une signature (sidenote:
Métagénomique
Méthode d'étude du contenu génétique d'échantillons issus d'environnements complexes (intestin, océan, sols, air, etc.) prélevés dans la nature (par opposition à des échantillons cultivés en laboratoire). Cette approche permet une description des gènes qui sont contenus dans l'échantillon, mais aussi un aperçu du potentiel fonctionnel d'un environnement.
Source : Riesenfeld CS, Schloss PD, Handelsman J. Metagenomics: genomic analysis of microbial communities. Annu Rev Genet. 2004;38:525-52. ) des selles aurait pu permettre de prévoir le résultat. L’entrainement d’un algorithme (avec les selles des 7 volontaires FRESH ayant consommé du E466) identifie 78 marqueurs fonctionnels de la sensibilité.
Certes, cette signature permet de prédire quels individus parmi les témoins de la même étude (non exposés au E466) sont sensibles au E466. Cependant, son application dans d’autres cohortes n’a pas été concluante.
Dans l’attente d’une éventuelle signature, cette étude souligne de nouveaux liens entre microbiote intestinal et alimentation saine. Et la nécessité de réduire les produits ultra-transformés, qui comme certains édulcorants, semblent mettre à mal la santé du microbiote intestinal.
Nous ne sommes pas tous égaux devant les additifs. Les travaux de chercheurs de l’Institut Pasteur sur l’additif E466, un émulsifiant très courant ajouté à certains aliments, montrent que cette sensibilité variable selon les individus dépendrait de notre microbiote intestinal.
Émulsifiants, texturants, conservateurs, colorants,… : les (sidenote:
Additifs alimentaires
Substances principalement ajoutées aux aliments transformés ou à d’autres aliments produits à l’échelle industrielle, à des fins techniques, par exemple pour améliorer la sécurité, augmenter la durée de conservation ou modifier les propriétés sensorielles des aliments.
Source: World Health Organization), très courants dans les produits ultra-transformés, ont envahi nos placards. Parmi eux, le E466, ou (sidenote:
Carboxyméthyl-cellulose sodique
Le Carboxyméthyl-cellulose sodique (ou Gomme cellulosique, E 466) est un additif alimentaire dont les propriétés fonctionnelles sont multiples : affermissant, agent d’enrobage, agent de charge, émulsifiant, épaississant, gélifiant, humectant, stabilisant… Son usage est autorisé dans de très nombreux produits, des produits laitiers (crèmes, fromage frais ou fondu, desserts lactés…) aux poissons cuits, des glaces aux légumes séchés ou en conserve, des confiseries aux céréales du petit-déjeuner, de certaines viandes ou poissons aux moutardes et potages, des amuse-gueules à la bière ou certains spiritueux…
Source : Food and Agriculture Organization of the United Nations), notamment utilisé dans les glaces et brioches industrielles. Le problème : plusieurs travaux ont alerté quant à son potentiel effet néfaste sur notre santé intestinale et métabolique.
Une étude récente 1 souligne également que la composition du microbiote pourrait être modifiée par la consommation répétée de ce type d’émulsifiants. Lors d’un essai clinique précédemment mené sur des volontaires sains (7 consommant du E466, et 9 témoins n’en consommant pas, pour comparer), des chercheurs avaient montré que nous ne sommes pas tous égaux face à cet additif : certaines personnes sont sensibles et leur microbiote intestinal est chamboulé, d’autres résistent et leur flore reste de marbre.
Comment expliquer cette différence ? Par la composition microbiennes au sein de l'intestinal, répondent les derniers travaux des mêmes chercheurs. Autrement dit, votre flore prédit si vous êtes l'un des chanceux qui digèrent sans souci des brioches industrielles moelleuses… ou si vous faites partie des personnes qui réagissent mal à l’E466 !
Pour comprendre ces différences, les chercheurs ont utilisé un mini réacteur de laboratoire capable de mimer le microbiote humain et de tester in vitro l’effet du E466 sur différents microbiotes… en l’occurrence les selles des 7 volontaires de l’étude précédente. Et cela fonctionne ! Seules les selles des patients sensibles hyper-réagissent à l’émulsifiant alimentaire l’E466, permettant d’identifier les patients sensibles. Cette nouvelle approche pourrait à terme permettre d’anticiper la réponse du microbiote à certains émulsifiants.
Plus fort encore : la sensibilité aux effets du E466 s’avère transmissible à des souris, via des transplantations de microbiote fécale. Les flores issues de volontaires sensibles au E466 provoquent une colite sévère chez les animaux consommant l’émulsifiant, , illustrant de possibles conséquences directes sur la santé. Ces résultats montrent aussi à quel point les bactéries de notre microbiote peuvent jouer un rôle actif dans la réponse inflammatoire à certains additifs.
Une signature à affiner
Restait à savoir si l’analyse du seul ADN du cocktail de bactéries des selles suffitre à prédire la sensibilité au E466. Les chercheurs ont entraîné un algorithme à repérer des différences entre l’ADN des selles des volontaires sensibles et non-sensibles. Résultat : 78 marqueurs recensés. Ces marqueurs bactériens, présents dans le microbiote de certains individus, pourraient prédire la sensibilité aux émulsifiants. Mais cette signature n’est pas encore parfaite : elle fonctionne dans la cohorte de l’essai clinique mais son application à des sujets issus d’autres études n’a pas donné les résultats escomptés. De nouvelles études sont nécessaires pour valider cette signature dans des populations plus larges.
Dans l’attente d’une signature universelle qui pourrait faciliter le dépistage, et donc éviter des troubles intestinaux chez les personnes sensibles, peut-être est-il temps de se mettre au fait maison… d’autant que les additifs sont également mis en cause dans des troubles du comportement. Sans parler des microplastiques des barquettes des plats tout prêts. On ne le dira jamais assez : l’alimentation est notre première médecine ! Et une consommation plus raisonnée, avec des produits bruts, limiterait aussi l’exposition aux émulsifiants.
Les bactéries du microbiote sont donc bien plus qu’un simple reflet de notre alimentation : elles en sont aussi les actrices principales. Cette étude ouvre la voie vers une nutrition personnalisée, en fonction de la composition de notre microbiote, et pourrait contribuer à mieux prévenir certains désordres liés à la consommation répétée d’aliments ultra-transformés contenant des émulsifiants.
Un groupe de 69 experts mondiaux parvient à un nouveau consensus qui redéfinit les règles applicables aux tests du microbiote en mettant l'accent sur une surveillance rigoureuse, une méthodologie exhaustive et des données essentielles sur les patients permettant aux médecins traitants d’obtenir des réponses fiables concernant la santé intestinale.
Au cours des dernières années, l'idée d'utiliser le microbiote intestinal comme outil de diagnostic a stimulé l'imagination de la communauté médicale. Pourtant, malgré l’intérêt croissant qu’ils suscitent, il n’a toujours pas été démontré que les tests du microbiote produisent un quelconque bénéfice clinique.
Un rapport 1 de consensus international publié récemment tente de faire la lumière sur cette question importante. Menée par 69 experts originaires de 18 pays, l'initiative a pour but de définir un cadre clair, fondé sur des données probantes, pouvant servir de guide aux médecins traitants et aux laboratoires souhaitant normaliser leurs pratiques en matière de tests du microbiote.
69
experts
18
pays
Un groupe d’experts idéalement constitué
Le groupe, composé de médecins, de microbiologistes, d'écologistes microbiens, de biologistes informatiques et de bioinformaticiens, a appliqué la (sidenote:
Méthode de Delphes (ou méthode Delphi)
processus structuré permettant d'aboutir à un consensus d'experts par le biais de plusieurs tours d'enquêtes anonymes et de retours d'information.
) (ou méthode Delphi) pour émettre un ensemble de recommandations. Les experts ont été répartis en cinq équipes spécialisées qui se sont penchées respectivement sur les principes généraux, les procédures à suivre avant les tests, l'analyse du microbiote, les normes de reporting et la pertinence clinique.
Chaque recommandation a fait l'objet d'un examen rigoureux et a été évaluée à l’aide d’une échelle de Likert en appliquant un seuil d'accord de 80 % permettant de garantir que seules les recommandations fiables seraient retenues.
Ce processus méticuleux a révélé le besoin de mesures d'assurance qualité, d’un travail d'équipe multidisciplinaire et d'une communication transparente sur les limitations actuelles des tests du microbiote. Il a également mis en évidence un point fondamental : les tests ne devraient pas être commandés directement par les patients, mais être effectués uniquement sur recommandation médicale.
Les leçons à retenir du consensus
Les quatre recommandations ci-dessous sont INCONTOURNABLES pour tout médecin souhaitant utiliser le microbiote dans sa pratique clinique.
Bannir l’accès direct des consommateurs aux tests : le groupe d’experts déconseille fortement aux patients de demander eux-mêmes des tests de leur microbiote. Dans l'idéal, face au risque d’erreurs d’interprétation et d'interventions incorrectes, les tests devraient être effectués à l’initiative d’un médecin ou d’un professionnel de santé habilité s’appuyant sur une solide justification clinique.
Oublier le rapport F/B : les experts recommandent d’oublier le (sidenote:
Rapport Firmicutes/Bacteroidetes
indicateur autrefois consacré mais aujourd'hui contesté, comparant deux phyla bactériens majeurs de l'intestin, souvent associés (à tort) à la bonne santé ou à la maladie.
), faute de preuves suffisantes de son utilité. Ils recommandent d’en faire de même avec les indicateurs de dysbiose d’usage courant car ils n’ont pas été validés. Selon eux, il convient plutôt de mettre l'accent sur l'établissement du (sidenote:
Établissement du profil taxonomique
analyse d'une communauté microbienne par l'identification et la classification de ses membres à différents niveaux taxonomiques, tels que le genre ou l'espèce.
) complet par séquençage de l'ARNr 16S ou du métagénome entier.
Le contexte clinique est primordial : les rapports doivent inclure des (sidenote:
Métadonnées cliniques
données essentielles sur le patient (par ex., âge, régime alimentaire, traitements) qui accompagnent un échantillon et aident à interpréter les résultats des tests du microbiote dans un contexte médical.
) détaillées (âge, IMC, régime alimentaire, traitements) afin de faciliter l'interprétation des résultats. De même, les comparaisons avec des témoins appariés en bonne santé sont indispensables. Aussi étrange que cela puisse paraître, les fournisseurs de tests ne devraient pas donner de conseils thérapeutiques après l’analyse, cela devant rester du ressort exclusif du médecin traitant.
Qualité et transparence : il est essentiel de faire appel à des laboratoires agréés de grande qualité utilisant des logiciels validés. Afin de garantir la transparence, il convient de rédiger un rapport détaillé couvrant l'ensemble du protocole de test, depuis la collecte de l'échantillon jusqu’à l'analyse elle-même.
Tout en reconnaissant que les tests du microbiote constituent une technique prometteuse pour certaines affections spécifiques, le groupe d’experts conclut qu’il n’existe pas encore de données suffisamment probantes pour en justifier l'utilisation clinique systématique. Il est donc essentiel de poursuivre les recherches, notamment en menant des études fiables sur l’exactitude du diagnostic.
La formation des médecins à la science du microbiote et à l'interprétation des rapports est également essentielle pour l'intégration future. Ce consensus constitue une feuille de route fondamentale pour le développement et la mise en œuvre responsables des tests du microbiote dans la pratique clinique.
Une équipe de chercheur vient de mettre en évidence que dans chaque habitation, le microbiote de l’eau du robinet possède une signature qui lui est propre. Mais la présence concomitante de bactéries pathogènes et de gènes de résistance aux antibiotiques interroge…
Vous pensez que l’eau qui coule au robinet de l’évier de votre cuisine est la même que celle de votre douche, et la même que celle qui coule chez votre voisin ? Et vous considérez qu’elle est globalement sûre ? Détrompez-vous !
Leurs microbiotes – oui, l’eau contient aussi des ensembles diversifiés de microorganismes ! – sont significativement différents, et ces populations sont associées à des risques pour la santé mais ce n’est pas tout, ces populations partagent des mécanismes de résistance aux antibiotiques, affirme une nouvelle étude 1 publiée dans Nature.
Peu d’études sur la qualité de l’eau, directement au robinet
Habituellement, la grande majorité des microorganismes présents dans l’eau potable ne sont pas dangereux pour l’homme. En tant que partie intégrante de notre exposome, ils peuvent même participer à l’équilibre de notre microbiote intestinal. Mais l’eau potable est aussi un milieu pouvant contenir des gènes de résistance aux antimicrobiens (on parle de « résistome » de l’eau) et des microorganismes pathogènes.
Si, à l’échelle des villes, la qualité de l’eau potable des réseaux de distribution est très surveillée, on sait peu de choses sur celle qui arrive au niveau des robinets, à l’intérieur même des habitations. Certaines spécificités (diamètre réduit des tuyaux, températures plus élevées, stagnation nocturne, type de chauffe-eau…) peuvent pourtant influencer les communautés bactériennes qui y vivent.
Pour mieux connaître ces particularités, des chercheurs ont recruté les habitants de 11 foyers de Saint-Louis dans le Missouri (États-Unis). Ils leur ont demandé de prélever, durant une semaine, l’eau coulant aux robinets de leur cuisine et de leur douche afin d’examiner les variations, notamment quotidiennes, de microbiote et de résistome.
Transferts de gènes de résistance, une bombe à retardement
L’analyse bactérienne des eaux de robinet a permis d’identifier une souche appelée Pseudoxanthomonas mexicana porteuse d’un gène de résistance aux antibiotiques de la famille des bêta-lactamines. Si cette bactérie a retenu l’attention des auteurs de l’étude, c’est que plusieurs études suggèrent que Pseudomonas aeruginosa résistante aux bêta-lactamines, une bactérie pathogène très répandue et mise en cause dans les infections nosocomiales, pourrait avoir acquis son gène de résistance… de Pseudoxanthomonas mexicana. Pour les chercheurs, il existe un risque non négligeable que l’utilisation d’eau potable contaminée par Pseudoxanthomonas mexicana entraîne des transferts du gène de résistance vers les bactéries du microbiote humain.
Cette étude éclaire sur l’importance de notre exposome et révèle l’existence d’un microbiote unique de l’eau domestique. Mieux le comprendre ouvre des perspectives pour une eau plus sûre, mais des recherches à plus grande échelle sont à ce stade nécessaires.
Des découvertes majeures qu’il est important de considérer
De façon surprenante, les résultats des analyses indiquent que l’eau de chaque foyer possède une signature microbienne spécifique, différente des autres foyers. Et le microbiome de l’eau de la cuisine est différent de celui de la douche.
50 %
Une bactérie responsable d’infections de la peau, était présente dans 50 % des foyers
Les chercheurs ont par ailleurs identifié la présence de différents microorganismes pathogènes, notamment dans l’eau de la douche. Par exemple, Mycobacteriumchelonae, une bactérie responsable d’infections de la peau, était présente dans 50 % des foyers.
Mais c’est la présence de gènes de résistance aux antimicrobiens, dont le profil était cette fois similaire d’un foyer à l’autre, qui a le plus interpellé les chercheurs. Ceux-ci en ont retrouvé 162, dont certains pouvant conférer une résistance à l'aztréonam et au méropénem, deux antibiotiques majeurs, utilisés pour traiter les infections récalcitrantes.
Pour les scientifiques, il apparaît fondamental de mettre en place une meilleure surveillance du résistome à l’échelle des foyers. Mais aussi de mieux surveiller les microorganismes pathogènes. Car il existe un risque non négligeable : celui que des gènes de résistance soient transférés aux pathogènes de l’eau et aux bactéries de notre microbiote.
Le rôle du microbiote vaginal dans l’infertilité se confirme : non seulement la dysbiose varie avec le type d’infertilité, mais des co-infections bactériennes et virales pourraient contribuer cumulativement à l'infertilité.
L’infertilité, qui touche environ 15 % des couples en âge de procréer, semble fortement liée à la dysbiose du microbiote vaginal.
Or, peu d’études s’étaient jusqu’alors penchées sur les différences de microbiote vaginal entre les femmes présentant une infertilité primaire (incapacité à tomber enceinte après 12 mois d’essai) et secondaire (difficulté à retomber enceinte après une première grossesse).
D’où des travaux récents 1 visant à caractériser le microbiote vaginal dysbiotique et sa relation avec l'infertilité chez 136 Mexicaines diagnostiquées avec une infertilité primaire (58 femmes) ou secondaire (78).
17,5 %
L’infertilité concerne environ 17,5% de la population adulte – soit environ une personne sur six dans le monde –. Sa prévalence varie peu d’une région à l’autre ou selon la richesse d’un pays. ²
48 millions
L’infertilité concerne 48 millions de couples dans le monde. Les causes, parfois inexpliquées, incluent des facteurs hormonaux, génétiques ou environnementaux affectant les hommes comme les femmes. ³
L’effet de l’âge
L’analyse de prélèvements vaginaux montre que l’âge est le premier facteur expliquant la typologie de la flore vaginale des femmes de l’étude.
L’âge se révèle en outre positivement corrélé avec l'infertilité primaire (les patientes les plus âgées étaient plus touchées) et inversement corrélé à l'infertilité secondaire.
Or, comme le rappellent les chercheurs, le microbiote vaginal évolue au long de la vie, avec notamment un recul des Lactobacillus protecteurs et une sensibilité accrue aux dysbioses. Ainsi, les chercheurs font l’hypothèse (qui reste à valider) que les évolutions de microbiote pourraient expliquer les difficultés de conception, naturelle ou assistée, et donc la prévalence accrue de l’infertilité primaire chez les femmes plus âgées.
Par ailleurs, l’analyse des microbiotes vaginaux montre une moindre prédominance des lactobacilles chez les femmes touchées par l’infertilité, comparativement à des flores de femmes fertiles.
Mais surtout, elle met en évidence des différences entre les femmes souffrant d’infertilité primaire et secondaire.
Chez les femmes souffrant d’infertilité primaire, les bénéfiques Lactobacillus crispatus et Lactobacillus gasseri dominent, mais les chercheurs notent également une proportion élevée de Gardnerella vaginalis et de Fannyhesseavagina, des bactéries co-impliquées dans la vaginose. Et la présence de G. vaginalis est fortement associée à celle du HPV.
En cas d’infertilité secondaire, la présence de G. vaginalis va de pair avec celle du virus d'Epstein-Barr voire celui Haemophilus influenzae. Des bactéries sexuellement transmissibles, dont certaines déjà associées à l’infertilité, sont également plus présentes : Ureaplasma parvum, Ureaplasma urealyticum, Mycoplasma hominis et Chlamydia trachomatis.
Ces résultats suggèrent que la composition du microbiote vaginal pourrait jouer un rôle décisif dans l'infertilité, et ouvrir la voie à des thérapeutiques personnalisées reposant sur les modifications du microbiote vaginal.
Par ailleurs, les co-infections bactériennes et virales semblent exacerber la dysbiose et contribuer cumulativement à l'infertilité. D’où l’intérêt d'études qui incluent non seulement des évaluations bactériennes, mais aussi virales et fongiques, pour comprendre pleinement le rôle du microbiote dans l'infertilité.
Chaque type d’infertilité aurait ses propres déséquilibres en termes de microbiote vaginale. Et ses propres duos de virus et bactéries qui participeraient, de concert, à la dysbiose… et peut-être aux difficultés à tomber enceinte ?
L'infertilité, sujet sensible qui touche plus de 15 % des couples en âge de procréer, pourrait (aussi) trouver sa source dans notre microbiote vaginal !
17,5 %
L’infertilité concerne environ 17,5% de la population adulte – soit environ une personne sur six dans le monde -. Sa prévalence varie peu d’une région à l’autre ou selon la richesse d’un pays. ²
48 millions
L’infertilité concerne 48 millions de couples dans le monde. Les causes, parfois inexpliquées, incluent des facteurs hormonaux, génétiques ou environnementaux affectant les hommes comme les femmes. ³
L’idée, déjà évoquée dans la fécondation in vitro (FIV) ou l’infertilité en général, est confortée par une étude 1 menée auprès de 136 Mexicaines diagnostiquées avec une infertilité primaire (pas de grossesse après 12 mois de tentatives) ou secondaire (difficulté à retomber enceinte après une première grossesse).
Les chercheurs ont passé au crible les prélèvements vaginaux de ces femmes pour mieux comprendre ce qui se passe vraiment dans leur microbiote, et le lien avec la fertilité.
Tout d'abord, l’âge se révèle être un facteur crucial. Plus une femme est âgée, plus elle risque de souffrir d’infertilité primaire, tandis que l’infertilité secondaire semble davantage toucher les femmes plus jeunes. Or, on sait depuis longtemps que le microbiote vaginal évolue avec l'âge, les bactéries bénéfiques du vagin (les fameux Lactobacillus) perdant progressivement leur hégémonie et concédant du terrain à des bactéries moins favorables. Pour les chercheurs, ces changements pourraient en partie expliquer pourquoi il devient plus difficile de tomber enceinte naturellement (ou même avec assistance médicale), lorsque l’on commence à avoir quelques décennies au compteur.
Deux infertilités, deux microbiotes différents
Mais surtout, les chercheurs montrent que les femmes souffrant d’infertilité primaire et celles diagnostiquées pour une infertilité secondaire présentent des microbiotes vaginaux différents.
Chez les femmes souffrant d’infertilité primaire, les Lactobacillus bénéfiques, bien qu’encore majoritaires, ont perdu de leur superbe au profit de bactéries dont notre vagin se passerait bien, comme le duo Gardnerella vaginalis et Fannyhessea vagina, impliqué dans des (sidenote:
Vaginose bactérienne
La vaginose bactérienne (VB) est un type d'inflammation vaginale causée par un déséquilibre des espèces de bactéries qui sont normalement présentes dans le vagin.
). Mais ce n’est pas tout : la présence de G. vaginalis semble être fortement associée à l’infection par le papillomavirus humain (HPV). De sacrées associations de malfaiteurs !
Chez les femmes souffrant d’infertilité secondaire, la flore est également perturbée, mais différemment : G. vaginalis va souvent de pair avec le virus de l’herpès ; des bactéries responsables d’infections sexuellement transmissibles sont également présentes.
D’où l’importance, pour les auteurs, d’avoir non seulement les bactéries pathogènes en ligne de mire, mais aussi les virus car ils semblent travailler de concert, avec un impact cumulatif sur l’infertilité. L’espoir reste néanmoins de mise : le microbiote vaginal devrait permettre de mieux comprendre l’infertilité et de proposer des traitements plus personnalisés.
Chaque comprimé que nous prescrivons produit plus d’effets que nous ne le pensons. L'entacapone, un médicament bien établi contre la maladie de Parkinson, ne se contente pas d’aider les patients, il remodèle leur microbiote intestinal. Face à des bactéries comme E. coli qui ont trouvé de nouvelles façons de proliférer, ce médicament modifierait-il sa propre efficacité ?
C’est ici, au cœur du labyrinthe de l’intestin humain que l'entacapone, un médicament contre la maladie de Parkinson, livre une guerre pour laquelle il n’a pas été conçu. À l’occasion d’une étude qui pourrait nous amener à revoir totalement notre conception des interactions entre les médicaments et le microbiote, des chercheurs ont découvert l’impact inattendu de l'entacapone sur les communautés bactériennes intestinales, dont les conséquences vont bien au-delà de ses effets neurologiques escomptés.
L'entacapone est depuis longtemps considéré comme une aide essentielle pour les patients atteints de la maladie de Parkinson, car il prolonge l’efficacité de la lévodopa en inhibant sa dégradation. Pourtant, lors de son voyage dans le tube digestif, l’entacapone se livre à une remarquable manipulation moléculaire. En effet, l'entacapone se lie au fer avec une efficacité impressionnante, agissant comme un chélateur capable de réduire la quantité de fer disponible dans l'environnement intestinal.
Le fer, un nutriment fondamental tant pour les humains que pour les microbes, devient soudainement plus rare. Cette pénurie se répercute sur le microbiote, affamant sélectivement certaines populations bactériennes tout en favorisant la prolifération de certaines autres.
La présente étude 1, publiée récemment dans la revue scientifique Nature Microbiology, révèle que certaines bactéries comme Escherichia coli prospèrent dans ces conditions, tandis que d’autres espèces telles que Bacteroides uniformis et Clostridium sensu stricto, périclitent.
Cette modification subtile mais profonde de l’équilibre microbien expliquerait en partie pourquoi tous les patients ne répondent pas de la même manière au traitement par l’entacapone. La présence ou l’absence d’espèces bactériennes essentielles, dont beaucoup jouent un rôle crucial dans le métabolisme des médicaments et la régulation de la fonction immunitaire, déterminerait si le médicament exerce l’effet escompté ou, au contraire, s’il produit des effets secondaires indésirables.
Un risque caché : l'entacapone et le développement de microbes résistants
Le résultat le plus inattendu et le plus troublant de cette étude est sans doute la sélection de souches bactériennes virulentes et résistantes aux antibiotiques. La privation de fer provoquée par l'entacapone semble favoriser les microbes dotés d'adaptations génétiques leur permettant de survivre dans ces conditions difficiles.
Parmi eux figurent des bactéries porteuses de gènes associés à la résistance aux antimicrobiens (RAM), ce qui soulève la possibilité d’un risque accru d'infections résistantes aux médicaments en cas d’utilisation à long terme de l'entacapone. Cette découverte revêt une importante toute particulière dans un contexte de crise mondiale liée au développement de la résistance aux antimicrobiens
S’il était démontré que l’entacapone alimente indirectement un environnement favorisant la prolifération de bactéries résistantes, cela compliquerait encore davantage le traitement de la maladie de Parkinson et la santé des patients. Dans ces conditions, les médecins devraient-ils analyser la composition du microbiote avant de prescrire de l’entacapone ? Certaines thérapies concomitantes, telles que l’administration ciblée de suppléments de fer, pourraient-elles atténuer ces effets ? Ces questions méritent d’être explorées de toute urgence.
Implications thérapeutiques : repenser le traitement de la maladie de Parkinson
Alors que l’on commence à peine à comprendre l’interaction complexe entre les médicaments et le microbiote, cette étude met en lumière la nécessité d’adopter une approche plus globale du traitement de la maladie de Parkinson.
Une intervention prometteuse consiste à optimiser le moment de l’administration des suppléments de fer. En effet, le fer par voie orale pouvant réduire l'absorption de l'entacapone, l’administration de suppléments à un moment différent de la journée, ou encore le développement de systèmes d'administration ciblés permettant de reconstituer les réserves de fer dans l'intestin, pourraient rétablir l'équilibre microbien sans interférer avec l'efficacité du médicament.
En outre, des approches de médecine de précision permettraient d’affiner le traitement par l’entacapone en tenant compte de la composition unique du microbiote de chaque malade. Si certains profils microbiens permettaient de prédire un risque accru de dysbiose, les médecins pourraient ajuster les doses de médicaments ou envisager des traitements alternatifs.
Cette étude nous rappelle avec force qu'aucun médicament n'agit de manière isolée. Au-delà de leurs effets sur le corps humain, les médicaments modifient l'écosystème du microbiote, parfois d'une manière que nous commençons à peine à comprendre. L'entacapone, jadis considéré exclusivement comme un outil de traitement neurologique, serait en réalité un acteur clé de la refonte du microbiote intestinal, pour le meilleur et pour le pire.